Enfants issus de dons de gamètes: la recherche des origines progresse

Paillettes contenant chacune un embryon humain, stockées à -196· dans des cuves d'azote liquide, au CECOS (Centre d'étude et de conservation du sperme humain) à Rennes, photos du 30 novembre 2000 (MARCEL MOCHET)
Paillettes contenant chacune un embryon humain, stockées à -196· dans des cuves d'azote liquide, au CECOS (Centre d'étude et de conservation du sperme humain) à Rennes, photos du 30 novembre 2000 (MARCEL MOCHET)

Le dispositif permettant aux personnes nées d'un don de gamètes de rechercher leurs origines progresse: 42 personnes ont pu retrouver leur géniteur, contre trois l'an dernier, selon un rapport publié vendredi.

Entre le début de ses travaux en septembre 2022 et le 31 août 2024, la nouvelle Commission d'accès des personnes nées d'une assistance médicale à la procréation aux données des tiers donneurs (Capadd) a envoyé 398 réponses aux demandeurs.

Dans la moitié des cas (185), elle a pu identifier le donneur de sperme ou la donneuse d'ovocytes.

Toutefois, 45 demandeurs seulement ont pu in fine recevoir une lettre leur révélant ce qu'ils voulaient: l'identité ou des données identifiantes de leur géniteur.

Car 58 donneurs sont décédés -ce qui met fin à la procédure-, 43 ont refusé de dévoiler leur identité et 36 n'ont pas répondu à la commission. En outre, dans trois cas, le donneur avait consenti mais a changé d'avis ou n'a pas terminé les démarches.

Pauline, qui n'a pas souhaité donner son nom de famille, a reçu un courrier l'informant que son donneur n'a pas répondu. "J'ai ressenti de la déception après tant d'attente, de la tristesse, un peu de colère aussi", explique à l'AFP cette orthophoniste de 32 ans.

"Il me manque cette pièce de puzzle de mon identité. Les médecins me demandent mes antécédents médicaux et je ne peux pas leur répondre."

- Fiche bristol -

A la Commission, on souligne les progrès pour identifier les donneurs, un travail d'enquêteur minutieux mené dans les Cecos, communément appelés "banque de sperme".

"Les équipes sont mieux rodées, savent davantage exploiter les archives", indique à l'AFP Samuel Aparisi, président suppléant de la Capadd.

"La moyenne d'âge des demandeurs est de 34 ans, les centres de dons doivent rechercher dans des archives d'une quarantaine d'années, dans des hôpitaux qui peuvent avoir déménagé", note M. Aparisi.

"Il s'agit bien souvent de fouiller dans des fiches papiers, où le donneur est parfois identifié par un numéro, qu'il faut relier au couple receveur, dont la fiche bristol est rangée ailleurs", explique le magistrat.

Après des décennies où prévalait le principe de l'anonymat du donneur, la recherche du géniteur a été rendue possible par la loi de bioéthique de 2021.

"Le désir de transparence actuelle rompt avec 50 ans de culture du secret. On fouille dans les archives de services qui avaient pour obsession qu'on ne crée jamais de lien entre le donneur et la personne née du don", souligne M. Aparisi.

- Tisser un "récit" -

Si le donneur est identifié, la commission le contacte et lui demande s'il consent à communiquer ses informations. Si oui, elles sont ajoutées à un registre géré par l'Agence de biomédecine puis communiquées à la personne (devenue adulte) née du don de gamètes.

"C'était anonyme et je veux rester anonyme, même si je comprends l'importance pour la personne qui en fait la demande", dit un donneur cité dans le rapport. "Si je savais que cette personne va mal et que je peux l'aider en levant l'anonymat, je le ferai", dit un autre.

"Les demandeurs savent qu'une troisième personne est intervenue dans leur conception et ont besoin de mettre un visage sur elle, connaître ses motivations. Cela tisse un récit avec plus d'humanité autour de la PMA (procréation médicalement assistée, NDLR) qui est technique", explique Valérie Benoît, psychologue qui intervient à la Capadd.

L'association PMAnonymes, qui représente à la Capadd les personnes nées de dons, se réjouit de la montée en puissance du dispositif après une première année de rodage.

"Nous regrettons toutefois qu'en cas du décès du donneur, la personne n'ait pas accès à des informations sur son géniteur", explique son président Timothée Marteau.

La Capadd demande de pouvoir interroger aussi les médecins libéraux qui procédaient à des PMA, ainsi que ceux qui détiennent leurs archives, ce que la loi ne le lui permet pas.

Elle recommande aussi de sensibiliser les parents ayant eu recours à une PMA à la possibilité pour leur enfant de rechercher leur géniteur. Alors qu'on estime à 50.000 le nombre d'adultes nés d'un don, seuls 632 ont jusqu'ici saisi la commission.

cac/spe/de