Gouvernement Michel Barnier : avec des LR, Renaissance, « des gens de gauche », à quoi peut-il ressembler ?

Le Premier ministre nommé, il ne reste désormais qu’une étape avant que la France ne retrouve un semblant de situation politique classique : la nomination du gouvernement.

POLITIQUE - Ministères recherchent ministrables. Le chef de gouvernement trouvé en la personne de Michel Barnier, les tractations vont bon train pour composer son équipe gouvernementale. Le Premier ministre étant issu de la droite, la présence de représentants de LR est attendue. Mais le locataire de Matignon dit aussi vouloir « ouvrir la table à tous ceux qui le voudront ».

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Sur TF1 vingt-quatre heures après sa nomination, Michel Barnier se défend d’avoir jamais été « sectaire ». « Ce ne sera pas seulement un gouvernement de droite, comme je l’entends dire ici ou là », promet-il. Le Premier ministre met en avant ses capacités de négociateur et dit vouloir réunir autour de la table « des hommes et des femmes qui ont des compétences », qu’ils soient issus du camp présidentiel (Renaissance et ses alliés), de la droite ainsi que « des gens de gauche ».

Qui seront-ils ? Les tractations sont en cours. Michel Barnier a reçu vendredi le chef des députés EPR Gabriel Attal, puis les cadres de LR, Laurent Wauquiez, Bruno Retailleau et Gérard Larcher. Dimanche 8 septembre, ce sont Édouard Philippe et ses proches qui se sont rendus à Matignon en fin de matinée, avant le patron du MoDem François Bayrou dans l’après-midi.

Composer la future équipe gouvernementale n’est pas simple, entre le morcellement du paysage politique en trois blocs et un cadre inédit entre le président de la République et son Premier ministre qui, sans être de son parti, n’a pas de majorité d’opposition. Dès lors, participer au gouvernement n’est pas sans risque. Primo parce que la menace de la censure plane sur le Premier ministre et sa future équipe. Ensuite, parce que les partis d’opposition qui y participeraient risqueraient de se voir accuser de trahison par leurs électeurs, la situation n’étant pas celle d’une cohabitation classique.

Ce risque est particulièrement identifié chez Les Républicains et à peine installé à la tête du groupe à l’Assemblée, Laurent Wauquiez a pris soin de présenter son groupe comme d’opposition. Mais un Premier ministre issu de leurs rangs change la donne.

Après avoir été reçus par Michel Barnier, la porte n’était plus aussi fermée pour une participation au gouvernement. À la sortie, Bruno Retailleau a insisté sur la marge de manœuvre - sera-t-elle assez large ? - de Michel Barnier par rapport à Emmanuel Macron et Laurent Wauquiez que tout sera décidé « en fonction du programme ». Le soir même sur TF1, Michel Barnier dévoilait ses priorités, lesquels font clairement écho au « pacte législatif » établi par LR au début de l’été. Assez pour convaincre ?

Selon La Tribune du Dimanche, l’Élysée aimerait bien voir Xavier Bertrand, dont le nom a circulé pour le poste, dans l’équipe Barnier ; le président des Hauts-de-France n’y serait pas fermé. Le maire de Cannes David Lisnard, brièvement cité pour Matignon, esquive dans le JDD mais plaide pour participer « à certaines conditions ».

Un « parfum » de cohabitation… avec des ministres du camp présidentiel au gouvernement ? Gabriel Attal ne l’a pas exclu vendredi, évoquant auprès de ses troupes une « possible participation » avec pour « boussole » les mesures présentées au début de l’été par son camp. Le patron du MoDem François Bayrou, interrogé dans Le Grand Jury (RTL/Le Figaro/Public Sénat) le 8 septembre, estime que des ministres MoDem seraient « une évidence ».

Reste en parallèle la question des ministres démissionnaires, à qui Michel Barnier n’a pas fermé la porte. Plusieurs noms circulent pour rester, avec pour certains l’appui du président de la République : Rachida Dati, Sébastien Lecornu, Gérald Darmanin, Catherine Vautrin… Tous ont en commun d’avoir été engagé à un moment ou un autre dans un parti de droite et donc d’être en phase avec la ligne du nouveau Premier ministre. Mais les avis divergent : Agnès Pannier-Runacher, ex-ministre déléguée à l’Agriculture, a ainsi plaidé sur franceinfo le 7 septembre pour que « l’incarnation évolue ».

Quid du RN, « arbitre » pour Matignon mais exclu d’emblée du gouvernement ? Michel Barnier a assuré qu’il « verra » Marine Le Pen même si aucune date n’a encore été arrêtée, selon les déclarations de l’intéressée dans La Tribune Dimanche. La cheffe des députés et ancienne présidente du parti a néanmoins exclu de fait toute participation de ses troupes dans un gouvernement contre lequel elle agite la menace de la censure s’il ne répond à ses attentes. « La censure du gouvernement, c’est la censure du gouvernement, pas celle du seul Premier ministre. Si nous nous engageons pour une non‑censure immédiate parce que Michel Barnier exprime une juste considération à l’égard de l’ensemble des électeurs, je pense qu’il doit aussi avoir un gouvernement qui respecte cette ligne de conduite », met-elle en garde.

Reste le NFP qui, en dépit de sa première place aux législatives, a vu Matignon lui passer sous le nez. Michel Barnier l’assure malgré tout, les « gens de gauche » ne sont pas persona non grata dans son gouvernement. En l’état, personne ne se dit intéressé et rien n’a été annoncé sur une possible rencontre à Matignon.

« Quelqu’un qui se dit de gauche et qui va au gouvernement de monsieur Barnier, c’est qu’il n’est pas de gauche », tranche sur BFMTV la secrétaire nationale des Écologistes Marine Tondelier. « Si Michel Barnier m’appelle, je lui dis ’merci mais pour moi, cela serait de la compromission que de travailler avec vous’ », explique aussi sur franceinfo le 7 septembre le maire socialiste de Saint-Ouen, Karim Bouamrane, cité un temps pour Matignon. À La France Insoumise comme au Parti socialiste, la volonté de censurer du gouvernement Barnier a été officialisée.

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