François Bayrou devient Premier ministre et fait battre à Emmanuel Macron un record qui en dit long
POLITIQUE - Les lapins de Varenne. Emmanuel Macron a nommé François Bayrou Premier ministre ce vendredi 13 décembre, une semaine après le vote de la motion de censure à l’Assemblée nationale et la chute de Michel Barnier. Le centriste, président du MoDem, devient ainsi le quatrième locataire de Matignon en un an. Record battu.
Avec le barème de l’impôt, la loi spéciale censée être technique est devenue politique
En nommant son fidèle allié à Matignon, après une nouvelle période d’atermoiements et des hésitations de dernières minutes, le chef de l’État fait le choix de la continuité dans l’ouverture. Ou l’inverse. Le président de la République « l’a chargé de former un gouvernement », précise l’Élysée dans un communiqué très sobre. Une ligne et dix-neuf mots.
Charge donc à François Bayrou de trouver une voie de passage au Parlement et dans une Assemblée nationale tripartite. Avec plus de succès que Michel Barnier ? Son prédécesseur n’a tenu que trois mois, à peine, à son poste avant de courber l’échine face à l’offensive croisée de la gauche et de l’extrême droite. Une guirlande de Premiers ministres à l’obsolescence presque programmée qui dit beaucoup du second quinquennat (infernal) d’Emmanuel Macron.
Macron le consumériste
Le locataire de l’Élysée a effectivement commencé son année 2024, celle qui devait consacrer les « fiertés françaises » selon son expression, avec Élisabeth Borne à Matignon. Las, après un an et demi d’entente, l’adoption de textes majeurs sur les retraites ou l’immigration, le Président de la République l’a congédiée en janvier pour confier à Gabriel Attal, jeune loup politique, la tâche de diriger un gouvernement de combat en vue des élections européennes. On connaît la suite, et la tragédie en plusieurs actes.
Dépossédé de la carte cruciale du remaniement, le président de la République a ensuite fait le choix de dissoudre l’Assemblée nationale en réaction à la débâcle de son camp aux européennes. Depuis, rien ne va plus : la machine s’est grippée, le Palais Bourbon est fracturé en trois blocs incapables de s’entendre, et la France s’apprête à passer les fêtes sans budget voté en bonne et due forme.
Pourtant, Emmanuel Macron avait pris tout le temps possible pour trouver la personne idoine, capable d’éviter la censure à l’Assemblée nationale, et le champ d’honneur au premier soubresaut. Une question de « stabilité institutionnelle », selon l’un de ses mantras évoqués après la dissolution. Au total, le chef de l’État a mis neuf (longues) semaines pour désigner Michel Barnier. L’ancien négociateur du Brexit, lui, a tenu quatorze semaines à Matignon.
Mission impossible pour Bayrou ?
Plus éloquent, encore, l’indécision d’Emmanuel Macron a privé la France de gouvernement légitime pendant plus de 100 jours en 2024. Soit, si l’on cumule, un tiers de l’année en tout. Pire, une fois nommés, les Premiers ministres connaissent des aventures toujours plus courtes et difficiles. Le tout premier, Édouard Philippe, a réussi à prolonger son bail pendant 1100 jours, avant d’être remercié sur l’autel de sa popularité qui commençait à obscurcir celle du locataire de l’Élysée.
Jean Castex, Élisabeth Borne ont eux tenu environ 600 jours… Quand Gabriel Attal et Michel Barnier affichent une longévité bien moindre, avec respectivement 240 et 90 jours à la tête du gouvernement. Qu’en sera-t-il pour le nouvel élu ? À 73 ans, François Bayrou accepte une mission presque impossible. Le patron du MoDem, qui a permis la première élection d’Emmanuel Macron en le soutenant en 2017, doit essayer de trouver l’architecture stable qui a fait défaut à Michel Barnier à l’Assemblée nationale. Condition sine qua non pour durer plus de trois mois dans l’enfer de Matignon.
Pour cela, il doit convaincre la gauche (surtout socialiste) de ne pas appuyer tout de suite sur le bouton de la motion de censure, quitte à lui envoyer des signes sur la réforme des retraites ou la justice fiscale. De l’autre côté du spectre, il doit s’attacher à garder Les Républicains dans son escarcelle, ou, en tout cas, ne pas les braquer trop fort. En somme, faire le grand écart pour éviter la chute. Attention au claquage, surtout quand ils se répètent.
À voir également sur Le HuffPost :