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La Fed promet de ne pas toucher aux taux tant que l'inflation est faible

LA FED PROMET DE NE PAS TOUCHER AUX TAUX TANT QUE L'INFLATION EST FAIBLE

par Ann Saphir et Howard Schneider

WASHINGTON (Reuters) - La Réserve fédérale américaine a maintenu mercredi des taux d'intérêt quasi nuls et elle a promis de les maintenir au niveau actuel jusqu'à ce que l'inflation remonte "modérément" au-dessus de 2% pendant "un certain temps".

Cette évolution du discours de la banque centrale américaine correspond à la nouvelle stratégie esquissée le mois dernier, qui vise à compenser les périodes d'inflation faible en la laissant dépasser son objectif pour favoriser les créations d'emplois aussi longtemps que possible.

"Ce que nous disons dans les faits, c'est que les taux resteront très accommodants jusqu'à ce que l'économie ait largement entamé sa reprise", a dit son président, Jerome Powell, lors d'une conférence de presse.

"Cela devrait constituer une déclaration très puissante de soutien à l'activité économique" et favoriser un retour plus rapide à 2% d'inflation, a-t-il ajouté.

Il a expliqué que la reprise avait commencé mais qu'elle montrait des signes de ralentissement justifiant le maintien d'une politique de soutien, aussi bien monétaire que budgétaire.

Les décisions annoncées mercredi n'ont été validées que par huit voix contre deux, l'un des membres du Federal Open Market Committee (FOMC) jugeant qu'elles allaient trop loin et un autre qu'elles étaient insuffisantes.

Le communiqué de politique monétaire montre aussi un infléchissement du discours de la Fed de la stabilisation des marchés financiers vers le soutien à l'économie: la Fed explique ainsi qu'elle maintiendra ses achats d'obligations d'Etat au moins au rythme actuel de 120 milliards de dollars par mois afin d'assurer le maintien de conditions financières "accommodantes".

Wall Street a amplifié sa progression après ces annonces avant d'être rattrapée par la baisse des valeurs technologiques, tandis que les rendements des bons du Trésor montaient et que le dollar s'appréciait face aux autres grandes devises, ramenant l'euro sous le seuil de 1,18.

LE TAUX DE CHÔMAGE PRÉVU À 7,6% EN FIN D'ANNÉE

L'épidémie de coronavirus a continué de peser sur l'économie ces dernières semaines, constate la Fed, estimant que le virus "est la cause d'énormes difficultés humaines et économiques".

"La Réserve fédérale est déterminée à utiliser toute la gamme de ses outils pour soutenir l'économie américaine dans cette période difficile", poursuit-elle dans un communiqué.

L'objectif de taux d'intérêt des fonds fédéraux ("fed funds") reste fixé entre zéro et 0,25%, comme attendu par tous les économistes et analystes interrogés par Reuters avant la réunion.

La banque centrale prévoit désormais une contraction de 3,7% du produit intérieur brut (PIB) des Etats-Unis cette année, contre celle de 6,5% prévue en juin, et un taux de chômage à 7,6% fin 2020 contre 9,3% prévu il y a trois mois.

La majorité des membres du FOMC estiment que les taux d'intérêt ne bougeront pas avant au moins 2023 et que l'inflation n'atteindra jamais 2% au cours de cette période.

KAPLAN ET KASHKARI, DEUX VOIX DISCORDANTES

En s'engageant à maintenir des taux bas jusqu'à ce que l'inflation dépasse 2% afin de compenser les années durant elle aura été inférieure à cet objectif, la Fed met l'accent sur le soutien à l'emploi, comme annoncé le mois dernier au terme de la revue de sa stratégie entamée il y a deux ans.

"On a beaucoup plus de précisions que prévu sur l'éventualité d'une hausse de taux", a commenté Luke Tilley, chef économiste de Wilmington Trust.

"Il faut désormais deux conditions: atteindre le plein emploi et aussi atteindre 2% d'inflation. Ces deux éléments ont constitué des seuils quantitatifs à des moments différents en 2014, 2015, 2016 (...) mais maintenant, la politique officielle, c'est qu'ils doivent être atteints simultanément. Cela implique qu'il n'y aura pas de hausse de taux avant 2023, ce qui devrait profiter aux actifs risqués dans l'immédiat."

Les deux membres du FOMC en désaccord avec le communiqué de mercredi sont Robert Kaplan, le président de la Fed de Dallas, et Neel Kashkari, son homologue de Minneapolis.

Robert Kaplan a déclaré qu'il aurait préféré que la Fed s'assure "une plus grande flexibilité" une fois que l'inflation et l'emploi seront en passe d'atteindre les objectifs fixés, tandis que Neel Kashkari a souhaité un engagement à maintenir les taux jusqu'à ce que l'inflation de base, souvent plus faible que l'inflation globale, ait atteint 2% "de manière durable".

(Version français Marc Angrand)