Le président turc hausse le ton sur la Syrie

ANKARA (Reuters) - Recep Tayyip Erdogan a prévenu jeudi que la patience d'Ankara à propos du conflit syrien avait des limites et a prié les Nations unies d'agir pour prévenir ce qu'il a qualifié de "nettoyage ethnique" chez son voisin. Le président turc a en outre accusé l'Onu de faire preuve d'hypocrisie en demandant à la Turquie d'accueillir les réfugiés sur son territoire alors qu'elle ne fait rien, selon lui, pour arrêter les violences qui les font fuir de Syrie. Recep Tayyip Erdogan, qui s'exprimait lors d'une conférence économique, a indiqué que son pays devait se préparer à l'arrivée d'une nouvelle vague de 600.000 civils syriens si l'offensive des forces gouvernementales syriennes et de leurs alliés, appuyée par les bombardements aériens russes, devait se poursuivre dans la province d'Alep. "Nous serons patients jusqu'à un certain point mais ensuite nous devrons agir. Nos autocars et nos avions n'attendront pas en vain", a déclaré Recep Tayyip Erdogan. Le président turc a dit avoir reçu des informations alarmantes sur des "massacres impitoyables" auxquels se livreraient les forces syriennes soutenues par l'Iran qui combattent aux côtés des forces de Bachar al Assad. Lors de son discours retransmis à la télévision d'Etat, Recep Tayyip Erdogan a une nouvelle fois réclamé la mise en place d'une zone d'exclusion aérienne dans le nord de la Syrie pour permettre aux civils d'y vivre en sécurité. "Il faut trouver les moyens pour que les Syriens restent dans leur pays", a-t-il insisté. ERDOGAN CONFIRME AVOIR MENACÉ L'UE La Turquie, qui accueille déjà plus de 2,6 millions de réfugiés syriens, demande depuis longtemps la création d'une zone de sécurité dans le nord de la Syrie qui aurait pour but de protéger les civils déplacés tout en les laissant du côté syrien de la frontière. Les Etats-Unis et l'Otan font la sourde oreille face à cette proposition. Ils estiment qu'une telle zone nécessiterait la création d'une zone d'exclusion aérienne sous contrôle international, ce qui serait susceptible de les mettre directement en conflit avec le présidnet syrien, Bachar al Assad, et ses alliés. Recep Tayyip Erdogan a demandé à l'Onu d'agir davantage pour empêcher le "nettoyage ethnique" qui serait à l'oeuvre dans cette région, où vit notamment une minorité turkmène proche d'Ankara. Son Premier ministre, Ahmet Davutoglu, avait employé le même terme mercredi. Le président turc a confirmé avoir dit au président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, et au président du Conseil européen, Donald Tusk, que le temps allait arriver où la Turquie ouvrirait ses frontières et enverrait ses migrants vers l'Europe. "Par le passé, nous avons arrêté les gens aux portes de l'Europe, à Erdine, nous avons arrêté leurs cars. Cela peut se produire une fois ou deux et ensuite nous ouvrirons les portes et leurs souhaiterons bon voyage, c'est ce que j'ai dit", a déclaré Recep Tayyip Erdogan. La Turquie a conclu en novembre dernier un accord avec l'Union européenne pour réduire le flux des réfugiés qui partent vers l'Europe. (Daren Butler, Ece Toksabay et Asli Kandemir, Tangi Salaün et Danielle Rouquié pour le service français)