Dans le gouvernement de Michel Barnier, ces ministres héritent de cinq dossiers chauds

Annie Genevard, Laurent Saint-Martin ou François-Noël Buffet ont des dossiers brûlants dans les ministères où ils arrivent ce lundi 23 septembre.

Et maintenant au travail, a ordonné Michel Barnier. Après plus de deux mois de paralysie politique, au cours desquels les yeux du pays tout entier étaient tournés vers les Jeux olympiques et paralympiques, la France a, de nouveau, un gouvernement de plein exercice.

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Avec leurs entrées en fonction officielles ce lundi 23 septembre, les nouveaux ministres auront à gérer plusieurs dossiers chauds, dont les révoltes contre la vie chère en Martinique, la crainte d’une reprise des violences en Nouvelle-Calédonie, les pressions pour réduire le déficit public et la possibilité d’une nouvelle crise agricole.

Président de la commission des Lois du Sénat, François-Noël Buffet est le nouveau ministre des Outre-mer.
LUDOVIC MARIN / AFP Président de la commission des Lois du Sénat, François-Noël Buffet est le nouveau ministre des Outre-mer.

Un sujet épineux pour un homme expérimenté. Ces derniers jours, les difficultés dans les territoires d’Outre-mer sont revenues sur le devant de l’actualité. En Martinique, la mobilisation des habitants contre la vie chère se poursuit. D’après une étude de l’Insee parue en 2022, les prix alimentaires sont 40 % plus élevés en Martinique qu’en France métropolitaine. Pour le nouveau ministre, ex-sénateur LR du Rhône, les chantiers sont colossaux. Comme président de la puissante commission des Lois, François-Noël Buffet s’était fortement impliqué sur le dossier lié à la Nouvelle-Calédonie. Il a en effet co-rédigé plusieurs rapports sur le sujet et co-piloté en 2022 la mission d’information sur l’avenir institutionnel du territoire.

Un hic toutefois : ses positions répétées sur l’immigration. À Mayotte, parfois secouée par des pics de violences, François-Noël Buffet s’était prononcé en faveur d’une restriction du droit du sol. Il devra composer avec une probable baisse des crédits.

Laurent Saint-Martin, ici en 2020 quand il était député, est désormais ministre du Budget.
LUDOVIC MARIN / AFP Laurent Saint-Martin, ici en 2020 quand il était député, est désormais ministre du Budget.

C’est sans doute le portefeuille le plus explosif. « Nous avons perdu le contrôle de nos finances », alertait encore le président de la Cour des comptes Pierre Moscovici il y a quelques jours. Dette publique à hauteur de 110 % du PIB, déséquilibre de la balance commerciale… Pour résorber une situation économique loin d’être au vert, les solutions existent. Michel Barnier a déjà dit que la hausse des impôts, contrairement à ce qu’en disaient ses prédécesseurs, ne serait pas un tabou. L’une des premières déclarations publiques du Premier ministre a concerné ce sujet, puisqu’il a confié découvrir une situation budgétaire « très grave ».

Mission numéro une de l’ancien rapporteur général du Budget : faire avec le Premier ministre auquel il répond directement les derniers arbitrages pour le Budget 2025. Celui-ci devrait être déposé sur le bureau de l’Assemblée le 10 octobre au plus tard. Le nouveau ministre, battu aux législatives de 2022 a-t-il les épaules pour affronter de telles difficultés ? Ces derniers mois, ce diplômé d’un master de finances à l’École des hautes études commerciales (EDHEC) a parcouru le monde pour représenter Business France, l’agence de l’internationalisation de l’économie française.

Fondatrice d’En Marche, Astrid Panosyan-Bouvet remplace Catherine Vautrin au ministère du Travail.
- / AFP Fondatrice d’En Marche, Astrid Panosyan-Bouvet remplace Catherine Vautrin au ministère du Travail.

Députée de Paris depuis 2022, cette ancienne cheffe d’entreprise notamment passée par Axa et Groupama a déjà plusieurs dossiers chauds qui l’attendent sur son bureau de la rue de Grenelle : salaire, retraites, chômage, emploi des seniors…

En deux ans à l’Assemblée, Astrid Panosyan-Bouvet n’a pas hésité à faire entre une voix dissonante à celle d’Emmanuel Macron avec qui elle a fondé En Marche il y a dix ans. Par exemple, lors de la réforme des retraites, elle n’a pas critiqué le report de l’âge légal de départ à 64 ans mais s’est parfois inscrite dans les pas du leader de la CFDT Laurent Berger, regrettant que la question du travail soit absente des réflexions.

Dans une tribune publiée dans Le Figaro en 2023, soit en pleine contestation de la réforme, elle avait aussi appelé à mieux considérer « la première et la deuxième ligne de la crise sanitaire. » Elle n’a pas voté la loi immigration, plaidait en faveur d’une régularisation de travailleurs sans-papiers et s’est montrée hostile à la réforme de l’assurance-chômage. « J’espère qu’elle va être constante avec ses positions et qu’elle va faire en sorte de l’enterrer définitivement », s’est déjà positionnée Sophie Binet, la secrétaire générale de la CGT ce 22 septembre sur BFMTV.

Patrick Hetzel, député du Bas-Rhin, retrouve le monde de l’Éducation qu’il connaît bien mais désormais comme ministre de l’Enseignement supérieur.
LUDOVIC MARIN / AFP Patrick Hetzel, député du Bas-Rhin, retrouve le monde de l’Éducation qu’il connaît bien mais désormais comme ministre de l’Enseignement supérieur.

Une sorte de retour aux sources. Patrick Hetzel connaît bien le ministère qu’il s’apprête à diriger pour avoir été recteur d’académie, puis directeur général de l’enseignement supérieur et conseillé François Fillon sur les questions d’Éducation lorsque celui-ci était Premier ministre. Le député du Bas-Rhin qui représente la frange la plus conservatrice des Républicains porte, rappelle Le Monde, « une vision libérale des universités » puisqu’il entend « débureaucratiser et faire respirer le système ».

En avril 2024, alors que la mobilisation pour un cessez-le-feu à Gaza battait son plein à Gaza, Patrick Hetzel défendait « la création d’une commission d’enquête relative à l’entrisme idéologique et aux dérives islamo-gauchistes dans l’enseignement supérieur ». Le même avait demandé, en pleine crise sanitaire du Covid-19, que la France fasse « confiance aux médecins » et autorise les prescriptions d’hydroxychloroquine.

Avec l’année universitaire qui s’ouvre, le nouveau ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche aura à affronter la précarité étudiante, les frais d’inscription, la réforme des bourses la gestion des Crous, la liberté académique, les moyens alloués aux universités…

Députée du Doubs et secrétaire générale des Républicains, Annie Genevard devient ministre de l’Agriculture.
DIMITAR DILKOFF / AFP Députée du Doubs et secrétaire générale des Républicains, Annie Genevard devient ministre de l’Agriculture.

Les traces de la crise agricole de l’hiver dernier sont encore vives. En janvier 2024, des centaines d’agriculteurs avaient organisé des blocages et des manifestations pour alerter sur la baisse des revenus, la concurrence déloyale et dénoncer les traités de libre-échange. Huit mois plus tard, la situation demeure ultra-sensible. Annie Genevard, élue du Doubs, devra arbitrer plusieurs sujets, notamment les indemnisations d’éleveurs en cas d’épidémie. Avec les élections dans les chambres d’agriculture prévues pour janvier 2025, la nouvelle ministre qui est jusqu’à présent secrétaire générale des Républicains apprendra vite à composer avec les syndicats. Notamment la FNSEA, premier de la profession. Son patron, Arnaud Rousseau, a donné ce 22 septembre « 15 jours » à Annie Genevard pour annoncer des mesures, sur la vaccination des troupeaux et les prêts bonifiés notamment. Voilà pour l’accueil.

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