Les discussions pour former la coalition allemande continuent ce week-end

Les discussions en vue de former une coalition de gouvernement inédite en Allemagne, composée des conservateurs emmenés par la chancelière Angela Merkel, des libéraux et des écologistes, ont repris vendredi et se prolongeront durant le week-end. /Photo prise le 16 novembre 2017/REUTERS/Axel Schmidt

par Hans-Edzard Busemann et Thorsten Severin

BERLIN (Reuters) - Les discussions en vue de former une coalition de gouvernement inédite en Allemagne, composée des conservateurs emmenés par la chancelière Angela Merkel, des libéraux et des écologistes, ont repris vendredi et se prolongeront durant le week-end.

Pour tenter de sortir de l'impasse, l'Union chrétienne-démocrate (CDU) a proposé de réduire davantage qu'elle ne le souhaitait jusqu'alors la capacité de production d'électricité générée par le charbon, une revendication phare des Verts.

"Je participe à ces négociations avec la ferme intention, malgré les difficultés, d'accomplir la tâche que les électeurs nous ont confiée de former une coalition", a déclaré Angela Merkel à son arrivée sur place. "Cela va être difficile, mais cela vaut la peine de passer à l'étape suivante."

Le chef du groupe parlementaire CDU, Volker Kauder, a indiqué que son parti était disposé à faire des efforts sur la question des émissions des centrales à charbon. "Tout le monde doit faire des concessions", a-t-il estimé.

Les trois partis avaient décidé de suspendre vendredi vers 04h00 du matin leurs pourparlers faute d'avoir pu rapprocher leurs positions.

Ils s'étaient initialement laissés jusqu'à jeudi soir pour faire aboutir les discussions "exploratoires", préalable à de vraies négociations.

Si aucun accord de coalition n'est trouvé, de nouvelles élections ne sont pas à exclure, un scénario qu'aucune des trois formations ne souhaite, de crainte de voir une nouvelle progression du parti d'extrême droite Alternative pour l'Allemagne (AfD), qui a fait son entrée au Bundestag lors des législatives du 24 septembre.

Angela Merkel pourrait aussi tenter de convaincre son ancien partenaire de coalition, le Parti social-démocrate (SPD), de rééditer une expérience qui ne lui a guère réussi dans les urnes, ou expérimenter la formation d'un gouvernement minoritaire, du jamais vu en Allemagne depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

COALITION INÉDITE AU NIVEAU FÉDÉRAL

La coalition envisagée, qui n'a jamais été expérimentée au niveau fédéral, est surnommée "coalition Jamaïque" en raison des couleurs du drapeau jamaïcain : noir pour la CDU-CSU, jaune pour les libéraux du FDP, vert pour les Grünen.

Les Verts sont au coeur des discussions en cours, qui achoppent notamment sur les questions de l'immigration et du climat.

Le parti écologiste est hostile à la volonté de l'Union chrétienne-sociale (CSU), l'alliée bavaroise de la CDU, de mettre fin au regroupement familial des immigrés.

Il campe aussi sur son exigence d'une réduction de 10 gigawatts de la capacité de production d'électricité générée par le charbon.

Il a rejeté dans la nuit une proposition d'Angela Merkel de la réduire de 7 gigawatts, deux gigawatts de plus que ce que la CDU proposait jusqu'à présent. C'est ce chiffre que la CDU serait prête à relever de nouveau.

Certains participants ne cachent pas leur frustration de voir les négociations piétiner après quatre semaines de discussions.

C'est le cas du FDP, qui vient de faire son retour au Parlement après quatre ans d'absence.

Son vice-président, Wolfgang Kubicki, s'est dit "extrêmement frustré "de s'asseoir ensemble à la même table et de s'apercevoir qu'on est revenu au point de départ".

Il a précisé vendredi soir qu'un nouveau délai pour trouver un accord provisoire avait été fixé à dimanche 18h00.

Angela Merkel est réputée pour ses talents de négociatrice, notamment dans les instances européennes, où elle joue souvent sur l'usure de ses partenaires.

La chancelière doit maintenant appliquer sa recette au niveau national mais elle subit les pressions de son propre camp, notamment celles de la CSU, qui ne veut guère céder de terrain sur des sujets comme l'immigration, de peur de voir encore progresser l'AfD sur sa droite.

"L'échec de la coalition Jamaïque serait l'échec de Merkel", estime le quotidien Bild.

(Avec la contribution de Riham Alkousaa, Andreas Rinke et Thomas Escritt, Jean-Stéphane Brosse et Tangi Salaün pour le service français, édité par Gilles Trequesser)