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Examen psychiatrique pour un historien russe spécialisé dans les crimes de Staline

MOSCOU (Reuters) - Un historien russe, Youri Dmitriev, spécialisé dans l'étude des crimes du stalinisme, est poursuivi pour pédopornographie et va devoir subir cette semaine un nouvel examen psychiatrique, a déclaré mardi à Reuters son avocat, Viktor Anoufriev, qui craint une machination pour le déclarer fou.

Les travaux historiques de Dmitriev, 61 ans, ont suscité la colère de certains responsables russes. L'an dernier, le président Vladimir Poutine a dénoncé "la diabolisation excessive de Staline" par les ennemis de la Russie.

Le parquet général de Carélie, dans le nord-ouest de la Russie, accuse notamment Dmitriev d'avoir impliqué sa fille adoptive, alors âgée de 11 ans, dans des activités pédopornographiques, ce qu'il dément vigoureusement. S'il est reconnu coupable, il risque quinze ans de prison.

Plusieurs personnalités culturelles russes ont pris sa défense, affirmant qu'il était victime d'accusations montées de toutes pièces en raison de ses dénonciations des crimes de Staline.

Un précédent examen psychiatrique a reconnu Dmitriev sain d'esprit et un expert n'a rien vu de pornographique dans les neuf photographies de sa fille qui sont au centre de l'affaire, contredisant une précédente expertise demandée par le parquet.

Le 27 décembre, le tribunal a réclamé une troisième analyse de ces photos et a donné son accord pour que Dmitriev subisse une nouvelle expertise psychiatrique afin d'établir s'il est ou non un "déviant sexuel".

Le tribunal a cependant refusé son maintien en détention au-delà du 28 janvier, comme le demandait le parquet.

L'avocat Viktor Anoufriev a écrit à la cour suprême de Carélie pour faire annuler le nouvel examen psychiatrique qu'il juge "illégal" et qui pourrait durer plusieurs semaines. "Mon client a déjà subi un tel examen, les conclusions étaient bonnes, il n'a aucune déviance et le parquet n'a pas contesté ces résultats", a-t-il expliqué.

Youri Dmitriev a été conduit fin décembre à Moscou pour être examiné au centre Serbski, une clinique psychiatrique connue à l'époque soviétique pour fournir aux autorités des certificats d'internement concernant les dissidents.

"S'ils ne peuvent pas le condamner (pour pédopornographie), ils peuvent le déclarer fou. C'est une procédure tout à fait soviétique: enfermer les gens dans une clinique psychiatrique pour les faire taire", a dit son avocat.

(Andrew Osborn; Guy Kerivel pour le service français)