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Eric Dupond-Moretti, ténor du barreau habitué des polémiques

Eric Dupond-Moretti pose pour l'AFP à Paris le 29 janvier 2015 - Joël SAGET © 2019 AFP
Eric Dupond-Moretti pose pour l'AFP à Paris le 29 janvier 2015 - Joël SAGET © 2019 AFP

C'est l'une des surprises du nouveau gouvernement: Eric Dupond-Moretti a été nommé ministre de la Justice ce lundi. Une décision qui fait déjà des vagues, alors que l'avocat connu pour son franc-parler et du grand public pour avoir participé à plusieurs dossiers très médiatisés, comme le procès de Patrick Balkany, est un habitué des polémiques.

• Il fait l’objet d’une enquête secrète du parquet national financier

Fin juin, l'avocat s'était ainsi emporté, avec sa verve habituelle, contre le parquet national financier, qui épuchait ses factures téléphoniques détaillées comme celles de plusieurs autres avocats, pour tenter d'identifier une "taupe" dans l'affaire dites des "écoutes".

Entre 2014 et 2019, le parquet national financier (PNF) a en effet mené des investigations dans le plus grand secret pour tenter d'identifier une taupe éventuelle qui aurait informé Nicolas Sarkozy et son avocat, Me Thierry Herzog, qu'ils étaient sur écoute. Le PNF a donc étudié les factures téléphoniques détaillées d'une dizaine de ténors du barreau, dont Me Dupond-Moretti. Il a fallu presque six ans pour que cette procédure, sans résultat, soit classée sans suite fin 2019.

"Une enquête de barbouzes!", s'était-il exclamé, évoquant des relations entre magistrats et avocats "devenues délétères". Il avait annoncé porter plainte pour violation de secret professionnel, violation de correspondances et atteinte à la vie privée. Ce lundi soir, il a cependant annoncé avoir retiré sa plainte, selon France Info.

Il avait appelé, dans un entretien au Parisien, à des "Etats généraux de la justice" pour revoir tout le système judiciaire "de A à Z".

"Il faut qu'on sépare le siège du parquet. Pour moi, c'est impératif. Je fais le ménage la dedans de façon très très très claire", expliquait le ténor de 59 ans sur LCI. Et de poursuivre: "Je fais un système de responsabilité des juges, parce que les juges ne sont pas responsables de ce qu'ils font aujourd'hui. Ce sont les seuls dans notre société à ne pas être responsables".

• Pour la suppression de l'école nationale de la magistrature

Dans cette même interview, il avait réitéré son souhait de supprimer l'école nationale de la magistrature pour créer "une Ecole nationale de justice qui soit commune aux avocats et magistrats". Une proposition qui avait provoqué la colère des magistrats, déjà vent debout contre l'avocat.

"Nommer une personnalité aussi clivante et qui méprise à ce point les magistrats, c'est une déclaration de guerre à la magistrature", a réagi Céline Parisot, présidente de l'Union syndicale des magistrats ce lundi. "Il semble détester les magistrats, qu'il ne se prive pas d'insulter régulièrement, il souhaite la suppression de l'Ecole nationale de la magistrature (ENM), la scission du corps (siège/parquet), soit tout l'inverse de ce que porte l'USM", a-t-elle vilipendé.

• Favorable au rapatriement des djihadistes français

Outre ses détracteurs dans ses rangs, Eric Dupond-Moretti est aussi régulièrement critiqué pour ses positions clivantes. Lui qui s'est illustré dans la défense du frère de Mohamed Merah, Abdelaker, s'est notamment exprimé en 2019, sur LCI, en faveur du rapatriement des djihadistes français.

"Ils sont Français et si on peut éviter que des ressortissants Français soient condamnés à mort par une justice, alors, il faut qu'on s'en donne les moyens."

• Il s'est prononcé pour l'interdiction du Rassemblement national en 2015

A l'extrême-droite aussi, la nomination Eric Dupond-Moretti est vivement critiquée. Sur Twitter, Marine Le Pen, présidente du Rassemblement national, regrette "la nomination d'un militant d'extrême gauche" qui "souhaite l'interdiction du RN".

Marine Le Pen fait référence à un entretien accordé par Eric Dupond-Moretti à France Inter en 2015, où il jugeait que "le FN (n'était) pas un parti républicain" et appelait à "l'interdire".

• Des propos polémiques sur les violences faites aux femmes

L'avocat a aussi tenu, à plusieurs reprises, des propos polémiques sur la question des violences faites aux femmes. En 2018, dans la lignée de la création d'une infraction pour outrage sexiste, ce dernier avait regretté sur notre antenne "une hyper-réglementation de la société".

"Ca tient à l'éducation de chacun, et au fond, est-ce que l'Etat doit réglementer ça? C'est ça l'hyper-réglementation. Est-ce que l'Etat a vocation à réglementer tous les comportements? Moi je ne le crois pas", avait-t-il estimé. "Il ne suffit pas d'accuser pour que ça fonctionne", avait-il poursuivi. Avant d'ajouter: "Il ne suffit pas que la plaignante livre sa parole pour que sa parole soit sacralisée par la justice. La justice a quand même un examen à mener, de crédibilité, celui qui est accusé a aussi son mot à dire, sinon c'est trop simple".

"Il y a une très vieille dame qui m'a dit 'Moi, je regrette de ne pas être sifflée'", avait-il ajouté lors de cette interview, sur BFMTV.

Alors qu'il défendait l'ex-secrétaire d'Etat Georges Tron, poursuivi pour viols et agressions sexuelles en réunion, Eric Dupond-Moretti avait par ailleurs tenus des propos largement décriés sur l'une des victimes: "À 30 ans, on n'est pas une potiche incapable de dire non à un homme qui vous prend le pied", avait-il lancé pendant le procès.

Il avait alors interpellé l'Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT) leur déclarant: "C'est bien que la parole des femmes se libère, mais vous préparez un curieux mode de vie aux générations futures".

Article original publié sur BFMTV.com