Épidémie de rougeole : la peur des vaccins est-elle en cause ?

Environ 2400 cas de rougeole ont été détectés depuis le début de l'année en France. Plusieurs explications entrent en jeu. Il existe une méfiance à l'encontre des vaccins. D'autre part, beaucoup d'adultes n'ont jamais eu de rappel, ce qui rend le remède moins efficace.
Environ 2400 cas de rougeole ont été détectés depuis le début de l'année en France. Plusieurs explications entrent en jeu. Il existe une méfiance à l'encontre des vaccins. D'autre part, beaucoup d'adultes n'ont jamais eu de rappel, ce qui rend le remède moins efficace.

En France, la transmission de la rougeole est toujours au stade épidémique, selon l’OMS. Plus de 2 000 cas ont été recensés depuis janvier. L’explication réside-t-elle dans la méfiance envers les vaccins ?

L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) s’inquiète. Dans un rapport dévoilé le 29 août dernier, elle regrette que l’Europe perde “du terrain dans la bataille contre la rougeole”. Dans le monde, 142 000 personnes sont mortes de la rougeole en 2108. Soit une hausse de 15% par rapport à l’année précédente. En France, cette maladie extrêmement contagieuse - et dans certains cas mortelle - n’a jamais été éradiquée. Dans l’Hexagone comme dans dix autres pays, la transmission est qualifiée d’“épidémique” par l’OMS.

Sur le territoire français, 2 400 cas ont été recensés depuis le début de l’année 2019, dont deux ont été mortels. “Dans 9 cas sur 10, la maladie se développe chez des sujets non vaccinés”, nous précise Daniel Levy-Bruhl, responsable de l’unité vaccination de Santé publique France.

Pour Jean-Paul Hamon, président de la Fédération des médecins de France, ces chiffres s’expliquent de deux façons. Avant tout parce que le vaccin contre la rougeole n’est répandu que depuis quelques décennies. Une partie de la population n’a donc jamais été vaccinée ou alors elle n’a pas eu de rappel. “Or, depuis 20-30 ans, on sait qu’une deuxième piqûre est nécessaire pour une réelle efficacité”, nous précise le médecin. D’autres ne peuvent tout simplement pas recevoir le vaccin à cause de problèmes de santé.

Une méfiance historique

L’autre explication réside dans la méfiance envers les vaccins. Et elle ne date pas d’hier. Pour Caroline Faillet, dirigeante du cabinet de conseil Bolero et auteure de “Décoder l’info : comment décrypter les fake news ?”, tout remonte à 1998, lorsqu’une rumeur a affirmé que le vaccin contre la rougeole pouvait être responsable de l’autisme. Une étude a même été publiée dans The Lancet, avant que des recherches ne démentent un quelconque lien entre vaccination et autisme. Internet, puis les réseaux sociaux, ont ensuite offert un beau terrain d’expression pour les anti-vaccins, nous explique Caroline Faillet.

Leurs arguments fonctionnent, car ils ont trouvé un terreau fertile dans la mémoire collective. “Il y a eu différents scandales sanitaires : H1N1, les adjuvants d’aluminium dans les vaccins, la collusion connue entre le monde économique et scientifique, le poids des lobbys pharmaceutiques”, énumère la dirigeante du cabinet de conseil. De quoi faciliter la propagation de fake news.

Il existe aussi la fausse perception selon laquelle la rougeole est une maladie bénigne”, complète Daniel Levy-Bruhl. “Le plus souvent, ça l’est, mais il peut y avoir des complications”.

La scepticisme en hausse ?

Selon Jacques Bessin, président de l’Union nationale des associations citoyennes de santé, qui se décrit comme partisan de la liberté vaccinale, le nombre de réfractaires aux vaccins augmente drastiquement depuis quelques années. Notamment depuis la loi du 1er janvier 2018 qui impose 11 vaccins au lieu des 3 obligatoires jusqu’ici. Pour lui, “plus on force les gens, plus on lève les suspicions”. Un avis partagé par Jean-Pierre Eudier, président de la ligue nationale pour la liberté des vaccinations. “La défiance est ancienne mais elle progresse”, confirme-t-il. Selon un sondage publié le 18 juin dernier, la France est le pays le plus sceptique face à la vaccination.

Une progression que le Dr Jean-Paul Hamon affirme ne pas retrouver dans les cabinets médicaux. “On en parle peut-être plus, mais le nombre n’augmente pas. Il n’y a que peu de résistance aux vaccins chez nos patients”. Le médecin Daniel Levy-Bruhl abonde dans ce sens. “On suit ça avec des enquêtes, et il y a toujours environ 10% des parents qui ne vaccinent pas leurs enfants”.

Il concède, en revanche, que beaucoup de personnes sont dans le doute. “Ce ne sont pas foncièrement des anti-vaccins. Mais ils ont peur, donc ils préfèrent s’abstenir”, commente le membre de Santé publique France.

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