Un grand-père jugé pour inceste: une famille rompt le tabou au tribunal à Bourg-en-Bresse
Il y a deux ans, Lily, 10 ans, glissait un mot d'enfant dans une boîte aux lettres de l'association "Les papillons", installée dans son école. "Il met sa partie du bas dans ma partie du bas. J'essaye de m'enlever, mais je n'y arrive pas", raconte sur un papier la petite-fille, accusant son grand-père d'inceste. C'est le procès de ce dernier qui s'ouvre ce vendredi 20 septembre devant la cour criminelle de Bourg-en-Bresse, dans l'Ain.
Le grand-père y est jugé pour viol et agressions sexuelles sur Lily et deux de ses cousines. Un tabou qui se brise grâce à l'une des boîtes aux lettres de l'association "Les papillons", déployées dans les cours d'école pour libérer la parole d'enfants victimes de violences, trop jeunes pour pouvoir appeler le 119, le numéro national pour l'enfance en danger.
En 2022, Lily avait donc, grâce à ce dispositif, révélé son calvaire qui durait depuis plusieurs années, brisant le tabou de l'inceste familial. Sans qu'elle n'ose en parler à quiconque.
"Sa parole était verrouillée, elle ne voulait pas parler dans le cadre familial", souligne à l'AFP l'avocate de sa famille, Me Stéphanie Garcia.
Jusqu'à 20 ans de réclusion criminelle
L'enquête déclenchée par le mot de Lily a permis d'identifier deux autres victimes du grand-père, des cousines de la fillette, pour des faits d'agressions sexuelles incestueuses. Le cas de celles-ci, l'une désormais majeure, l'autre toujours mineure, constituent la seconde partie civile du dossier. L'enquête a aussi révélé que les faits se produisaient au domicile des grands-parents de l'enfant, lorsque ceux-ci la gardaient et que la grand-mère était absente.
Actuellement en détention, le grand-père qui est jugé encourt jusqu'à 20 ans de réclusion criminelle. A la barre, a reconnu les attouchements sur sa petite-fille, mais nié l'avoir violée. Le procès qui doit durer jusqu'à lundi.
Un procès à huis clos qui divise
Les avocates des parties civiles ont pourtant plaidé que les débats restent publics, un "besoin" pour les jeunes filles, selon Me Séverine Debourg, avocate de la famille de deux cousines de la victime, elles aussi victimes dans ce dossier, pourtant, l'instruction se déroule à huis clos.
La défense de l'accusé, Me Marie Audineau, s'est inquiétée devant la cour criminelle de l'Ain du récent emballement médiatique et du risque d'une "deuxième audience en dehors de cette salle".
Au regard de la médiatisation, la cour a estimé "nécessaire d'assurer la protection de ces mineures, y compris contre elles-mêmes", a indiqué son président Antoine Molinar-Min.
A la suite de cette annonce, la jeune fille, désormais âgée de 13 ans, qui avait dénoncé son grand-père, s'est effondrée dans les bras de sa famille. "Tu dois montrer que tu es plus forte que lui", lui a alors glissé sa mère. "Je ne comprends pas", a déclaré à l'AFP hors audience son beau-père, se disant "déçu" du huis clos qui signifie selon lui une "première victoire pour l'accusé". "Ça fait deux ans qu'on se bat pour que tout soit dit et que rien ne soit caché aux gens", a-t-il regretté.