Fillette retrouvée morte dans les Vosges : y a-t-il eu des failles dans le suivi du suspect ?

Le corps d'une jeune fille de 5 ans a été retrouvé dans un sac mardi dans les Vosges. Un suspect, déjà mis en examen pour agression sexuelle et viol, a été interpellé et placé en garde à vue.

Le drame aurait-il pu être évité? Deux jours après le placement en garde à vue d'un jeune homme de 15 ans dans le cadre de l'enquête ouverte après la découverte du corps d'une fillette dans un appartement de Rambervillers, dans les Vosges, les questions se multiplient sur le profil du suspect. Déjà mis en examen en 2022 pour viol, agression sexuelle et séquestration, a-t-il fait l'objet d'un suivi suffisant?

Mis en examen dans une autre affaire

Sans casier judiciaire, l'adolescent actuellement en garde à vue n'est cependant pas inconnu des services de justice et de police. En 2022, il est mis en examen et placé sous contrôle judiciaire pour viol, agression sexuelle et séquestration sur mineurs.

Des faits graves qui lui valent d'être placé en centre éducatif fermé car, comme souvent chez les mineurs, la solution éducative est privilégiée au répressif. Dans cet établissement, il bénéficie d'un accompagnement scolaire en petit groupe en vue d'une réinsertion scolaire et professionnelle, selon le ministère de la Justice.

"Ce n'est pas une prison", souligne sur BFMTV Jean-Pierre Rosenczveig, ancien président du tribunal pour enfants de Bobigny, en Seine-Saint-Denis.

Il précise que le centre éducatif fermé impose une "fermeture théorique". "On peut sortir (...). Le centre est fermé au sens où, si on en sort sans autorisation, on peut être incarcéré", explique-t-il.

Un séjour en centre éducatif fermé

Une première expertise psychiatrique décèle une déficience mentale légère, un fonctionnement autocentré et une immaturité psychoaffective chez l'adolescent, selon nos informations. Le parquet indique de son côté qu'elle concluait à "l'absence de troubles mentaux".

Mais selon les premiers éléments, il ne semble pas y avoir eu de problème ou de dysfonctionnement pendant le séjour du suspect en centre éducatif fermé.

"Le fait que ce jeune ait été orienté vers un centre éducatif fermé voulait dire qu'il n'y avait pas matière en l'espèce, pour ceux qui ont apprécié la situation, à l'incarcérer ou à l'hospitaliser", estime Jean-Pierre Rosenczveig.

Des "gestes déplacés" remarqués par le voisinage

En février dernier, l'adolescent quitte le centre où il a passé un an, soit la durée maximale pour un mineur. Il est placé au domicile de ses parents à Rambervillers, là où il a grandi. Il est alors déscolarisé.

Placé sous contrôle judiciaire, comme c'est souvent le cas pour des mineurs, il bénéficie alors d'un suivi éducatif et psychiatrique. Comment se déroule son retour dans sa ville? Selon un membre de la famille du suspect, qui a témoigné de manière anonyme auprès de BFMTV, l'adolescent adoptait parfois un comportement étrange.

"Il a des troubles, il parle à son vélo. (...) Quand il sort tout seul, il fait des conneries", raconte-t-il.

Des "signes" qui n'ont pas été remontés?

Une voisine confie par ailleurs à notre micro que le jeune garçon avait récemment "accosté" plusieurs petites filles de son entourage. Un témoignage confirmé par le maire de la commune, qui parle de "gestes déplacés à caractère sexuel".

"Ce sont des signes qui auraient dû être remontés aux gens qui avaient vocation à l'encadrer", estime sur BFMTV Jacques Morel, général de gendarmerie et ancien patron de la section de recherche de Versailles.

"Apparemment, on n'en a pas tiré les conséquences qu'il aurait fallu peut-être en tirer", pointe également du doigt l'ancien président du tribunal pour enfants de Bobigny.

De fait, c'est l'une des interrogations de ce dossier: y a-t-il eu des signalements, des plaintes? "Là se posera la question de savoir s'il y a eu une défaillance sur le fait de peut-être révoquer le contrôle judiciaire (du suspect), de placer ce mineur en détention provisoire, alors que c'est pourtant une exception concernant les mineurs", explique Nathalie Bucquet, avocate pour l'association "Innocence en danger".

Par ailleurs, quelle était la place des parents auprès de leur fils? "Ce qui me surprend, c'est qu'on ne parle pas de l'accompagnement éducatif et parental. Il a été placé à domicile, mais ça veut dire quoi?", s'interroge Jean-Pierre Rosenczveig. Encore une question à laquelle l'enquête devra répondre.

"Difficile de tout prévoir"

Nombre de zones d'ombre subsistent dans cette affaire. "Si (le suspect) a fait un an (en centre éducatif fermé) et que tout se passait extrêmement bien, qu'un expert psychiatre a dit qu'il n'y avait plus de difficultés, c'est extrêmement difficile de tout prévoir", souligne Hector Lajouanie sur BFMTV, avocat pénaliste au barreau de Paris.

"Le risque zéro n'existe pas", rappelle-t-il.

Placé en garde à vue depuis mardi, le suspect pourrait être déféré et mis en examen ce jeudi par le juge d'instruction. Il pourrait ensuite soit être placé à nouveau dans un centre d'éducation fermé, soit être laissé libre sous contrôle judiciaire, soit être placé en détention provisoire. Une marche blanche est prévue en hommage à la petite fille samedi à Rambervillers.

Article original publié sur BFMTV.com

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