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François Fillon rouvre le débat à droite sur le FN

La suggestion de François Fillon de voter pour "le moins sectaire" des candidats en cas d'un duel entre le Parti socialiste et le Front national au second tour d'une élection municipale rouvre le débat à l'UMP sur le FN et suscite de vives réactions au PS. /Photo d'archives/REUTERS/Stéphane Mahé

PARIS (Reuters) - François Fillon a déclenché un tollé à gauche et suscité l'embarras à l'UMP en estimant dimanche qu'il faudrait voter pour "le moins sectaire" des candidats en cas de duel PS-Front national au second tour d'une élection municipale en 2014. Un autre ancien Premier ministre de droite, Alain Juppé, a pris ses distances avec cette déclaration dans une interview publiée lundi par le site internet de l'hebdomadaire L'Express. Pas question d'alliance avec le FN ni de "coup de pouce" au PS, déclare le député-maire UMP de Bordeaux. Mais "s'il y a un réel danger de victoire du FN, je ne mets (...) pas l'extrême-droite et le PS sur le même plan". L'ancienne ministre UMP Nathalie Kosciusko-Morizet, qui a toujours exclu de voter pour un candidat FN, est pour sa part apparue quelque peu embarrassée par les propos de François Fillon, candidat à l'investiture de la droite pour l'élection présidentielle de 2017, et la polémique qu'ils suscitent. "Je pense que les Français n'ont plus envie, nulle part (...) d'avoir des consignes de vote", a-t-elle dit sur iTélé, François Fillon avait livré une stratégie inédite pour les élections municipales de 2014, en cas de duel PS-FN, après avoir réitéré son "combat total contre l'extrême-droite" : "J'ai dit à mes amis à plusieurs reprises 'Votez pour le moins sectaire' parce que le maire d'une ville doit être capable de la rassembler. Un maire sectaire ne tient en général pas très très longtemps", a-t-il expliqué. À la question de savoir si un candidat socialiste pouvait être plus "sectaire" qu'un candidat FN, le député UMP de Paris a répondu : "Ça peut arriver, je ne dis pas que c'est toujours le cas, mais ça peut arriver". Pour le ministre socialiste de l'Education, François Fillon "a tort pour le pays, il a tort pour son mouvement politique". "On peut trouver toutes les raisons de se démettre d'un certain nombre de principes mais face à l'Histoire, on a toujours tort", a dit Vincent Peillon sur BFM TV et RMC Info. "À laisser entendre qu'il y aurait une équivalence entre le Front national, qui est un parti xénophobe, qui assume des valeurs qui sont souvent anti-républicaines, et le Parti socialiste, je pense que M. Fillon dérape", a-t-il conclu. Dans un communiqué, le premier secrétaire du PS, Harlem Désir, a accusé François Fillon de "créer un désistement antirépublicain inédit en faveur d'une force d'extrême-droite par pur cynisme électoral" et d'ouvrir ainsi la voie à des alliances locales entre l'UMP et le FN. Le porte-parole du PS, David Assouline, a estimé lors de son point de presse hebdomadaire que l'ancien Premier ministre UMP semblait "complètement perdre la boussole républicaine". "M. Fillon (...) a levé une digue supplémentaire (entre) la droite républicaine et celle, xénophobe, représentée par le FN." "AU CAS PAR CAS", DIT BORLOO Une ambiguïté que n'a pas levée le président centriste de l'UDI, Jean-Louis Borloo. Sur France Inter, ce dernier a jugé "plus facile" d'administrer une ville "avec des gens de gauche qu'avec le Front national". "Les souvenirs que nous avons des villes gérées par le Front national ne me font pas penser à une ouverture d'esprit", a-t-il dit. "Il faut regarder, honnêtement, au cas par cas. Une municipale n'est pas une élection aussi politisée que les autres", a-t-il cependant plaidé. Apparemment surpris par les propos de François Fillon, le président de l'UMP, Jean-François Copé, s'était borné dimanche à répéter la ligne officielle du "ni-ni" en cas de duel FN-PS à un scrutin (ni FN, ni front républicain). Le député UMP des Yvelines Henri Guaino, ancien conseiller spécial de Nicolas Sarkozy, a pour sa part dénoncé sur LCI et Radio Classique "une forme de mépris" à l'égard des électeurs. "Il faut arrêter de dire aux électeurs ce qu'ils ont à faire. Il faut respecter leur vote et en prendre acte. Il y a une forme de mépris à indiquer aux gens ce qu'il est bon de voter. J'y suis totalement opposé", a-t-il dit. La doctrine UMP du "ni-ni" a été arrêtée par l'ancien président Nicolas Sarkozy, avec Jean-François Copé, lors des élections cantonales de 2011, pour les cas où un candidat de gauche se retrouverait seul face à un candidat d'extrême-droite dans un scrutin. La stratégie fait débat au sein du parti, où des élus n'excluent pas une alliance avec le FN au niveau local. François Fillon, qui s'était dissocié de cette ligne dans un premier temps, s'y était finalement rallié en octobre 2012, lors du débat télévisé qui l'avait opposé à Jean-François Copé avant l'élection à la présidence de l'UMP. Il avait alors déclaré qu'il n'appellerait "jamais à voter pour le Parti socialiste" mais qu'il ne mettait pas le PS et le FN "sur le même plan". Le vice-président du FN, Florian Philippot, interrogé par BFM-TV, a quant à lui vu dans les derniers propos de François Fillon un symptôme de "panique". "Fillon est tellement paniqué par le poids grandissant, la dynamique grandissante du FN, qu'il est obligé de dire à peu près le contraire de ce qu'il disait il y a trois semaines", a-t-il dit. Sophie Louet, avec Emmanuel Jarry