Grèves en Italie contre la politique d'austérité de Letta

par Catherine Hornby et Francesca Piscioneri ROME (Reuters) - Un premier syndicat appelle ce vendredi à la grève et à des manifestations, et d'autres organisations pourraient suivre en début de semaine prochaine, pour protester contre la politique d'austérité du gouvernement de coalition droite-gauche d'Enrico Letta. Le mouvement, déclenché à l'initiative de l'organisation syndicale Cobas, classée à l'extrême-gauche, devait entrainer des perturbations dans le secteur public: écoles, administration, hôpitaux et transports. Trois autres confédérations syndicales plus importantes, la CGIL, la CISL et l'UIL, décideront lundi de l'opportunité de déclencher une grève générale. Le gouvernement a adopté mardi un budget 2014 qui fait quasiment l'unanimité contre lui, tant chez les syndicats que le patronat et la classe politique, y compris parmi les partis membres de la coalition gouvernementale. Il a été particulièrement mal accueilli par les organisations syndicales, qui espéraient un assouplissement des mesures d'austérité que connaît le pays depuis plus de deux ans. Les syndicats dénoncent notamment la poursuite du gel des salaires dans la fonction publique et estiment que la baisse de l'impôt sur le revenu envisagée par le gouvernement n'est pas au rendez-vous. Enrico Letta avait fait naître l'espoir que le budget 2014 serait celui de la réduction de la pression fiscale, mais le président du Conseil, à l'autorité affaiblie par les dissensions entre le centre gauche et le centre droit, n'est pas parvenu à trouver un accord au gouvernement sur le financement des allégements d'impôts. L'AUSTÉRITÉ ET "SES EFFETS DÉSASTREUX" "Avec ce budget, le gouvernement continue de faire du mal à un pays qui est déjà à genoux", a déclaré vendredi le porte-parole du Cobas, Piero Bernocchi, avant de participer à un rassemblement dans le centre de Rome. "Même après que la politique d'austérité ait démontré ses effets désastreux, avec une dette qui ne cesse de s'alourdir, une économie qui s'écroule et un chômage en flèche, ils s'obstinent dans cette voie", a-t-il ajouté. Le budget pour l'an prochain ne prévoit qu'une diminution marginale des taux d'imposition, tandis qu'il maintient le gel des salaires et des embauches ainsi que le non ajustement des retraites à l'inflation. L'Italie est en récession depuis le milieu de l'année 2011. Le ralentissement de l'activité économique a été aggravé par la hausse des impôts et les coupes sombres dans les dépenses publiques décidées par le précédent gouvernement de Mario Monti au plus fort de la crise de l'euro. Depuis son arrivée au pouvoir en avril, deux mois après des élections législatives sans véritable vainqueur, Enrico Letta éprouve les pires difficultés à imposer les réformes nécessaires au pays en raison des conflits permanents entre sa formation de centre gauche, le Parti démocrate (PD) et celle de Silvio Berlusconi, Peuple de la liberté (PDL, droite). Le tir de barrage suscité par la publication du budget augure mal de la discussion au parlement pour sa ratification, à moins que le texte ne soit largement amendé par les élus. En attendant les débats dans les deux chambres, la parole est à la rue. Les mouvements d'extrême-gauche et les anarchistes appellent à un défilé samedi dans la capitale. Certains militants ont prévu de camper durant la nuit devant la basilique Saint-Jean-de-Latran, lieu de rassemblement traditionnel pour les grand-messes syndicales. Pascal Liétout pour le service français