France: Victoire judiciaire pour les accusatrices de Baupin

Les victimes présumées de l'ex-élu écologiste Denis Baupin, qu'elles accusent de harcèlement et d'agressions sexuels, ont remporté vendredi une victoire par défaut en obtenant la relaxe générale au terme d'un procès en diffamation devenu, par un retournement de situation, celui du plaignant. /Photo d'archives/REUTERS/Eric Gaillard

par Simon Carraud

PARIS (Reuters) - Les victimes présumées de l'ex-élu écologiste Denis Baupin, qu'elles accusent de harcèlement et d'agressions sexuels, ont remporté vendredi une victoire par défaut en obtenant la relaxe générale au terme d'un procès en diffamation devenu, par un retournement de situation, celui du plaignant.

Le tribunal correctionnel de Paris a également relaxé les journalistes de Mediapart et de France Inter qui ont révélé il y a trois ans cette affaire, signe avant-coureur de la déferlante #metoo soulevée par le scandale Weinstein en 2017-2018.

L'ancien vice-président de l'Assemblée nationale devra en outre verser au moins 500 euros de dommages et intérêts, pour procédure abusive, à la plupart des prévenus.

"Aujourd'hui, la justice a dit que les femmes étaient légitimes à parler et dit qu'elle protège les femmes qui parlent", a salué, après le délibéré, l'ex-conseillère régionale du Nord-Pas-de-Calais Sandrine Rousseau, l'une des femmes citées dans les articles de Mediapart et France Inter.

En ce sens, "c'est vraiment un procès historique et je pense que c'est une étape dans le respect des droits des femmes", a ajouté l'ancienne élue écologiste.

C'est aussi "la fin de trois ans de cauchemar" pour Elen Debost, élue au Mans (Sarthe).

La relaxe est conforme aux conclusions de la procureure qui avait souligné, en février, la bonne foi et le travail sérieux des journalistes. Des arguments repris à leur compte par les juges, pour qui le sujet était en outre d'intérêt général.

LE PROCÈS S'EST RETOURNÉ CONTRE LE PLAIGNANT

L'affaire Baupin a démarré en mai 2016 avec la parution du récit de huit femmes, dont quatre à visage découvert, qui ont toutes décrit des gestes assimilables à du harcèlement ou des agressions sexuelles, le tout commis par un homme bénéficiant alors d'une position de pouvoir au sein des Verts.

Les plaintes de certaines de ces femmes n'ont rien donné en raison notamment de la prescription des faits allégués. C'est donc Denis Baupin lui-même qui a lancé la machine judiciaire en ouvrant une procédure pour diffamation afin - de son point de vue - de laver son honneur.

Mais le procès s'est retourné contre le plaignant, absent à l'audience mais accablé, à distance, par les témoignages, dont celui de l'ex-ministre Cécile Duflot.

L'ancienne députée et ancienne dirigeante d'Europe écologie-Les Verts, aujourd'hui retirée de la vie politique, a raconté pour la première fois, à la barre, une scène d'agression dont elle aurait été la victime.

"Denis Baupin (...) réaffirme solennellement qu'il n'a jamais harcelé et encore moins agressé quiconque", a déclaré l'avocat de ce dernier, Me Emmanuel Pierrat. "Aucun élément de procédure ne permet de le renvoyer devant le tribunal."

Emmanuel Pierrat a également souligné le caractère "diffamatoire", noté dans le délibéré des juges, des articles parus en mai 2016.

Cette affaire avait jeté une lumière crue sur les agissements de certains responsables politiques à l'égard des femmes avant que l'affaire Weinstein, du nom d'un magnat d'Hollywood accusé par des dizaines de femmes, n'entraîne, l'année suivante, une libération inédite de la parole.

(Edité par Sophie LOuet)