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Percée de Podemos aux législatives en Espagne

par Julien Toyer et Emma Pinedo MADRID (Reuters) - Le Parti populaire (PP, droite) de Mariano Rajoy est arrivé en tête des élections législatives de dimanche en Espagne, mais le principal bénéficiaire du scrutin est l'alliance anti-austérité Unidos Podemos, qui a ravi la deuxième place au Parti socialiste (PSOE), selon des sondages à la sortie des urnes. Les électeurs espagnols étaient appelés aux urnes pour la deuxième fois en six mois après qu'une précédente élection, le 20 décembre, n'a pu aboutir à la formation d'une coalition gouvernementale, les partis traditionnels, PP et PSOE, ayant subi l'émergence de Podemos et des centristes de Ciudadanos. Comme attendu après six mois de tractations infructueuses et par une belle journée estivale, la participation a été moins élevée qu'en décembre, ce qui a surtout profité à l'alliance constituée par Podemos avec l'ex-Parti communiste, désormais en position de force pour tenter de constituer une coalition de gauche, selon un sondage à la sortie des urnes de la chaîne de télévision publique TVE. S'il est à nouveau arrivé en première position, le PP du président du gouvernement sortant, Mariano Rajoy, échouerait en effet une nouvelle fois loin de la majorité absolue, fixée à 176 sièges aux Cortes, avec 117 à 121 élus, contre 123 à l'issue du scrutin de décembre. Le PP ne peut de surcroît pas espérer un appui déterminant des centristes de Ciudadanos ("Citoyens"), qui n'obtiendraient qu'entre 26 et 30 sièges. A l'inverse, le bloc Unidos Podemos ("Ensemble nous pouvons") fait figure de grand vainqueur, ce qui serait un nouveau coup porté aux partis traditionnels européens, déjà ébranlés par le choix des Britanniques de quitter l'Union européenne. LES SOCIALISTES À L'HEURE DU CHOIX Le mouvement d'extrême gauche est crédité par les sondages à la sortie des urnes de 91 à 95 élus, suffisamment pour inverser le rapport de force avec son grand rival de gauche, le Parti socialiste, qui n'obtiendrait que 81 à 85 sièges. Ensemble, ou avec l'appui symbolique de petites formations régionales, les deux partis pourraient atteindre la majorité absolue, mais rien n'indique qu'ils réussiront à s'entendre pour former une coalition, leurs précédentes tractations, menées à l'initiative des socialistes qui avaient à l'époque davantage d'élus, ayant échoué. Nombre d'analystes pensent d'ailleurs que le PSOE, fondé il y a 137 ans, préférerait former une "grande coalition" avec le PP, voire soutenir un gouvernement PP minoritaire plutôt que de s'associer à un parti qui menace son existence. S'inspirant de la Grèce, où le parti de la gauche radicale Syriza du Premier ministre Alexis Tsipras a relégué les socialistes du Pasok au rang d'observateurs, Pablo Iglesias, le dirigeant de la coalition Unidos Podemos, espérait affaiblir considérablement le PSOE et le priver de toute chance de diriger un gouvernement. Après le vote, jeudi, des Britanniques en faveur d'une sortie de l'Union européenne, Alexis Tsipras et Pablo Iglesias ont appelé à une refondation de l'Union européenne, basée sur un fonctionnement démocratique amélioré, la protection sociale et la solidarité. "C'est (le Brexit) une mauvaise nouvelle pour l'avenir de l'Europe. Nous sommes préoccupés par la décision du peuple britannique. Et nous pensons que nous devons reconstruire une autre idée de l'Europe, basée sur les droits sociaux et les droits de l'homme", a dit vendredi à des journalistes Pablo Iglesias à la fin de la campagne. (Benoit Van Overstraeten, Eric Faye et Tangi Salaün pour le service français)