« L'Enlèvement » : quand Marco Bellocchio s’en prend au pouvoir pontifical

Marco Bellocchio, 83 ans, plus en forme que jamais, est venu présenter « L'Enlèvement » en compétition au 76e Festival de Cannes.   - Credit:PATRICIA DE MELO MOREIRA / AFP
Marco Bellocchio, 83 ans, plus en forme que jamais, est venu présenter « L'Enlèvement » en compétition au 76e Festival de Cannes. - Credit:PATRICIA DE MELO MOREIRA / AFP

Il est en pleine forme, Marco Bellocchio. À 83 ans, l'œil plus malicieux que jamais et l'esprit déjà occupé par les multiples projets à venir, le réalisateur de Vincere (2009) n'a pas fini de nous surprendre. Un an seulement après la présentation sur la Croisette d'Esterno notte, son extraordinaire série sur l'enlèvement d'Aldo Moro (diffusée sur Arte), il était de retour en compétition avec un autre arrachement : cette fois, celui d'un enfant juif de six ans dans le Bologne du XIXe siècle. Avec L'Enlèvement qui s'appuie sur un fait divers, le réalisateur italien prend comme point de départ, comme souvent dans ses films, l'histoire intime, pour passer l'institution – ici, l'Église catholique et le pouvoir pontifical – au crible d'un regard décidément sans concession.

En 1858, à Bologne, Edgardo Mortara, un gamin de six ans issu d'une famille nombreuse juive, est arraché aux siens par l'Église catholique au motif qu'il aurait été baptisé à l'insu de ses parents. À l'époque, l'affaire fait beaucoup de bruit. Des caricatures du pape fleurissent dans la presse ; l'Amérique et Napoléon III réprouvent sévèrement. Le petit garçon, emmené à Rome auprès du pape, est converti de force, subit un endoctrinement à marche forcée, et finit par se laisser porter par la liturgie. Pendant ce temps, Pie IX, en proie à des cauchemars terribles, imagine des rabbins s'introduire dans sa chambre en pleine nuit pour le circoncire…

Il faut dire qu'il y a de quoi trembler. L'unificat [...] Lire la suite