Européennes: Une semaine pour réveiller le débat, Macron en première ligne

Après des semaines d'apathie, la campagne pour les élections européennes a commencé à prendre en France, sur le terrain et dans les esprits, en attendant un sprint final décisif qu'Emmanuel Macron a intimé à son camp de remporter. /Photo prise le 14 mai 2019/REUTERS/Philippe Wojazer

par Elizabeth Pineau

PARIS (Reuters) - Après des semaines d'apathie, la campagne pour les élections européennes a commencé à prendre en France, sur le terrain et dans les esprits, en attendant un sprint final décisif qu'Emmanuel Macron a intimé à son camp de remporter.

A quelques jours du vote, aucun thème ne s'est vraiment dégagé dans les débats surtout dominés, côté opposition, par des attaques contre Emmanuel Macron, qui a personnalisé l'enjeu en se plaçant en première ligne face à l'extrême droite.

"Sur tout un tas de sujets, leur bilan est une catastrophe pour le pays et pour l'Europe", a encore déclaré le président vendredi lors d'un déplacement à Biarritz (Pyrénées-Atlantiques). "Mon devoir c'est, de là où je suis, de lutter contre cela parce qu'il n'y a pas de fatalité. L'Histoire nous jugera et elle jugera celles et ceux qui auront été faibles avec la montée des nationalismes, avec le retour des discours violents. Je ne veux pas être de ceux qui ne se seront pas battus contre cela".

Derrière le duo Rassemblement national-République en marche, une poignée d'outsiders espèrent encore faire mentir les sondages qui donnent les listes conduites par Jordan Bardella et Nathalie Loiseau en tête et au coude-à-coude, au dessus de 20% d'intentions de vote.

Plusieurs enquêtes récentes ont donné au camp de Marine Le Pen deux ou trois points d'avance sur celui d'Emmanuel Macron, laissant entrevoir la possibilité d'une victoire de l'ex-Front national, déjà en tête en 2014, sur l'actuelle majorité née il y a deux ans sur les cendres de partis traditionnels encore grandement convalescents.

Avec un score prédit autour de 14%, les Républicains de François-Xavier Bellamy feraient six points de moins qu'en 2014. Quant aux socialistes, alliés à Place publique, il risquent la disqualification si leur liste emmenée par l'essayiste Raphaël Glucksmann n'atteint pas la limite des 5% requise pour envoyer des élus à Strasbourg.

Entre les deux, La France insoumise de Manon Aubry et Europe Ecologie-Les Verts, emmenée par l'eurodéputé sortant Yannick Jadot, espèrent franchir la barre symbolique des 10% pour peser à Strasbourg et lors des prochaines échéances nationales.

Six mois pile après le début du mouvement de contestation des "Gilets jaunes" surgi des tréfonds du pays, Rassemblement national et France insoumise s'entendent pour qualifier le scrutin européen, premier test électoral de l'actuelle majorité, de "référendum anti-Macron".

"PLACER NOS MESSAGES JUSQU'AU BOUT"

"Le 26 mai, c'est l'occasion ou jamais de stopper la glissade sans fin. Nous pouvons mettre fin à la politique d'Emmanuel Macron par le vote", lançait Marine Le Pen jeudi soir à Fessenheim (Haut-Rhin), en écho au slogan du dernier tract du RN intitulé "Voter contre Macron".

Face au risque de vote sanction qu'aggraverait une abstention massive, le gouvernement se jette dans la bataille sur ordre d'Emmanuel Macron, qui a pris le risque de fixer l'objectif de faire un meilleur score que le Rassemblement national au soir du 26 mai.

"Si le RN finit premier, ça aura d'abord des conséquences au niveau européen : un président qui arrive au Conseil à Bruxelles sans avoir été capable de battre les extrémistes chez lui, il est affaibli", note un haut responsable de LaRem.

Même si Edouard Philippe a exclu jeudi sur franceinfo tout "virage" en matière de politique intérieure, le score de la liste LaRem-MoDem pèsera forcément sur la suite du quinquennat.

En reculant cette semaine sur l'impopulaire limitation de vitesse à 80 km/h après avoir revu le niveau de la CSG pour les retraités, la majorité se veut à l'écoute des colères du pays qui s'expriment dans les rues chaque samedi.

"Les choses vont se cristalliser au dernier moment. Il faut placer nos messages jusqu'au bout", affirme un responsable de la campagne à LaRem.

En plus de s'afficher en meeting, ministres et ténors de la majorité participeront dimanche au marathon "Douze heures pour choisir", dialogue avec les Français organisé sur les réseaux sociaux. Pendant ce temps, les militants colleront 60.000 affiches représentant Emmanuel Macron, seul et souriant, en soutien à la liste "Renaissance".

Le chef de l’Etat envisage selon l'Elysée de donner ces prochains jours une interview, sans doute à la presse quotidienne régionale.

La semaine prochaine sera celle des derniers meetings mais aussi des débats dont celui de l'Émission politique, jeudi sur France 2 et France Inter, qui verra six concurrents s'expliquer d'abord, puis neuf autres en deuxième partie de soirée. Une organisation "arbitraire" contestée par ces derniers, parmi lesquels Benoît Hamon (Génération.s), Jean-Christophe Lagarde (UDI) et Nicolas Dupont-Aignan (Debout la France).

Le 26 mai, les Français auront à choisir entre un nombre record de 34 listes. Celles du bas du tableau s'intéresseront à la limite des 3% donnant droit au remboursement des frais de campagne. Elle sera synonyme d'arrêt de mort pour certains des mouvements qui ne l'atteindront pas.

(Edité par Yves Clarisse)