Fusillade dans un lycée de Géorgie : Donald Trump ressort cet argument bancal et ce n’est pas un hasard

Après la fusillade dans un lycée de Géorgie, Donald Trump (ici le 4 septembre 2024 en Pennsylvanie) ressort cet argument bancal qui ne doit rien au hasard.
MANDEL NGAN / AFP Après la fusillade dans un lycée de Géorgie, Donald Trump (ici le 4 septembre 2024 en Pennsylvanie) ressort cet argument bancal qui ne doit rien au hasard.

ÉTATS-UNIS - Même tragédie, mêmes (fausses) excuses. Les États-Unis sont une nouvelle fois en deuil après la fusillade qui a fait quatre morts et une trentaine de blessés dans un lycée de Géorgie mercredi 4 septembre. Un élève de cet établissement du sud-est du pays, Colt Gray, âgé de 14 ans, a ouvert le feu, tuant deux élèves et deux professeurs avant d’être arrêté.

Une fusillade dans un lycée en Géorgie fait quatre morts et une dizaine de blessés

En réaction, Joe Biden et Kamala Harris ont appelé, une fois encore, à agir contre cette épidémie de violence en régulant l’accès aux armes à feu. En parallèle, leur adversaire républicain Donald Trump, également en pleine campagne pour la présidentielle, a, lui, préféré pointer du doigt la santé mentale du tireur, le qualifiant de « monstre malade et détraqué ». Un argument qu’il brandit depuis des années, mais qui a ses limites.

La maladie mentale, responsable des tueries selon Trump

En effet, à chaque fusillade aux États-Unis se pose la question de la santé mentale des tireurs. En juillet 2019, après les tueries d’El Paso et de Dayton qui avaient entraîné la mort de 31 personnes, Donald Trump avait tenu pour responsable de ces bains de sang la « maladie mentale ».

« Nous devons réformer nos lois sur la santé mentale pour mieux identifier les personnes souffrant de troubles mentaux, susceptibles de commettre des actes de violence et veiller à ce que ces personnes ne soient pas seulement traitées mais, si nécessaire, détenues préventivement », avançait-il, assurant que « ce sont la maladie mentale et la haine qui appuient sur la gâchette, pas l’arme ».

Or justement, ici, même si on ne connaît pas encore les motivations de ce passage à l’acte chez l’adolescent de 14 ans, on sait que celui-ci était surveillé. La police fédérale américaine (FBI) a indiqué dans la soirée avoir émis en 2023 un signalement sur le suspect, qui avait menacé sur internet de perpétrer des tirs dans une école, photographies d’armes à l’appui.

À l’issue de ce signalement, il avait fait l’objet d’une enquête par les forces de l’ordre d’un comté voisin de Winder, ville où a eu lieu la fusillade, mais avait nié être l’auteur des menaces, tandis que son père avait affirmé que l’adolescent n’avait pas accès aux armes du domicile. Les écoles locales avaient également été prévenues afin que le suspect fasse l’objet d’une surveillance accrue. Mais « à ce moment-là, il n’existait aucun motif raisonnable d’arrestation ou de mesure supplémentaire de la part des forces de l’ordre », précise le FBI dans son communiqué.

Les experts contredisent la théorie de Trump

Il a par ailleurs été prouvé que la santé mentale n’était pas toujours en lien avec le passage à l’acte. En 2019, Jeffrey Swanson, professeur en psychiatrie, reconnaissait auprès de l’AFP que « massacrer un groupe d’inconnus n’est pas l’acte d’un esprit sain. Souvent les auteurs des fusillades sont des gens isolés, à la vie sociale complexe ». Mais il nuançait : la plupart n’ont pas « de maladie mentale grave identifiée, comme la schizophrénie ou une bipolarité qui empêchent le cerveau de raisonner ou de comprendre la réalité ».

De même, Susan B. Sorenson, professeure de politique sociale à l’université de Pennsylvanie, soulignait la même année auprès de Vice, un lien entre un certain état émotionnel et le passage à l’acte violent, mais pas avec une quelconque maladie mentale. « Nous savons que la violence par arme à feu peut se produire quand quelqu’un est impulsif, découragé et en colère. Mais ce sont toutes des émotions et conditions humaines. Ce n’est pas spécifique à quelqu’un souffrant d’un trouble diagnostiqué », explique-t-elle.

Une étude sur le profil des auteurs de fusillades dévoilée par le FBI en juin 2018 rejoignait cet avis et montrait que les tireurs souffrent de « facteurs de stress multiples » (au travail, en couple, des problèmes d’argent, dans la scolarité). Ce stress pouvant se manifester, par exemple, par une dépression ou des comportements violents. Mais trois quarts des auteurs de fusillades étudiés dans ces travaux ne souffraient d’aucune maladie mentale diagnostiquée. « Les déclarations selon lesquelles tous les tireurs sont simplement des malades mentaux prêtent à confusion et ne sont d’aucune aide », indiquait le FBI.

Argument politique avant la présidentielle

Malgré tout, cet argumentaire de Donald Trump est régulièrement repris par les Républicains pour ne pas se pencher sur l’épineuse question du marché des armes. Hillary Clinton avait d’ailleurs répondu à l’ex-président à ce sujet : « les gens ont des troubles mentaux dans tous les pays et les gens jouent aux jeux vidéo dans tous les pays. La différence, ce sont les armes à feu ».

Et alors que le débat tant attendu entre Kamala Harris et Donald Trump est prévu dans cinq jours, il n’est pas du tout dans l’intérêt du candidat républicain de se positionner sur un éventuel contrôle des armes à feu. Pas alors que la NRA, le tout-puissant lobby pro armes aux États-Unis, pèse très lourd en politique et peut jouer de son influence dans la présidentielle de novembre.

Absolument déterminé à défendre l’intégrité du deuxième amendement, le républicain avait revendiqué sa volonté de protéger le droit de porter des armes en nommant des juges fédéraux qui s’opposeront à de nouvelles restrictions sur les armes à feu s’il est élu en novembre. Une déclaration qu’il avait faite juste après avoir survécu in extremis à une tentative d’assassinat par arme à feu.

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