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Face au protectionnisme, les grands groupes optent pour le lobbying

par Jeffrey Dastin et David Shepardson

SAN FRANCISCO/WASHINGTON (Reuters) - De grandes entreprises telles qu'Amazon, Toyota ou Alcoa réfléchissent aux moyens à mettre en oeuvre pour échapper aux conséquences de la politique commerciale de Donald Trump ou pour peser sur les décisions de son administration en la matière.

Bien qu'elles refusent toute confrontation directe avec le président des Etats-Unis, elles tiennent à exercer autant d'influence que possible pour le dissuader de dénoncer les accords commerciaux en vigueur ou d'instaurer de nouveaux droits de douane.

Amazon, la plus grande entreprise mondiale de vente en ligne et de "cloud computing" qui pourrait être lourdement pénalisée par ces droits de douane, envisage de lancer des campagnes publicitaires et de redoubler d'efforts dans le domaine du lobbying politique, a-t-on appris de source proche de ces réflexions. Interrogée sur le sujet, l'entreprise s'est refusée à tout commentaire.

Toyota Motor North America, qui craint que Donald Trump ne mette à exécution ses menaces de taxations des importations de voitures et de pièces détachées étrangères, a envoyé des salariés manifester cette semaine devant le Capitole, tandis que le patron de la filiale américaine du constructeur japonais s'entretenait avec des parlementaires.

Les dirigeants de General Motors ont également rencontré des membres de l'administration et du Congrès au cours de l'année écoulée pour leur faire part de leurs préoccupations. De nouveaux droits de douane, a averti fin juin le constructeur, réduiraient sa présence sur le marché intérieur comme à l'étranger.

Le plus grand constructeur automobile américain est sur le point d'embaucher Everett Eissenstat, ancien directeur adjoint du Conseil économique national et ex-conseiller de Trump pour les affaires économiques internationales, qui vient de quitter la Maison Blanche, selon des sources proches du dossier.

L'entreprise n'exclut pas cette possibilité, mais ne l'a pas confirmée. Everett Eissenstat n'a quant à lui pas pu être contacté.

"DISCUSSIONS ACTIVES"

Les entreprises qui patissent d'ores et déjà des droits de douane appliqués depuis juin à l'acier et à l'aluminium, plaident également pour un assouplissement de ces mesures.

Le PDG d'Alcoa a déclaré lors d'une conférence téléphonique avec des investisseurs que la compagnie était en "discussions actives" avec l'administration Trump, le département du Commerce et le Congrès pour obtenir la levée de ces droits ou, à défaut, une exception pour le Canada, son premier fournisseur.

La firme a estimé cette semaine à 14 millions de dollars le surcoût mensuel de la taxation des importations d'aluminium canadien.

Outre l'acier et l'aluminium, l'administration Trump a menacé d'instaurer des droits de douane de 10% à 200 milliards de dollars de produits chinois qui vont des meubles aux routeurs informatiques.

Amazon a fait l'inventaire des articles en question pour évaluer le coût de cette mesure, dit-on à Seattle. La firme redoute notamment une hausse des prix du matériel utilisé dans ses "data centers", qui risque de nuire à la compétitivité d'Amazon Web Services. L'unité de "cloud computing" est la plus rentable de l'entreprise.

"Je ne connais pas beaucoup d'entreprises qui puissent échapper aux risques liés aux droits de douane", commente quant à lui Dean Garfield, directeur général de l'Information Technology Industry Council, auquel appartiennent notamment Microsoft et Google.

Le lobbying politique peut être coûteux et n'offre aucune garantie de réussite, mais certains ont démontré son intérêt.

Donald Trump a ainsi promis au patron d'Apple Tim Cook que les iPhones assemblés en Chine seraient exonérés des droits de douane sur les produits chinois, a rapporté en juin le New York Times.

(Avec Nandita Bose, Jean-Philippe Lefief pour le service français)