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Guerre en Ukraine: ce que l'on sait de la destruction partielle du barrage de Kakhovka

Guerre en Ukraine: ce que l'on sait de la destruction partielle du barrage de Kakhovka

"Le monde doit réagir". Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a lancé un nouvel appel à la communauté internationale ce mardi 6 juin, quelques heures après la destruction partielle d'un barrage situé dans le sud de son pays.

Un événement survenu en pleine nuit et qui a entraîné avec lui des inondations dans une vingtaine de localités et des évacuations de civils se trouvant à proximité de l'ouvrage. Une catastrophe qui survient en plein conflit entre Kiev et Moscou.

Le barrage hydroélectrique partiellement détruit

Les faits ont eu dans la nuit de lundi à mardi. Le barrage de Kakhovka, situé sur le fleuve Dnipro en amont de Kherson, a été "partiellement détruit" selon les autorités installées par Moscou.

Il s'agit de l'une des plus grandes infrastructures de ce type en Ukraine et d'un ouvrage stratégique pour le pays. Pris dès le début de l'offensive russe, il permet notamment d'alimenter en eau la péninsule de Crimée mais aussi la centrale nucléaire de Zaporijia.

Des localités inondées et des milliers d'évacués

La destruction partielle du barrage a entraîné l'inondation d'au moins une vingtaine de localités selon le ministère ukrainien de l'Intérieur. La ville de Nova Kakhovka, où se trouve le barrage hydroélectrique, a été inondée, ont quant à eux affirmé les autorités locales installées dans cette région par la Russie.

L'Ukraine a annoncé évacuer "plus de 17.000" civils des zones inondées autour du barrage. "Plus de 40.000 personnes risquent d'être en zones inondées [...] Malheureusement, plus de 25.000 civils se trouvent sur le territoire sous contrôle russe", a également précisé sur Twitter le procureur général ukrainien Andriy Kostine.

La destruction partielle de cette semaine fait ressurgir un précédent en automne dernier. Le 23 octobre 2022, Volodymyr Zelensky avait accusé la Russie d'avoir miné le barrage.

Le président ukrainien évoquait à l'époque une potentielle "catastrophe à grande échelle" en cas d'explosion du barrage. "Plus de 80 localités, dont Kherson, se retrouveront dans la zone d'inondation rapide", avait alors averti le dirigeant. En novembre 2022, lors de leur retraite, les forces russes avaient fait exploser le pont qui surplombait le barrage.

De leur côté, les autorités d'occupation installées sur place par Moscou ont indiqué avoir commencé l'évacuation des habitants de trois localités. Le gouverneur par intérim de la région de Kherson, installé par la Russie, a toutefois affirmé qu'un grand nombre de personnes ne sera "pas nécessaire".

Autre dégât évoqué cette fois par le président ukrainien: les dommages environnementaux. Volodymyr Zelensky a évoqué "la plus grande catastrophe environnementale causée par l'homme en Europe depuis des décennies", ajoutant que la Russie "est coupable d'un écocide brutal".

"Pas de risque immédiat" pour la centrale de Zaporijia

Le barrage de Kakhovka sert notamment à alimenter en eau la centrale nucléaire de Zaporijia, plusieurs fois touchée lors de la guerre qui a débuté en février 2022, et ainsi refroidir le combustible de ses réacteurs. Aussi, la destruction partielle de l'ouvrage fait ressurgir la crainte d'un accident nucléaire, ressortie par Kiev ce mardi.

Un conseiller à la présidence ukrainienne, Mykhaïlo Podoliak, a estimé ce mardi matin que le danger de catastrophe nucléaire à Zaporijia "augmente désormais rapidement" après la destruction partielle du barrage.

La direction de la centrale, installée par l'occupation russe, a néanmoins assuré que la situation était sous contrôle et qu'il n'y avait "pas de menace pour la sécurité" de celle-ci. "Le niveau de l'eau du bassin de refroidissement n'a pas changé", a encore indiqué Iouri Tchernitchouk. Face à deux camps qui sont en guerre depuis plus d'un an, la parole de l'AIEA (Agence Internationale de l'Énergie Atomique) compte plus que jamais et fait office d'arbitre.

"Les experts de l'AIEA" présents sur le site "surveillent de près la situation", a indiqué l'instance onusienne dans un tweet, estimant enfin qu'il n'y avait "pas de danger nucléaire immédiat" à la centrale.

"Crime de guerre" pour Kiev, "sabotage" pour le Kremlin

Un Conseil de sécurité s'est réuni tôt ce mardi 6 juin autour du président Volodymyr Zelensky à la suite de la destruction partielle du barrage. Un incident qui survient dans un contexte où est annoncé, depuis plusieurs semaines déjà, une contre-offensive ukrainienne.

Le chef de l'administration présidentielle ukrainienne, Andryi Iermak, a estimé qu'il s'agissait "encore d'un crime de guerre commis par les terroristes russes". Peu de temps après, le conseiller à la présidence ukrainienne Mykhaïlo Podoliak a également repris le terme "terroristes russes" pour évoquer cette destruction partielle du barrage qui "crée des obstacles pour les actions offensives des forces armées".

Pour le général Jérôme Pellistrandi, consultant défense de BFMTV, il est "fort possible" que cet incident ait eu lieu pour "complexifier" la contre-offensive ukrainienne. Cette destruction, si elle d'origine russe, serait également selon lui "une nouvelle punition" infligée aux Ukrainiens.

La Russie a quant à elle dénoncé un acte de "sabotage délibéré" de Kiev, estimant qu'un des objectifs de l'Ukraine était de "priver d'eau la Crimée".

L'Occident accuse Moscou

Comme à chaque événement majeur se déroulant en Ukraine depuis le début du conflit, la communauté internationale - du moins l'Occident - n'a pas tardé à réagir. "Choqué" par la destruction partielle du barrage, le président du Conseil européen Charles Michel a affirmé que "la Russie et ses mandataires seront tenus pour responsables".

L'Otan, par la voix de son secrétaire général Jens Stoltenberg, a dénoncé la "brutalité" de la guerre de la Russie en Ukraine", par ce nouvel incident qui "met aujourd'hui en danger des milliers de civils et cause de graves dommages à l'environnement".

Interrogée ce mardi sur ce sujet à l'Assemblée nationale, la ministre des Affaires étrangères Catherine Colonna a considéré qu'"un nouveau seuil a été franchi avec la destruction partielle du barrage" et a affirmé que la France va "poursuivre l'accélération de son soutien militaire".

Évoquant une "nouvelle conséquence dévastatrice" de l'invasion russe en Ukraine, le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a estime que "la tragédie d'aujourd'hui est un nouvel exemple du prix terrible de la guerre pour les populations [...] cela doit s'arrêter".

Quelques heures plus tôt, le ministre ukrainien des Affaires étrangères Dmytro Kouleba a réclamé une réunion d'urgence du Conseil de sécurité de l'ONU à la suite de cette destruction partielle du barrage.

Article original publié sur BFMTV.com