Fini la censure, mais la Tunisie encore privée de livres en arabe (mis à jour)

Plus d'un mois après le départ de Ben Ali, l'appétit de changement ne faiblit pas en Tunisie. Y compris dans les librairies, où les clients peuvent désormais espérer se fournir en livres jusque-là interdits, pourvu qu'ils soient traduits ou distribués.

L'un des verrous à avoir immédiatement sauté avec la chute du président tunisien le 14 janvier est l'obligation de visa qui prévalait pour importer un livre.

= La liste des livres interdits à un libraire =
Libraire à Tunis, Faouzi Daldoul avait établi empiriquement une liste des ouvrages interdits de facto. (Télécharger la liste)

On y trouve aussi bien un ouvrage sur George W. Bush chez l'éditeur français Pocket que des titres sur le djihad et Tariq Ramadan, le très encyclopédique « Nouvel Etat du monde » à La Découverte ou… Le Guide bleu sur la Tunisie, chez Hachette.

Clairefontaine, sa librairie, fait le gros de son chiffre d'affaires avec des ouvrages francophones. Il s'est cependant heurté aussi à des refus (non motivés) pour des commandes en arabe. « Principalement des livres religieux », mais aussi deux titres polémiques, dont il existe une version arabe :

* « Notre ami le roi », de Gilles Perrault (sur Mohamed VI, le souverain marocain) ;
* « Feuilles de ma vie », de Nawal Saadaoui.

Faouzi Daldoul attend encore de pied ferme une livraison de « La Régente de Carthage », virulente charge des journalistes Nicolas Beau et Catherine Graciet contre le clan Ben Ali.

Disponible sur le Web, piraté et diffusé au format PDF, et clandestinement échangé sous le manteau du temps de Ben Ali, l'ouvrage est actuellement en réimpression.

Jamila Amar, à la librairie Al Kitab, qui a été livrée une semaine après le départ de l'autocrate, affirme en avoir écoulé plus de 700, à raison d'une grosse vingtaine par jour :

« Les gens regardent le journal de France 2. Ils savaient que ça existait, mais n'y avaient pas accès. Ils se sont précipités. »

= Le best-seller de la révolution n'existe pas en arabe =
Or le best-seller du moment n'existe pas en arabe. Cette scission linguistique est pourtant un enjeu dans la nouvelle Tunisie d'après Ben Ali. Le pays reste certes francophone, en particulier sa bande maritime, et les libraires de la capitale racontent que la clientèle la plus militante continue de réclamer les titres en français.

Mais l'absence de traduction pour un livre aussi ...