Hollande et Merkel réclament plus d'Europe face aux crises

François Hollande et Angela Merkel ont réclamé mercredi un renforcement de l'intégration européenne pour faire face à la multiplication des crises, se limiter à l'Etat-nation condamnant selon eux l'Europe à l'impuissance et au déclin. /Photo prise le 7 octobre 2015/ REUTERS/Vincent Kessler

STRASBOURG (Reuters) - François Hollande et Angela Merkel ont réclamé mercredi un renforcement de l'intégration européenne pour faire face à la multiplication des crises, se limiter à l'Etat-nation condamnant selon eux l'Europe à l'impuissance et au déclin. Les dirigeants français et allemand ont prononcé côte à côte deux discours devant le Parlement européen réuni à Strasbourg, symbole de la réconciliation entre les deux pays, 25 ans après un exercice du même type mené par François Mitterrand et Helmut Kohl après la chute du Mur de Berlin. Le président français a cité la formule utilisée par François Mitterrand en 1995 devant la même assemblée pour l'un de ses derniers discours - "le nationalisme, c'est la guerre". "Le souverainisme, c'est le déclinisme", y a ajouté François Hollande, en référence à la montée du sentiment anti-européen dans presque tous les pays de l'UE. "Le débat n'est pas entre plus d'Europe et moins d'Europe, mais entre l'affirmation de l'Europe et la fin de l'Europe", a-t-il déclaré en insistant sur l'objectif "d'une fédération d'Etats-nations qui doit rester notre horizon", idée défendue par Jacques Delors il y a 25 ans mais désormais peu populaire. "Il y a une tentation de repli national chaque fois qu’il y a une épreuve. Rien n'est pourtant plus vain que de chercher à se sauver seul, à se dérober, à s'abriter quand des événements majeurs se produisent dans le monde entier", a-t-il ajouté. La chancelière allemande a abondé dans le même sens. "Plus que jamais, il faut plus d'Europe", a-t-elle dit en jugeant "l'Etat-nation" incapable de relever les défis. "Se cloisonner, se fermer à l’époque de l’internet, c’est une illusion. Aucun problème ne serait résolu. Au contraire, des problèmes supplémentaires bien plus graves verraient le jour." LES RÉFUGIÉS, UNE "CHANCE" Les deux dirigeants ont décliné cette exigence sur tous les dossiers qui sont sur la table du Conseil européen, de la crise en Ukraine au réchauffement climatique en passant par la crise financière et sociale et le renforcement de la zone euro, sans faire aucune annonce. Ils se sont surtout étendus sur la crise des réfugiés engendrée par la guerre en Syrie, qui met les mécanismes européens à rude épreuve, notamment le traité de libre circulation de Schengen. "Nous devons nous en tenir à nos valeurs car autrement nous risquons de perdre nos valeurs et notre identité. Si nous ne respectons pas cela, nous nous méprisons nous-mêmes", a dit Angela Merkel. Au moment où l'Allemagne est confrontée à l'arrivée de centaines de milliers de migrants sur son sol, la chancelière a maintenu un discours d'ouverture malgré les oppositions qui se manifestent dans son pays. "Nous devons assumer de façon responsable l’attrait de l’Europe", a-t-elle ajouté. "Les chances sont beaucoup plus importantes que les risques." François Hollande avait auparavant reconnu que l'Europe avait "tardé à comprendre que les tragédies au Moyen-Orient et en Afrique" n'étaient pas sans conséquence pour elle. Mais si Schengen doit être réformé pour défendre les frontières extérieures de l'UE contre ceux qui ne peuvent prétendre à l'asile politique en Europe, ce traité est un acquis indépassable de l'intégration européenne, a-t-il dit. "A chaque crise, des peurs se manifestent. Il faut vivre avec la peur mais il ne faut pas vivre dominé par la peur." La présidente du Front national, Marine Le Pen, a attaqué les deux dirigeants, en qualifiant François Hollande de "vice-chancelier" d'Angela Merkel, qu'elle accuse de vouloir dominer les "autres peuples d’Europe". Dans sa réponse aux interventions des députés, Angela Merkel n'a fait aucune allusion aux propos de Marine Le Pen. François Hollande a quant à lui répondu au Britannique Nigel Farage que "la seule voie possible pour celles et ceux qui ne sont pas convaincus de l’Europe, c’est de sortir de l’Europe". "La souveraineté n’a rien à voir avec le souverainisme, la souveraineté européenne, c’est d’être capable de décider pour nous-mêmes et d’éviter que ce soit le retour aux nationalismes, aux populismes, aux extrémismes qui nous imposent aujourd’hui d’aller dans un chemin que nous n’avons pas voulu." (Jean-Baptiste Vey à Paris, avec Gilbert Reilhac à Strasbourg, édité par Yves Clarisse)