Énorme : et si on arrêtait de juger les films avant de les avoir vus ?

© Memento Films Distribution
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Depuis quelques jours, le film Énorme est au centre d'une polémique. Le film mise en scène par Sophie Letourneur, avec Marine Foïs et Jonathan Cohen, a été accusé de banaliser les grossesses imposées aux femmes et le délit d'entrave à l'IVG, d'en faire un sujet humoristique. Des critiques faites avant même la sortie du long-métrage, et qui font débat : peut-on juger du contenu d'une oeuvre sans même l'avoir vue ?

Énorme, c'est la nouvelle comédie sortie au cinéma mercredi 2 septembre. Réalisée par Sophie Letourneur, elle met en scène Marina Foïs dans la peau d'une femme qui ne veut pas d'enfant, et Jonathan Cohen dans le rôle de son compagnon, qui ne rêve que d'une chose : devenir papa. Pour arriver à ses fins, ce dernier décide d'imposer une grossesse à la femme qu'il aime en remplaçant sa pilule contraceptive par des sucrettes, et en l'empêchant de se faire avorter. Une attitude immorale, illégale qui plus est, pour un pitch qui ne plaît pas du tout aux internautes. Sans même avoir vu le film, ils estiment qu'il s'agit là d'un sujet qui ne devrait pas être évoqué dans une comédie.

Rire du sexisme, ce n'est pas facile

En théorie, dans un monde parfait, on aimerait évidemment pouvoir rire de tout. Mais certains sujets restent encore plus sensibles que d'autres, et les violences faites aux femmes en font partie. Il est important de le rappeler : imposer une grossesse et un accouchement à une femme est non-seulement illégal, mais également dangereux. Et à une époque où, à travers le monde, les féminicides, le harcèlement sexuel, les mutilations génitales, les violences conjugales et toutes ces formes d'attaques sexistes à l'encontre des femmes sont toujours aussi violentes, les inquiétudes des internautes au sujet du film sont parfaitement légitimes.

Toutefois, il faut parfois aller plus loin qu'une première impression. En l’occurrence, une scène du film – d'ailleurs diffusée sur Twitter par Jonathan Cohen lui-même (et qui a depuis été supprimée de la plateforme) – prouve qu'Énorme aborde bel et bien la question de l'illégalité et de l'immoralité des actes du personnage incarné par Jonathan Cohen, qui impose cette grossesse à sa femme. Le délit d'entrave à l'IVG est donc évoqué, ce qui rappelle que même à travers un film en apparence léger et humoristique, il est toujours possible de faire passer des messages importants. Et ce, via des œuvres qui ont le potentiel d'attirer de nombreuses personnes en salles.

Le boycott à tout va, nouvel ordre des choses ?

Énorme n'est pas le premier long-métrage à être victime d'un appel au boycott, alors même que les internautes qui le dénigrent n'ont pas pu le voir. Récemment, c'est la plateforme Netflix qui a subi ce désagrément. En cause : le film égyptien Sheikh Jackson, qui a généré une vive polémique. Sorti en 2017, il a connu un véritable succès critique, et même été pré-sélectionné pour l'Oscar du Meilleur film étranger cette année-là, même s'il n'a finalement pas été nominé. Il raconte l'histoire d'un imam très pieux, dont la vie et les croyances sont bousculées le jour de la mort de son idole, Michael Jackson. Il y a notamment une scène de prière au sein d'une mosquée, durant laquelle les fidèles se mettent à danser comme le roi de la pop. Une séquence qui a fortement déplu à certains membres de la communauté musulmane. Hors, le long-métrage a été victime d'un appel au boycott dans des pays... Où il n'était même pas diffusé. La conséquence d'un effet de masse qu'il n'est pas toujours bon de suivre.

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