"Emilia Perez": Jacques Audiard revient sur les attaques transphobes contre la star de son film

Jacques Audiard, dont le nouveau film Emilia Perez raconte l'histoire d'une narcotrafiquante trans changeant de vie et tournant le dos à la violence des cartels, a répondu dans les colonnes de Telerama aux attaques transphobes dont le film a été la cible.

Lorsque l'actrice principale du film, une femme trans, Karla Sofía Gascón, a reçu en mai le prix d'interprétation féminin à Cannes, Marion Maréchal Le Pen avait écrit sur le réseau social X: "C'est donc un homme qui reçoit à Cannes le prix d'interprétation... féminine. Le progrès pour la gauche, c'est l'effacement des femmes et des mères".

"J’ai trouvé cette réaction d’une méchanceté extrême. En plus, Marion Maréchal n’avait même pas vu le film", a réagi Jacques Audiard. "Je déteste cette culture de l’opinion, où l’on s’exprime sans savoir."

"C’est vieux, rance, et totalement à côté de la plaque. Moi, je sais ce que je dois à Karla. Elle a été mon éducatrice. Lorsque je la vois, avec sa femme et sa petite fille, cela me fait réaliser à quel point j’étais ignorant. Elle a fait évoluer mon regard et mes représentations", explique le cinéaste.

"Déclencher des petites urticaires"

Le réalisateur multi-récompensé aux César et à Cannes dénonce également le score de l'extrême droite aux élections européennes et législatives en France. Avec le Rassemblement national au pouvoir, son film n'aurait pas pu voir le jour, assure-t-il:

"Il y a deux ans, Emilia Pérez a bénéficié du financement de la région Île-de-France. Avec le RN au pouvoir, il n’aurait jamais obtenu cet argent. Et je ne peux même pas imaginer ce que deviendrait le CNC (qui participe au financement des films, NDLR). Alors oui, cette montée en puissance laisse présager un avenir compliqué."

Mais pour Jacques Audiard, ce climat politique tendu va permettre de rendre "le cinéma plus intéressant ou, en tout cas, nous obliger, nous, cinéastes, à inventer d’autres formes". "Je veux continuer à faire des films", conclut-il. "Et si je peux déclencher des petites urticaires chez des gens comme Marion Maréchal, c’est pas mal."

Article original publié sur BFMTV.com