Publicité

Heurts à Londonderry, une jeune femme tuée par balle

Une femme place des fleurs sur les lieux de la mort de la journaliste Lyra McKee à Londonderry. La journaliste de 29 ans, qui n'était apparemment pas en reportage, a été tuée par balle jeudi soir lors d'affrontements à Londonderry, en Irlande du Nord, ont annoncé les autorités. /Photo prise le 19 avril 2019/REUTERS/Clodagh Kilcoyne

par Amanda Ferguson

BELFAST (Reuters) - Une journaliste de 29 ans, qui n'était apparemment pas en reportage, a été tuée par balle jeudi soir lors d'affrontements à Londonderry, en Irlande du Nord, ont annoncé les autorités.

La police a mis en cause des dissidents du camp nationaliste irlandais opposés au maintien de la province au sein du Royaume-Uni.

De véritables scènes d'émeute se sont produites dans le quartier de Creggan, un fief catholique, à la suite d'une opération de police destinée à prévenir des violences durant le week-end de Pâques, anniversaire du soulèvement de 1916 à Dublin.

Des manifestants ont lancé une cinquantaine de cocktails Molotov en direction des forces de l'ordre et deux voitures ont été incendiées.

"Malheureusement, vers onze heures du soir, un homme a fait irruption et a ouvert le feu à plusieurs reprises en direction de la police. Une jeune femme, Lyra McKee, 29 ans, a été blessée et a succombé à ses blessures", a déclaré aux journalistes un responsable de la police nord-irlandaise, Mark Hamilton.

Le groupe nationaliste irlandais New IRA (Nouvelle IRA), responsable de plusieurs attaques ces dernières années, est probablement derrière ce meurtre, a-t-il ajouté.

Lyra McKee préparait un livre sur des disparitions de jeunes gens pendant les trente années de guerre civile en Irlande du Nord entre 1968 et 1998, auxquelles ont mis fin il y a 21 ans les "accords du Vendredi saint".

"La mort de Lyra McKee dans l'acte terroriste présumé d'hier soir à Londonderry est quelque chose de choquant et de vraiment insensé", a dit la Première ministre britannique Theresa May dans un communiqué.

"PERSONNE NE VEUT REVENIR EN ARRIÈRE"

"Nous sommes tous remplis de tristesse à la suite des événements d'hier soir. Nous ne pouvons pas laisser les propagateurs de la violence, de la peur et de la haine nous ramener dans le passé", a déclaré pour sa part le Premier ministre irlandais Leo Varadkar.

"C'était un acte de haine, une attaque non seulement contre une citoyenne mais contre nous tous, contre notre nation et nos libertés", a-t-il affirmé plus tard.

La mort de Lyra McKee, décrite par son éditeur Faber comme une étoile montante du journalisme d'investigation, a été dénoncée tant par les nationalistes irlandais que par les unionistes favorables au maintien de l'Irlande du Nord au sein du Royaume-Uni.

"Ceux qui ont apporté des armes dans nos rues dans les années 70, 80 et 90 avaient tort. Ils ont toujours tort en 2019. Personne ne veut revenir en arrière", a souligné sur Twitter Arlene Foster, dirigeante du Parti unioniste démocrate (DUP).

Saoradh, un petit parti politique proche des dissidents du mouvement nationaliste irlandais, a déclaré dans un communiqué que Lyra McKee avait probablement été tuée accidentellement "par un volontaire républicain" alors qu'elle se trouvait près des policiers.

"TRAGÉDIE"

La présidente de la Chambre des représentants américaine, Nancy Pelosi, qui était en visite jeudi à Londonderry, a décrit la mort de la journaliste comme une "tragédie".

Peu avant d'être atteinte par les tirs, Lyra McKee avait posté sur Twitter une photographie montrant des jets de cocktails Molotov sur un véhicule de la police, avec le commentaire: "Derry ce soir. Folie absolue."

Une journaliste présente sur place, Leona O'Neill, a raconté, également sur Twitter, que la victime s'était écroulée près d'elle, à proximité d'un véhicule de police, après avoir été touchée par balle. Des policiers l'ont transportée à l'hôpital, où la jeune femme a succombé à ses blessures.

Lyra McKee avait obtenu en 2006 le titre de "jeune journaliste de l'année" décerné par Sky News.

Installée à Londonderry début 2018, elle souhaitait il y a trois mois voir poindre des "jours meilleurs" en Irlande du Nord et "dire enfin adieu, une bonne fois pour toutes, aux bombes et aux balles".

"Elle était une journaliste et une analyste inspirée", a écrit sur Twitter le vice-Premier ministre irlandais Simon Coveney.

(avec Conor Humphries et Padraic Halpin à Dublin; Jean Terzian, Nicolas Delame et Guy Kerivel pour le service français)