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Huawei: Martin Bouygues pointe le risque d'une distorsion de concurrence

HUAWEI: MARTIN BOUYGUES POINTE LE RISQUE D'UNE DISTORSION DE CONCURRENCE

PARIS (Reuters) - Interdire aux opérateurs télécoms déjà équipés d'infrastructures Huawei de recourir à l'équipementier chinois pour la 5G pourrait engendrer une distorsion de la concurrence sur le marché français, a estimé jeudi Bouygues qui n'exclut pas de porter l'affaire en justice.

Les Etats-Unis incitent les pays européens à se passer de la technologie de Huawei, qu'ils accusent de servir aux activités d'espionnage de la Chine, ce que le groupe chinois dément.

Le gouvernement français doit donner en principe d'ici la fin du mois ses premiers feux verts aux demandes d'équipements formulées par les opérateurs qui ont le choix entre les groupes européens Nokia et Ericsson et Huawei pour le déploiement de la dernière génération de technologie mobile.

Si officiellement aucun équipementier n'est frappé d'interdiction dans l'Hexagone, certains acteurs du secteur craignent que Huawei ne soit "de facto" banni du marché de la 5G qui permettra de nouveaux usages dans des secteurs stratégiques comme les véhicules connectés, l'industrie ou la télémédecine.

"Si nous étions (...) dans l'obligation d'utiliser un autre équipementier que Huawei, dans les zones où nous avons des équipements 4G Huawei actuels, nous serions obligés de les démonter et de réinstaller des équipements, ce qui a un effet de coût et de délai", a expliqué Martin Bouygues, PDG du groupe diversifié, lors de la présentation des résultats annuels.

SFR (Altice Europe) se trouve dans le même cas de figure que Bouygues Telecom tandis que le numéro un Orange et Free (Iliad) ont fait le choix d'équipementiers européens pour la 5G.

Rappelant que Bouygues Telecom avait utilisé des équipements Huawei en totale conformité avec les règles qui prévalaient jusque-là, il a estimé qu'il reviendrait aux autorités d'assumer les conséquences d'un éventuel changement de pied.

"Il n'est pas normal qu'on crée des distorsions de concurrence entre les opérateurs", a estimé le PDG, ajoutant qu'il ferait en sorte de préserver les intérêts économiques de son groupe.

Le secrétaire général de Bouygues Telecom Didier Casas a déclaré de son côté que l'opérateur se réservait toutes les possibilités, pour protéger ses droits y compris celle d'un recours visant les décrets d'application du texte de loi adopté l'an dernier instaurant un nouveau régime de contrôle des infrastructures télécoms.

Dans un entretien aux Echos https://bit.ly/3bPenS5 fin janvier, Arthur Dreyfuss, le président de la Fédération française des télécoms et par ailleurs secrétaire général de SFR, avait plaidé pour une indemnisation financière des opérateurs par les Etats qui interdiraient Huawei.

VISE UN CASH FLOW LIBRE D'UN MILLIARD EN 2020

L'opérateur, qui va investir entre 1,1 et 1,2 milliard dans ses infrastructures cette année, notamment dans la 5G, a gagné l'an dernier 653.000 nouveaux clients mobile et 427.000 dans la fibre, ce qui lui a permis d'enregistrer une progression de 13% de son chiffre d'affaires.

Au global, le groupe diversifié dans les médias, le BTP et les télécoms a amélioré en 2019 son chiffre d'affaires (+7% à 37,9 milliards d'euros) et son résultat opérationnel courant (+112 millions à 1,7 milliard).

Son résultat net, part du groupe, a en revanche reculé à 1,2 milliard (-124 millions) en raison de la baisse des produits exceptionnels chez Bouygues Telecom.

Dans la construction, le carnet de commandes du groupe a reculé de 2% en France l'an dernier, en raison de la baisse de 2% des activités de Colas, sa filiale routes, et de 11% dans l'immobilier.

Pour 2020, Bouygues prévoit une marge en amélioration dans la construction et une marge "à deux chiffres" pour sa filiale TF1 , grâce au développement des activités vidéo.

Au total, le groupe Bouygues, qui n'anticipe pas d'impact direct de l'épidémie de coronavirus sur ses activités, vise une génération de cash-flow libre d'un milliard d’euros cette année grâce à la contribution de ses trois activités.

A 13h55, le titre Bouygues progressait de 3,4% à 40,72 euros, enregistrant la plus forte progression de l'indice CAC 40 (-0,2%).

(Jean-Michel Bélot et Gwénaëlle Barzic, édité par Jean-Stéphane Brosse)