Guerre en Ukraine: pourquoi Kiev communique moins sur sa contre-offensive?

Guerre en Ukraine: pourquoi Kiev communique moins sur sa contre-offensive?

"On m'a donné l'ordre de ne faire aucun commentaire, nous ne parlerons pas de la contre-offensive", lance à une journaliste de BFMTV un soldat ukrainien, dans la région de Kherson. Depuis une semaine en effet, les informations se font rares côté ukrainien sur la contre-offensive que Kiev mène contre les troupes russes dans l'Est du pays.

Les cartes marquant l'évolution des troupes au sol "ne changent pas faute de renseignements confirmés" et ce pour le "6e jour consécutif", notait vendredi dernier l'historien militaire Cédric Mas sur Twitter. Seuls "les indices et bribes d’informations laissent penser que le front bouge."

"Les responsables militaires ukrainiens ont offert un aperçu limité de la situation sur la ligne de front", soulignait également l'Institut d'étude de la guerre jeudi.

Des informations "qui pourraient être exploitées par l'adversaire"

"Le commandement ukrainien veut donner un minimum d'informations" sur ses positions, explique le général Jérôme Pellistrandi, consultant Défense de BFMTV, "il diminue les sources ouvertes qui pourraient être exploitées par l'adversaire."

Ce silence-radio, on appelle ça "la sécurité opérationnelle", déclare le colonel Michel Goya, aussi consultant défense de BFMTV, "on verrouille toutes les informations sur une zone donnée". Une tâche qui peut s'avérer compliquée, car "il faut par exemple gérer tous les soldats avec leurs téléphones" pour qu'ils ne disent rien à leurs proches, "tout ce qui peut révéler une information".

"Dans la zone de Kherson cela bouge donc, mais black-out complet des Ukrainiens", écrivait ainsi Cédric Mas la semaine dernière, soulignant ensuite que "les cartes prorusses montrent des reculs, notamment dans le secteur de Ischenka - Starytsya." Pour suivre le conflit par endroits il faut en effet prendre les informations russes.

"Le mauvais côté" de cette méthode, c'est "que cela laisse le terrain de la communication libre à l'ennemi", souligne Michel Goya.

"Une guerre de l'information"

Car le conflit entre l'Ukraine et la Russie est aussi "une guerre de l'information", rappelle le général Pellistrandi. Les deux pays donnent principalement les informations qui les mettent à leur avantage, "c'est de la propagande et la contre-propagande". Ainsi, les autorités ukrainiennes sont sorties de leur silence vendredi en affirmant avoir repris 88 localités aux forces russes dans la région de Kherson.

Mais si le chiffre de 88 semble important, "ce sont principalement des hameaux, des villages qui ont été repris", explique Jérôme Pellistrandi. L'important est avant tout de mettre en avant des réussites, "ils exploitent en communication leurs victoires", appuie Michel Goya.

La diminution de la circulation de l'information permet en effet également de limiter les images de soldats ukrainiens blessés ou tués ou combat, ou même d'un potentiel recul de l'armée ukrainienne, ce qui évite de ternir l'image de la contre-offensive auprès de l'opinion publique, nationale comme internationale.

Donner des bonnes nouvelles du front, "c'est donner un soutien moral aux familles, aux soldats, cela contribue à la confiance", souligne le colonel Michel Goya.

Article original publié sur BFMTV.com