Hausse des violences liées à la drogue : une "menace pour l'Etat de droit" selon Alexis Goosdeel
Face à la diversification des drogues illicites et à la hausse des actes de violence liés à la drogue au sein de l’UE, des solutions innovantes sont mises en place, explique Alexis Goosdeel, directeur de l'Agence de l'UE sur la Drogue. Il est aujourd’hui l’invité de the Global Conversation.
***"***Les drogues sont partout aujourd'hui", indique Alexis Goosdeel, directeur de l'agence européenne sur les drogues, "qu'elles soient introduites clandestinement en Europe ou produites sur le territoire de l'UE. Tout peut faire l'objet d'un comportement addictif. Ainsi, la distinction [entre drogues dures et drogues douces, illicites et licites] ne recouvre pas toute la complexité, et la polyconsommation. En conséquence, tout le monde peut, à titre individuel, ou de manière indirecte, connaître un épisode - aigu ou chronique - de comportement addictif à l'une de ces substances".
***"***C'est un marché en perpétuel mouvement. Le cannabis et ses dérivés restent la première substance utilisée en Europe. La cocaïne est aujourd'hui beaucoup plus répandue en raison de l'augmentation considérable de la production et de la disponibilité.
Mais on constate également une hausse de la production d'amphétamines et du "chemsex"".
**"**Il existe plusieurs types de problèmes en termes de santé. L'un d'entre eux est, comme on l'a mentionné dans notre dernier rapport européen sur les drogues, que l’on constate que l’on est revenus aux taux d'infection par le VIH antérieurs à la directive COVID, ce qui n'est pas bon signe. Dans d'autres champs également, celui des maladies infectieuses, des études montrent qu'il y a une augmentation des maladies sexuellement transmissibles et que certaines d'entre elles deviennent résistantes aux antibiotiques et aux thérapies. Il est donc fondamental pour les politiques de prévention - pour les politiques nationales ou européennes en matière de drogues - d'avoir une approche plus globale et de tenter d'anticiper également, et de s’adresser à des petits groupes de personnes qui initient une pratique qui n'est pas encore courante mais qui pourrait représenter un danger ou un sérieux risque pour la santé".
"Si on regarde le point de départ de l'épidémie d'héroïne au sein de l'UE, nous avons fait d'énormes progrès et nous avons obtenu de très bons résultats grâce à notre approche collective en Europe, au cours des 30 dernières années.
On a réduit de manière spectaculaire le nombre de décès liés à la drogue. Actuellement, 7 000 à 8 000 personnes meurent d'une overdose dans l'UE, contre plus de 110 000 aux États-Unis, avec une population plus importante en Europe qu'Outre-Atlantique.
On a assisté au développement remarquable de l'offre de traitement, y compris des traitements de substitution. À la fin des années 90,on disposait peut-être de 30 à 35 000 places pour des traitements, alors qu'aujourd'hui, l'Europe en compte plus de 650 000. En ce qui concerne l'épidémie d'héroïne, cette évolution a été progressive et très efficace.
Le problème de fond et le défi résident plutôt dans le fait qu’il y a plus de substances et plus de combinaisons de produits, plus de polytoxicomanie, et qu’on doit changer notre approche de la prévention, du traitement et de la réduction des risques. Et je ne parle pas que des traitements de substitution, qui fonctionnent très bien pour les opioïdes.
Il s'agit aussi de développer de nouvelles formes de prévention, de traitement et de réduction des risques pour les autres substances et les autres usages".