Dans la fièvre du Casablanca sous protectorat

Republié par la Manufacture de livres, «55 de fièvre» nous entraîne dans le Maroc des années 50, rongé par le racisme ordinaire.

Dès la deuxième page, on sait pourquoi ce roman noir nous a accroché l’œil. Pour des phrases comme celle-ci : «Tout le monde l’appelait Gin, comme l’alcool, mais elle s’appelait Ginette, ce qui était beaucoup moins enivrant.» Les pages qui suivent sont du même tonneau («Quand il se retourna, il était rouge comme un découvert à la banque»), on y retrouve toute la gouaille de Tito Topin, son humour au lance-flammes et son regard tendre mais sans indulgence pour ce Casablanca sous protectorat français où il est né un jour de février 1932. La fameuse Ginette, donc, ou plutôt Gin, a été violée par Georges, un sale type obsédé par les filles, incapable de comprendre qu’elles lui refusent ses avances. Il n’a qu’une chose pour lui : sa mère, médecin réputé de l’hôpital local et surtout maîtresse d’un des pontes de la police. Elle sait tout de ses travers et, réceptionnant Gin en piteux état dans son service, va faire courir le bruit que la jeune fille a été violée par un groupe d’Arabes vivant à proximité. Au risque de faire flamber Casablanca où, en ces jours d’été 1955, le protectorat français vit ses derniers moments : l’ambiance y est fiévreuse entre colons et colonisés, le racisme ordinaire se déchaîne, attisé par les peurs et les ambitions mesquines.

Hommage au pulp américain

Ce polar est le troisième roman de Tito Topin, publié une première fois en 1983 à la Série noire (Gallimard), six ans avant que cet auteur aux multiples talents ne crée le personnage de Navarro, qui deviendra le héros récurrent d’une série policière à succès. On sent au style que Topin ne s’est pas encore trouvé, les phrases sont chargées («la foule devenait suffocante, collante, gluante, une de ces foules où l’homme exhale la bête puante, dans la goutte de sueur qui gicle du pore dilaté comme le pus du furoncle, dans le mot poisseux qui jaillit de la bouche ouverte, dans (...)

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