Publicité

Exclusion d'un instituteur aux méthodes "militaires": des parents racontent le calvaire de leurs enfants en CP

L'école de Saint Brévins-les-Pins en Loire-Atlantique. - Google Street View
L'école de Saint Brévins-les-Pins en Loire-Atlantique. - Google Street View

"Je ne veux plus aller à l'école, le maître est méchant". Un matin avant d'emmener son fils de 6 ans à l'école, Antoine* l'a découvert caché derrière les toilettes. Une réaction qui a suscité surprise et inquiétude chez ce père de famille, alors que son fils cadet n'avait jusqu'alors jamais montré le moindre signe d'anxiété liée à l'école. Mais le cas de son fils n'est pas isolé: plusieurs parents d'élèves ont donné l'alerte, accusant de "violences psychologiques" sur ses jeunes élèves de CP un instituteur de l'école François Dallet de Saint-Brévin-les Pins (Loire-Atlantique).

L'enseignant a été exclu de son établissement à l'issue d'"un conseil d'école extraordinaire" ce mardi, a-t-on appris des parents d'élèves. L'Académie de Nantes, contactée par BFMTV.com, n'a pas souhaité communiquer sur ce sujet. Mais plusieurs parents ont accepté de témoigner auprès de BFMTV.com et de raconter le calvaire vécu par leurs enfants pendant plusieurs semaines.

Un instituteur déjà sanctionné par le passé

Les faits remontent au 8 novembre dernier, lorsque la remplaçante chargée de cette classe de CP depuis le début de l'année a été remplacée du jour au lendemain par ce nouveau maître titulaire. Un instituteur "déjà sanctionné pour faute lourde" par le passé selon les parents d'élèves, et accusé de "maltraitances psychologiques" dans l'établissement où il avait exercé précédemment, en l'occurrence l'école Camille Corot de Corsept.

Depuis son arrivée à l'école de Saint-Brévin, le petit Frédéric* traînait des pieds avant de prendre le chemin de l'école, alors qu'il s'était lui aussi toujours rendu à l'école le sourire aux lèvres. "Frédéric est très scolaire, il adore l'école", rapporte sa mère à BFMTV.com, si ce n'est qu'il présente quelques difficultés pour articuler. Et il était loin d'être le seul à avoir changé de comportement en ce mois de novembre. Terreurs nocturnes, crises de larmes, maux de ventre, angoisses ou encore crise d'exczéma... La plupart de ses petits camarades étaient victimes de symptômes similaires.

Après quelques jours au contact de ce prof, les parents de Frédéric ont donc décidé de couper court et de ne plus l'envoyer en classe, comme beaucoup d'autres parents. Depuis une semaine, la moitié de cette classe de 24 élèves n'allait plus à l'école. Les parents dénonçaient les méthodes "violentes" et "militaires" de cet enseignant, capable de s'acharner sur des élèves en difficulté ou même de les insulter.

"C'est un personnage qui parle fort, qui est très dur avec les enfants: il n'hésite pas à les humilier et il a des comportements et des punitions inappropriés pour des élèves si jeunes", décrit le père de Frédéric.

Sur 24 élèves, ils sont une vingtaine à avoir rapporté des faits problématiques. La mère de Martin*, 6 ans, décrit elle aussi des techniques proches du harcèlement moral.

"Des méthodes mesquines et perverses"

"Il les grondait vraiment très fort, donc les enfants avaient peur de dire quoi que ce soit ou même de bouger dans la classe". Il lui arrivait même de "mettre en place des systèmes de récompense", ou de "leur mettre la pression pour qu'ils se dépêchent de ranger leurs affaires. Certains élèves ont aussi évoqué une chaise de la honte au fond de la classe".

"Un jour, mon fils m'a dit qu'il était 'nul' en rentrant de l'école", rapporte également la mère du garçonnet. "Quand je lui ai demandé pourquoi il me disait ça, il m'a répondu qu'on lui avait dit, et qu'en l'occurence le maître lui avait dit qu'il était nul en maths".

La mère de Martin redoute que ces comportements autoritaires provoquent des dégâts psychologiques sur les enfants, car "le CP est une année charnière. À cet âge-là, les enfants sont malléables à souhait, ils n'ont pas encore de libre-arbitre. C'est le moment où ils vont prendre confiance en eux pour l'avenir. On sait que ce genre de choses peut avoir des répercussions sur le long terme".

Ces méthodes "mesquines" et "perverses", Olivia s'en souvient bien. Il y a 10 ans, son fils en a lui aussi été victime pendant plusieurs mois, alors que ce même instituteur était venu effectuer un remplacement dans sa classe de CE1 à l'école de Pontchâteau. "Mon fils avait 8 ans à l'époque et il avait un handicap: il était dyspraxique, c'est-à-dire qu'il avait du mal à écrire. Or je me souviens qu'il lui faisait refaire systématiquement ses travaux, jusqu'à l'absurde, pour atteindre une perfection qui n'était pas atteignable pour un enfant avec un tel handicap".

Insultes, brimades et humiliations en séries

Olivia se rappelle des humiliations que se plaisait à faire subir ce professeur, qui prenait les enfants et même les parents de haut. "Ça lui arrivait d'insulter certains élèves de 'petits cons', et eux avaient interdiction de parler de ce qui se passait à l'intérieur de la salle de classe. Il allait jusqu'à leur rappeler à la grille à la sortie de l'école..."

Un jour, son fils lui avait notamment raconté qu'il n'avait par exemple pas le droit de se rendre aux toilettes tant qu'il n'avait pas réussi à prononcer correctement la phrase "Puis-je aller aux toilettes?". Or le petit garçon n'y arrivait pas en raison de ses difficultés de prononciation. "Il avait même décrêté que mon fils n'avait pas besoin des aides extérieures, son AVS avait par exemple ordre de ne plus venir et de ne plus entrer en contact avec nous", rapporte cette mère de famille, encore outrée dix ans après les faits.

Un camarade de son fils (qui aimait initialement bien l'école) avait même développé une phobie scolaire à cause de cette situation, selon Olivia. Chaque matin, il était pris de vomissements avant d'aller à l'école. "Mais à l'époque, nous étions trop peu à dénoncer ces faits pour que cela porte ses fruits". Il avait trouvé l'idée d'être nommé directeur d'une école à Prinquiau. Mais là aussi, ça s'est mal passé, comme partout où il est passé".

* Les prénoms ont été changés.

Article original publié sur BFMTV.com