Explosion à Beyrouth : pourquoi la France et le Liban sont-ils si proches ?

Emmanuel Macron est le premier dirigeant étranger à s'être rendu au Liban après l'explosion qui a ravagé une grosse partie de Beyrouth.
Emmanuel Macron est le premier dirigeant étranger à s'être rendu au Liban après l'explosion qui a ravagé une grosse partie de Beyrouth.

Emmanuel Macron s’est rendu au chevet du Liban, après la double explosion qui a ravagé Beyrouth, mardi 4 août. Un empressement qui témoigne des relations fortes entre les deux pays, construites au fil des siècles.

Seulement quelques heures après la double explosion qui a frappé Beyrouth, mardi 4 août, Emmanuel Macron a exprimé sa solidarité avec le Liban, assurant le pays que la France se tenait à ses côtés, “toujours”. Mettant sur pause ses vacances à Brégançon, il est le premier chef d’État à s’être rendu sur les lieux du drame, ce jeudi 6 août. Il y a tenu un discours assurant qu’il souhaitait “organiser l’aide internationale” mais exhortant également le pays à entreprendre des réformes.

Des propos dénoncés par Jean-Luc Mélenchon comme de l’ingérence, mais qui montrent surtout à quel point les deux pays sont proches. Un lien qui remonte à plusieurs siècles et qui a commencé autour de la religion catholique.

La protection des catholiques

Dès le Ve siècle, les maronites - du nom de Saint Maron - se sont installés dans la région, principalement dans l’actuelle Syrie. Ces chrétiens catholiques orientaux se sont ensuite réfugiés dans les montagnes du Liban au Xe siècle, et ont combattu aux côtés des croisés pour la prise de Jérusalem, en 1099. Ce qui leur a valu la protection des rois de France.

En 1516, le Liban est conquis par l’empire Ottoman, comme le rappelle un rapport du Sénat. Quelques années plus tard, en 1536, François 1er signe un accord avec Soliman le Magnifique, qui permet à la France de protéger les chrétiens de la région. C’est encore autour de la communauté religieuse que les relations ont continué à se faire et se défaire : après le massacres de chrétiens dans la région par les Druzes, Napoléon décide d’envoyer des troupes françaises sur place en 1861, avec l’autorisation des alliés européens. Des liens culturels forts se sont tissés à cette époque, notamment avec la création de l’université française de Saint-Joseph en 1875.

Une indépendance difficile

C’est au début du siècle suivant que les liens entre les deux pays ont quitté le domaine religieux pour devenir purement politiques. Après la Première guerre mondiale, la Société des Nations a désigné la France comme pays mandataire de la Syrie, au cours de la conférence de San Remo en 1920. Très rapidement, l’État du Grand Liban est proclamé et le pays obtient son indépendance de la Syrie ainsi que ses frontières actuelles.

Si la France s’est, à l’époque, engagée à accompagner le Liban dans son développement économique afin de le préparer à l’indépendance, la situation se rapprochait en fait du “système colonial”, décrit Alex Issa, docteur en relations internationales, spécialiste du Moyen-Orient, dans le Huffington Post. D’ailleurs, le départ des Français ne s’est pas fait si facilement. Lorsque le gouvernement libanais déclare l’indépendance du pays en 1943, la France s’y oppose et “fait emprisonner tous les députés qui ont voté en sa faveur”, rappelle Alex Issa, dans le HuffingtonPost. Une révolte éclate alors dans le pays avant que la France ne finisse par accepter l’indépendance libanaise, le 22 novembre 1943.

Un épisode douloureux qui n’a pourtant pas affecté, à long terme, les relations entre le Liban et sa “tendre mère” française. C’est dans l’Hexagone que sont venus se réfugier des civils durant les difficiles années de guerre qu’a connu le pays entre 1975 et 1990. La diaspora est d’ailleurs importante également dans le sens inverse. La francophonie est très développée au pays du Cèdre : comme le précise RTL, plus d’1,6 million de personnes y parle la langue. C’est d’ailleurs un “impératif stratégique”, comme le précise France Diplomatie.

L’investissement d’Emmanuel Macron

Les liens entre les deux pays se sont par la suite renforcés grâce à deux hommes, devenus respectivement Premier ministre et président de la République de leur pays : Rafic Hariri et Jacques Chirac, amis avant même d’occuper ces rôles.

Si Nicolas Sarkozy et François Hollande avaient une relation moins marquée avec le Liban, Emmanuel Macron et son gouvernement ont réinvesti l’espace. Il a notamment aidé Saad Hariri, fils du Premier ministre et ayant lui-même occupé ce rôle, à quitter l’Arabie Saoudite pour lui offrir l’exil dans l’Hexagone. Comme le rappelle Le Parisien, face à la crise sociale et politique que connaissait le Liban avant le drame du 4 août, la France n’a pas vraiment pris de gants. “Aujourd'hui, il y a un risque d'effondrement. Il faut que les autorités libanaises se ressaisissent et je me permets de dire ici à nos amis libanais : vraiment, nous sommes prêts à vous aider, mais aidez-nous à vous aider, bon sang !”, avait sermonné le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves le Drian, au début du mois de juillet.

C’est dans ce même esprit qu’Emmanuel Macron a discuté avec une partie de la population libanaise, ce 6 août, promettant de revenir en septembre. D’ici là, il assuré qu’il allait “proposer un nouveau pacte politique” aux dirigeants du pays. “Et s’ils ne savent pas le tenir, je prendrais mes responsabilités avec vous”, a-t-il menacé. De quoi faire bondir Jean-Luc Mélenchon, qui rappelle que le Liban n’est pas “un protectorat”.

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