Emmanuel Macron chez les Francs-Maçons au Grand Orient de France, en mission réconciliation
POLITIQUE - Quel est le point commun entre Émile Loubet, président de la IIIe République (1899-1906), François Hollande et Emmanuel Macron ? Ils sont les seuls chefs d’États français à s’être rendu au siège du Grand Orient de France pendant leur mandat. Emmanuel Macron le visite ce mercredi 8 novembre à l’occasion du 250e anniversaire de l’appellation de la première organisation maçonnique française.
Le déplacement doit commencer un peu avant 13h au siège du Grand Orient de France (GODF), rue Cadet dans le 9e arrondissement de Paris. Le président de la République visitera une exposition consacrée à « la reconstitution de l’œuvre maçonnique » et deux temples maçonniques avant un déjeuner avec le président du GODF Guillaume Trichard et les représentants d’autres obédiences maçonniques. Pour finir, une allocution du chef de l’État est prévue dans l’après-midi.
Raison officielle de la venue ? Montrer « la reconnaissance de la République à l’égard de ce que le Grand Orient de France représente dans l’histoire de notre pays » et de son rôle dans l’établissement de la République, justifie l’Élysée.
La Commune et la laïcité, deux précédents crispants
Et rien d’autre ? « Il n’y a pas d’autres lectures à faire de ce déplacement », martèle la présidence. Pourtant, ce « déplacement exceptionnel » selon l’Élysée sonne comme une réconciliation - ou a minima une marque de cordialité officielle et publique - après deux épisodes qui ont crispé le GODF.
Le dernier en date remonte à juin 2021. Dans une tribune au Monde, le maître du GODF de l’époque, Georges Sérignac, s’émeut de la non-commémoration par le président des 150 ans de la Commune (18 mars-27 mai 1871). « La Commune exprime un idéal qui est celui du peuple français, une exigence d’égalité démocratique, de justice sociale et de solidarité. (...) Les républicains sincères ne peuvent oublier les héros de la Commune, non pas seulement le jour d’un hommage, mais à chaque instant de leur engagement. L’année des 150 ans de la Commune n’est pas terminée. Le pouvoir républicain peut encore choisir d’honorer cette histoire », écrit George Sérignac.
Emmanuel Macron ne donnera pas suite. La séquence n’améliore pas des liens déjà quelque peu ternis par un précédent, le 9 avril 2018. Devant les Évêques de France au collège des Bernardins (Paris), le président de la République dit sa volonté de « réparer » le lien « abîmé entre l’Église et l’État ». Tollé au Grand Orient, ardent défenseur de laïcité : « Garant du caractère indivisible, laïque, démocratique et social de notre République, le président Macron vient par ses déclarations devant les évêques de porter une grave atteinte à la laïcité. Le Grand Orient de France condamne fermement cette violation de nos principes républicains », réagit l’instance sur les réseaux sociaux.
Entre Macron et le GODF, le « malentendu est dissipé » assure l’Élysée
Depuis, les principales loges maçonniques ont été reçues à l’Élysée au moins une fois - en septembre 2018 - et le Palais assure qu’il n’y a pas de contentieux : « il y avait un malentendu (sur les propos présidentiels, ndlr) qui s’est dissipé au fil du temps », balaye-t-on. Guillaume Trichard s’est montré « particulièrement heureux » de la venue du président de la République et la question de la laïcité n’a « même pas été évoquée », assure-t-on.
Elle le sera néanmoins a minima lors du déjeuner où « les Grands maîtres du Grand Orient de France auront à cœur d’évoquer avec le président de la République un certain nombre de sujets d’actualité qui sont aussi des thèmes auxquels les Francs-maçons sont attachés ».
Au programme également, les problématiques de bioéthiques dont celle de la fin de vie. En septembre 2023, la ministre déléguée à l’organisation territoriale et aux professions de santé Agnès Firmin-Le Bodo a remis une première version du projet de loi au président de la République. Selon les déclarations du ministre des Relations avec le Parlement Franck Riester le 25 septembre sur Sud Radio, le texte devrait être présenté en Conseil des ministres d’ici la fin 2023 pour un possible débat au Parlement en 2024.
Depuis cette ébauche de calendrier, Emmanuel Macron n’a pas repris la parole sur ce sujet. L’Élysée botte en touche quant à de possibles annonces ce mercredi mais dément toute frilosité du président. « Ça a pris du temps parce que le président ne veut pas que les sujets de bioéthique fracturent la société », martèle-t-on, en mettant en avant la volonté, « partagée » par le GODF, de « préserver à tout prix unité nationale et qui amène les uns et les autres à se concentrer sur ce qui rassemble et pas ce qui divise. » Ou comment appeler subtilement à dépasser les différends, assumés ou pas.
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