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Face à la hausse des prix du carburant, quelles mesures possibles?

Face à la hausse continue des prix du carburant, le gouvernement est sommé d'agir. (Photo: Jon Nazca via Reuters)
Face à la hausse continue des prix du carburant, le gouvernement est sommé d'agir. (Photo: Jon Nazca via Reuters)

CARBURANTS - La hausse des prix du carburant n’en finit pas. Et trois mois après l’annonce d’une indemnité inflation exceptionnelle de 100 euros pour les Français gagnant moins de 2000 euros net par mois, ce chèque qu’ont reçu ou que vont recevoir les 38 millions de personnes concernées paraît bien insuffisant.

Mi-janvier, le prix du litre d’essence SP95 est passé à 1,72 euro, le litre de gazole 1,65 euro, soit des chiffres supérieurs à ceux ayant déclenché la crise des gilets jaunes en 2018. Le sujet est d’autant plus sensible que l’élection présidentielle aura lieu dans moins de trois mois. Jean Castex doit d’ailleurs s’entretenir ce mardi avec Bruno Le Maire pour envisager un nouveau geste à destination des automobilistes français. Celui-ci pourrait concerner le forfait kilométrique (voir sous le graphique).

Plusieurs potentielles solutions sont déjà évoquées par les candidats à l’élection présidentielle afin de donner un coup de pouce aux ménages. Le HuffPost fait un tour d’horizon de ces propositions, et précise les avantages et les inconvénients de chacune de ces mesures.

Le candidat d’extrême droite, Éric Zemmour, prône une intervention des entreprises. “Nous, urbains, nous avons nos titres de transport déjà payés à moitié par les employeurs. Mais il y a 8 millions de salariés français qui vont en voiture à leur travail. Je propose que leur tarif kilométrique soit payé à moitié par les patrons”, a-t-il déclaré sur BFMTV et RMC. Sa proposition est proche de celle de Valérie Pécresse, la candidate LR à la présidentielle. Elle indiquait en octobre dernier vouloir relever le barème kilométrique pris en charge par l’employeur.

Avantage de cette mesure, les automobilistes seront en partie remboursés de leurs dépenses en carburant. Relever le barème kilométrique est d’ailleurs l’option privilégiée par le ministère de l’Économie, selon Le Parisien. Concrètement, les automobilistes qui déclarent leurs frais réels liés aux déplacements professionnels lors de leur déclaration d’imposition obtiennent une baisse d’impôt.

Inconvénient, les effets ne sont pas immédiats pour les Français puisqu’il faut attendre la prochaine déclaration de revenu pour en bénéficier. De plus, et l’entourage du ministre de l’Économie Bruno Le Maire l’assume, cette mesure s’adresse à une “niche”: la mesure ne toucherait que les Français qui déclarent leurs revenus en suivant le régime des frais réels (au lieu de l’abattement de 10%), c’est-à-dire 2,5 millions de personnes, d’après BFMTV. Autre inconvénient, tous les salariés ne sont pas imposés, et seuls ceux payant des impôts sur le revenu auront une baisse d’impôt.

Par ailleurs, les patrons regrettent la version proposée par Valérie Pécresse et Éric Zemmour, dans laquelle ils sont mis à contribution. Cela augmenterait encore leurs charges alors qu’ils ne peuvent pas se le permettre, comme certains l’expliquent à RMC.

Le gouvernement n’a pour l’instant pas évoqué une participation des entreprises. Ce mardi matin, le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux a proposé de remplacer “l’aide aux transports versée par les entreprises aux intercommunalités”, le versement mobilité, par “une indemnité essence ou véhicule” d’environ “300 euros par salarié et par an”. Cette contribution est due par tous les employeurs comptant plus de 10 salariés et payée à l’Urssaf, qui la reverse ensuite aux autorités organisatrices de transports (AOT) locales pour financer les transports en commun.

Le candidat communiste à l’élection présidentielle Fabien Roussel veut lui que le prix de l’essence baisse de trente centimes, une mesure temporaire qu’il évalue à “15 milliards d’euros”. “L’État, lui, peut gagner plus d’argent quand les prix montent? Avec 60% de taxes sur le prix de l’essence, l’État gagne de l’argent. Il pourrait le donner aux Français”, estime le député du Nord. “Nous demandons, nous, la mise en place d’une taxe flottante le temps que le prix du baril baisse”, propose-t-il. La baisse des taxes est également l’option favorisée par la candidate du Rassemblement national Marine Le Pen et celle du Parti socialiste, Anne Hidalgo.

Avantage, les prix baissent à la pompe directement et l’effet est direct pour les automobilistes et leur porte-monnaie. Inconvénient, “quand vous baissez les taxes sur les prix du carburant, dans le fond vous financez les importations de pétrole venues des pays du Golfe”, a justifié Bruno Le Maire le 19 janvier sur BFMTV.

La Commission européenne a elle aussi évalué l’impact de la baisse des taxes “peu élevé pour le budget” des ménages. La mesure a revanche un coût énorme pour l’État: une baisse de dix centimes par litre représenterait cinq milliard d’euros de manque à gagner.

Dans le cadre d’une “loi d’urgence sociale”, Jean-Luc Mélenchon propose le blocage des prix des produits de première nécessité, dont l’essence. Comme lorsque le gouvernement a bloqué les pris des masques chirurgicaux et des gels hydroalcooliques pendant le Covid courant 2020, le leader Insoumis veut bloquer “le prix au niveau où il était avant le déclenchement la crise (...). Ça va faire perdre des sous aux fournisseurs, les taxes vont rester les mêmes. Appauvrissez les très riches, c’est-à-dire Monsieur Total.” Car, rappelle-t-il, “si vous baissez les taxes, vous payerez en impôt ce que vous aurez en impôt ce que vous aurez économisé à la pompe”.

Avantage, c’est une mesure simple dont les effets sont visibles dans l’immédiat pour les consommateurs à la pompe. Le blocage des prix est même prévu dans le code du commerce, en cas de situation exceptionnelle. Cette solution a été privilégiée en 1990 cinq semaines, lors de la guerre du Golfe qui a fait s’effondrer la production et s’envoler les prix du baril.

Inconvénient, pour l’industrie pétrolière cette idée “n’est pas réaliste”. “En ce moment, si les prix internationaux augmentent, c’est parce que le prix du pétrole brut augmente. Et ça, la France n’y peut rien, la France c’est 1 % de la demande pétrolière mondiale, donc elle ne pourra pas s’opposer à l’augmentation des prix”, a détaillé Olivier Gantois, président de l’Union Française des Industries Pétrolières (UFIP) à France télévisions. La différence entre la hausse des prix et le prix plancher devra être supporté par l’État.

De son côté, la Commission européenne par la voix du commissaire au Marché intérieur et à l’Industrie Thierry Breton s’est plutôt dite favorable à des “chèques spécifiques”, à l’image de la première indemnité inflation annoncée par Jean Castex en octobre, pour aider “directement ceux qui en ont le plus besoin”.

Avantage, ce chèque inflation pourrait s’adresser à de nombreux Français, comme l’a fait l’indemnité inflation. Le gain est net pour les ménages qui voient leur pouvoir d’achat augmenter sans contrepartie, dès réception de la somme.

Inconvénient, la mesure coûte cher, peut être longue à mettre en place (21,6 millions de Français attendant encore la première prime annoncée il y a trois mois) et ne cible pas que les automobilistes alors que la mesure doit en premier lieu viser les travailleurs utilisant leur voiture pour aller au travail. Par ailleurs, un proche du ministre de l’Économie a prévenu dans le Parisien: “On ne va pas refaire un nouveau chèque de 100 euros à 38 millions de Français, de l’étudiant au retraité, ça n’aurait aucun sens. L’indemnité inflation est d’ailleurs encore en cours de versement. L’objectif est cette fois-ci de cibler uniquement les travailleurs.”

À voir également sur Le HuffPost: À la pompe, “l’aumône” du chèque carburant convainc moyennement

Cet article a été initialement publié sur Le HuffPost et a été actualisé.

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