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Gérald Darmanin suscite l’indignation avec ces propos sur l’esclavage

Ces propos de Gérald Darmanin sur l’esclavage ne passent pas (photo : Gérald Darmanin, lors d’un déplacement à Mayotte le 31 décembre 2022)
GREGOIRE MEROT / AFP Ces propos de Gérald Darmanin sur l’esclavage ne passent pas (photo : Gérald Darmanin, lors d’un déplacement à Mayotte le 31 décembre 2022)

POLITIQUE - L’abolition de l’esclavage, œuvre de la République française ? Cette déclaration du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a provoqué jeudi 2 février la colère des élus ultramarins après des propos jugés proches du « révisionnisme historique ».

Le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer et son ministre délégué Jean-François Carenco étaient invités à une journée de conférences sur les Outre-mer organisée par la rédaction du Point. Entre autres sujets, Gérald Darmanin a évoqué la question mémorielle, dans le cadre de discussions sur l’adoption en Martinique d’un drapeau inspiré des mouvements indépendantistes.

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« Les Antilles ont été des colonies, mais pas de peuplement. Je rappelle que, contrairement à ce que l’on raconte (…), c’est la République française qui a aboli l’esclavage. La France a sans doute mis, dans des conditions extraordinairement difficiles, les populations colonisées dans des états désastreux, mais c’est la République qui a aboli l’esclavage. On leur demande d’aimer la République, pas toute l’histoire de France », a déclaré le ministre, cité par Le Monde.

« Révisionnisme historique »

Tollé chez les élus ultramarins. Dans un communiqué commun, dix-huit députés se sont aussi indignés de cette réécriture de l’Histoire. « L’abolition de l’esclavage est avant tout le fruit de la lutte de nos ancêtres, la consécration de tant de femmes et d’hommes aux vies sacrifiées, le résultat de la résistance constante des esclaves, contraints d’arracher leur liberté là où les décisions de la République mentionnées par Gérald Darmanin tardaient à être proclamées, et plus encore, à être appliquées », répliquent-ils, tout en reconnaissant une histoire « plurielle dans sa réalisation ».

Et d’ajouter : « Au relativisme moral des puissances colonisatrices, (...) semble avoir succédé une forme nouvelle de révisionnisme historique ».

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Le Guadeloupéen Olivier Serva, ancien député LREM désormais indépendant et signataire du communiqué, a dénoncé avec virulence « un ramassis de conneries méprisantes ». « C’est du mépris du ministre des Outre-mer qui n’aime pas les Outre-mer alors même qu’ils font la grandeur de la France », fustige-t-il sur le site de La 1ère.

« Vous n’aurez d’autonomie demain que si vous êtes capable de produire ce que vous mangez, (...) pas par les subventions »

Gérald Darmanin

D’autres, comme la sénatrice de Martinique Catherine Conconne et son collègue de Guyane Georges Patient, se sont émus des propos du ministre sur le statut d’autonomie de ces territoires. Depuis la fin de l’accord de Nouméa et l’obligation d’engager une révision constitutionnelle, des élus d’autres collectivités ultramarines poussent en effet pour revoir en même temps les articles 73 et 74 qui concernent leur statut institutionnel.

Sans se prononcer pour ou contre, le ministre de l’Intérieur a fustigé en creux cette demande, déconnectée selon lui des préoccupations des populations locales. Dans les territoires qu’il a visités, « les gens spontanément dans la rue ne vous parlent pas d’institution. Les gens, ils veulent le développement économique, un logement, plus de subventions, de sécurité, mais pas d’institution différente », a-t-il déclaré, jugeant donc plus utile de s’attaquer à « la fiscalité ultramarine ». « Il faut savoir dire : vous n’aurez d’autonomie demain que si vous êtes capable de produire ce que vous mangez, ce que vous consommez comme électricité, et c’est par la richesse économique que vous aurez des recettes, pas par les subventions », a ajouté le ministre.

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« C’est justement pour pouvoir produire mieux que nous voulons un cadre plus adapté à nos réalités et la capacité de fixer nos règles », a répliqué Catherine Conconne, dénonçant des « propos indignes .» Dans leur communiqué, les députés soulignent eux que « c’est cette même République qui maintient nos territoires d’outre-mer dans un état de sous-développement chronique et qui passe quasiment systématiquement sous silence les outre-mer dans les projets de loi présentés au Parlement. »

Cette sortie du ministre de l’Intérieur intervient alors que les relations avec le gouvernement et la majorité se sont tendues après la réélection d’Emmanuel Macron. Le choix d’un ministre délégué, la question récurrente de la réintégration des soignants non-vaccinés et celle du pouvoir d’achat ont crispé les élus ultramarins. En réponse, ces derniers ont créé mi-janvier un collectif pour « enfin être entendus » sur les difficultés de leurs territoires en matière de santé et de vie chère. Ils entendent aussi travailler sur l’expression « Outre-mer », qui renvoie selon eux les territoires concernés à une « marge », et comptent proposer une nouvelle dénomination prochainement.

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