Gouvernement Michel Barnier : comment sa formation tourne à la crise de nerfs

Michel Barnier sur le plateau de TF1 le 6 septembre (illustration)
LUDOVIC MARIN / AFP Michel Barnier sur le plateau de TF1 le 6 septembre (illustration)

POLITIQUE - « Envisage-t-il de jeter l’éponge ? » La question, posée mercredi 18 septembre dans la soirée par un journaliste dans la boucle WhatsApp via laquelle l’entourage de Michel Barnier communique avec la presse, en dit long sur les difficultés du Premier ministre à composer son gouvernement. Qui plus est dans un contexte de fortes tensions avec la Macronie, qui a conduit le chef du gouvernement à annuler coup sur coup deux rencontres : l’une avec le camp présidentiel, la seconde en début de soirée avec les représentants des Républicains.

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Et en improviser une autre : une entrevue à l’Élysée avec Emmanuel Macron, après une réunion infructueuse organisée la veille. En fin de journée et au regard de ces changements d’agenda, des propos rapportés en off dans la presse évoquaient ouvertement la possibilité d’une démission de Michel Barnier, décrit comme étant excédé par les comportements des uns et des autres.

Tensions sur le casting

Parmi les sujets sensibles : la façon dont Emmanuel Macron entend exercer un droit de regard sur le casting final, notamment sur le plan purement politique. Selon RTL, BFMTV mais encore Le Monde, le chef de l’État a rejeté une première liste soumise par son Premier ministre.

Raison du refus : un rendu trop « monocolore » aux yeux du président de la République. Comprendre : laissant trop de place à la famille d’origine de Michel Barnier, Les Républicains, laquelle réclame une part du gâteau gouvernemental, proportionnelle non pas au nombre de ses députés, mais à la valeur de l’alternative qu’elle apporte à Emmanuel Macron, désormais débarrassé de l’option Nouveau Front populaire.

Or, pour le camp présidentiel (qui a déjà perdu Matignon) hors de question de laisser Les Républicains rafler Beauvau, Bercy et l’Éducation nationale. D’où l’offensive coordonnée, sous forme de coup de pression, sur la possibilité d’une hausse d’impôt envisagée par Michel Barnier pour passer le mur de la dette. Une levée de boucliers qui s’additionne aux nombreux refus essuyés par le Premier ministre, notamment à gauche. Mais pas seulement.

Selon Le Parisien, plusieurs élus macronistes attendent de connaître l’architecture finale du gouvernement avant de répondre positivement. De quoi donner à la tâche de Michel Barnier des airs de mission impossible, et crisper toutes les parties prenantes.

Apaisement

D’autant que l’hypothèse d’une démission donne le vertige en Macronie, car qui d’autre que le chef de l’État serait ciblé en cas d’échec d’un Premier ministre préféré au NFP au nom de la « stabilité institutionnelle » ? Auprès de l’AFP, un parlementaire socialiste résume : « S’il lâche, ce serait une vraie crise de régime. Ça peut amener au plus lourd. » Comme la démission d’Emmanuel Macron.

Dans la soirée de mercredi, l’entourage de Michel Barnier a joué l’apaisement. « Un certain nombre d’informations qui circulent sont inexactes. Notamment sur les noms évoqués, ainsi que sur l’équilibre des sensibilités. Cela ne représente en rien le projet de gouvernement souhaité par le Premier ministre », a indiqué son équipe, précisant que « le Premier ministre poursuit son travail ».

Une façon de rappeler que le négociateur du Brexit, qui a négocié d’arrache-pied avec Boris Johnson durant des mois, en a vu d’autres. Ce jeudi 19 septembre, le Premier ministre a reçu dans la matinée la Présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, puis le Président du Sénat Gérard Larcher. À 15h, il recevra l’ensemble des formations politiques consultées en vue de la « formation rapide » d’un gouvernement, selon son entourage. « Il poursuit sa dernière journée de consultations. » Même si cela fait maintenant 14 jours qu’il est à la tête d’un gouvernement démissionnaire, il ne jette pas (encore) l’éponge.

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