Guantanamo : 5 anecdotes effroyables sur la prison militaire où Trump veut détenir des migrants sans papiers

Ce lieu, connu pour ses conditions de détention extrêmes, se prépare à accueillir jusqu'à 30 000 migrants sans papiers. Il est officiellement réservé aux détenus accusés de terrorisme.

Le camp Delta, sur la base de Guantanamo, en 2006 (Photo by Paul J. RICHARDS / AFP)
Le camp Delta, sur la base de Guantanamo, en 2006 (Photo by Paul J. RICHARDS / AFP)

L'endroit a une sinistre réputation. Le camp de Guantanamo, crée en 2001 après les attentats du 11 septembre, devrait accueillir jusqu'à 30 000 migrants sans papiers, a annoncé le président américain Donald Trump.

Cette prison militaire de haute sécurité est située sur la base navale américaine de Guantánamo, dans le sud-est de Cuba. Après avoir abrité de nombreux prisonniers au début des années 2000, jusqu'à 750, elle ne comptait plus que 15 détenus à la fin du mandat de Joe Biden.

Durant ces 24 années, le camp de Guantanamo a eu le temps d'acquérir une très mauvaise réputation à l'échelle internationale.

  • Des actes de torture

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Plusieurs documents et témoignages attestent d'actes de torture sur les prisonniers qui y sont détenus. Notamment des mails envoyés par un agent du FBI au directeur, en 2003 et 2004, dans lesquels cet agent décrit des scènes de torture dont il a été témoin.

Abu Zubaydah, détenu depuis plus de 20 ans, dont la plupart sur la base militaire américaine de Guantanamo, a été sévèrement torturé par la CIA. Ces tortures, il les a dessinées, et ces dessins sont réunis dans un rapport publié par son avocat Mark Denbeaux, également professeur à la Seton Hall Law School.

On y découvre des simulations de noyade, la diffusion de musique extrêmement forte avec un casque jusqu'à ce que les prisonniers se sentent nauséeux à cause de la pression des sons sur leur tympan, leurs nerfs et leur esprit, ou encore des privations de sommeil.

"Ils utilisent ce qu’ils ont appelé des techniques d’interrogatoire "musclées" ou "coercitives". Je vais vous donner deux ou trois exemples. La privation de sommeil […] On est transféré d’une cellule à l’autre toutes les demi-heures. Forcément, c’est impossible de dormir. Une fois que l’on est épuisé, on passe à l’interrogatoire. Il y a aussi la climatisation, c’est-à-dire, que l’on nous jette de l’eau froide et on nous laissait greloter sous la clim toute la nuit […] Le fait d’être menotté dans des positions douloureuses, les humiliations sexuelles", témoigne par exemple Mourad Benchellali, un ancien détenu français, rapporte Amnesty.

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Jumah Al-Dossari, libéré en juillet 2007, après cinq ans et demi de détention, sans qu'aucune charge soit retenue contre lui, raconte en 2008 au Washington Post sa détention, l'isolement, les tortures.

  • Neuf suicides

Face à ces conditions, certains détenus tentent de se suicider. La fiche de Jumah Al-Dossari dénombre 12 "tentatives sérieuses de suicide". "Je m'écroulais, comme un château de sable balayé par la marée. J'avais perdu l'espoir et la foi. Le but de Guantanamo est de détruire les gens et j'étais détruit. J'ai décidé que je préférais la mort à la vie", explique-t-il au Washington Post.

Sur l'année 2003, en une semaine, 23 détenus tentent de se donner la mort, après avoir entamé une grève de la faim en protestation contre leurs conditions de détention. Au total, au moins neuf détenus se donnent la mort.

Quoiqu'un ancien gardien de Guantanamo, Joseph Hickman, dénonce dans un livre les probables meurtres de trois détenus, qui auraient été maquillés en suicides par la CIA.

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  • Les Nations unies qualifie de "cruel, inhumain et dégradant" ce qui est infligé aux détenus

En février 2023, le site de Guantanamo a fait l'objet d'une inspection par des experts indépendants mandatés par les Nations-Unies . Ce qui est infligé aux prisonniers est qualifié de "cruel, inhumain, dégradant".

Surveillance quasi-permanente, extractions forcées des cellules, utilisation excessive de moyens de contention ou confinements poussés à l'extrême constituent le quotidien des détenus. À long terme, tout cela se transforme en handicaps et douleurs chroniques, en blessures entraînant des lésions au cerveau et en d’importants problèmes digestifs.

  • Une "zone de non-droit" pour Amnesty international

Les détenus qui sont passés ou sont toujours à Guantanamo sont soupçonnés d'activités terroristes. "Ce camp est un centre de détention arbitraire dans lequel les détenus ne connaissent toujours pas les charges pesant contre eux après dix à douze ans de détention précédés, pour la plupart, de périodes d'emprisonnement dans des centres de détention secrets dirigés par la CIA". Un lieu de "non-droit" créé avec la volonté claire d'échapper au droit international, d'où la difficulté, aujourd'hui, pour les anciens détenus à faire valoir ce qu'ils y ont subi", dénonce Jeanne Sulzer, responsable de la commission Justice Internationale à Amnesty International France, interrogée par France 24 en 2022.

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Car un statut spécial pour les détenus a été créé : celui de "combattant ennemi". Il permet de les maintenir en détention, pour une durée indéterminée, sans qu’aucune charge ne soit retenue contre eux. Plusieurs détenus sont emprisonnés durant des années sans qu'aucune charge ne soit retenue contre eux avant d'être parfois libérés.

  • Une base déjà utilisée pour les migrants ?

Alors que Donald Trump prévoit d'accueillir jusqu'à 30 000 migrants, certains seraient déjà accueillis sur place, d'après des révélations du New York Times qui datent de septembre dernier. Le journal a obtenu des documents gouvernementaux montrant que la base militaire de Guantanamo est utilisée depuis des décennies par les États-Unis pour incarcérer certains migrants interceptés en mer. les migrants sont toutefois placés en détention dans un espace distinct de la prison où sont incarcérés les détenus accusés de terrorisme.

Certaines associations dénoncent leur traitement sur place, sur la base de témoignages expliquant que les migrants sont surveillés lorsqu'ils appellent un avocat, qu'ils sont forcés de porter des lunettes occultantes lors de leurs transports, et que des rats sont attirés par les conditions d'hygiène déplorables de l'endroit.