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Élections américaines : en 1872, la première femme candidate se présente

Victoria Woodhull est la première femme à s'être présentée à la présidentielle américaine, mais elle n'a pas pu mener sa campagne à son terme.
Victoria Woodhull est la première femme à s'être présentée à la présidentielle américaine, mais elle n'a pas pu mener sa campagne à son terme.

Victoria Woodhull est la première femme a s’être présentée à l’élection présidentielle américaine, en 1872. À cause de son âge - et d’une arrestation le jour du vote - elle n’a pas pu mener sa campagne à terme, ce qui n’en fait pas moins une pionnière.

L’histoire des élections présidentielles américaines est jalonnée de plusieurs épisodes marquants et fondateurs. Parmi eux, celui de la toute première femme qui s’est présentée pour occuper la plus haute fonction du pays, alors même que seuls les hommes pouvaient voter à l’époque.

Cette femme, c’est Victoria Claflin Woodhull, et rien ne la prédestinait à cette incroyable épopée. Comme le rappelle Franceinter, elle est née en 1838 d’un père escroc et d’une mère servante - et voyante à ses heures. À 15 ans, notre protagoniste s’est retrouvée mariée avec un médecin qui s’est avéré alcoolique.

Première femme à Wall Street

Pour subvenir aux besoins de sa famille, elle est un temps devenue actrice, avant finalement de rejoindre sa soeur, avec qui elle pratiquait la voyance. Rapidement, Victoria Woodhull a développé un intérêt pour l’idéologie féministe et abolitionniste, au point de tenir des conférences sur le sujet.

Au cours des années 1860, grâce notamment à quelques bonnes rencontres, les deux soeurs sont devenues les premières femmes agents de change à Wall Street et elles ont même ouvert leur propre maison de courtage en 1870, selon un article de l’université de l’Ohio. Cette même année, elles ont aussi utilisé une partie de l’argent gagné pour lancer un hebdomadaire centré sur les préoccupations des femmes, sur l’égalité et abordant des sujets tabous pour l’époque comme l’éducation sexuelle ou le végétarisme.

Une aventure inachevée

C’est aussi en 1870, année décidément chargée, que Victoria Woodhull a annoncé son intention de se présenter à la présidentielle de 1872. Quelques mois avant l’élection, elle a lancé son parti, le Equal Rights Party. Les obstacles étaient pourtant grands, voire infranchissables : à cette époque, les femmes n’avaient pas le droit de vote, et il fallait être âgé d’au moins 35 ans pour pouvoir se présenter - elle n’en avait que 34 au moment de l’élection.

Rien de tout ça ne l’a empêchée de faire campagne, et de tenir des meetings à succès, lors desquels elle défendait l’égalité des genres mais aussi entre noirs et blancs. Cette étonnante histoire prendra fin le jour même de l’élection, puisque Victoria Woodhull s’est fait arrêter pour “propos obscènes” en raison d’un article écrit dans son journal sur un adultère commis par un révérend. Les bulletins en sa faveur n’ont pas été comptabilisés et Ulysses S. Grant a été réélu.

Belva Lockwood, la femme des grandes premières

Après cet échec, Victoria Woodull a déménagé en Angleterre, elle a divorcé, s’est remariée et s’est convertie au catholicisme. Pour une partie des historiens, ce n’est pas elle la première vraie candidate, puisqu’elle n’a pas pu mener sa campagne jusqu’à la fin et que ses voix n’ont pas été comptabilisées.

Ce rôle de pionnière reviendrait donc à Belva Ann Lockwood. Elle aussi s’est présentée sous l’étiquette de l’Equal Rights Party, en 1884. Et elle non plus, ne venait pas d’une famille aisée, comme le rappelle le site des Archives nationales américaines. Après s’être retrouvée veuve très tôt, avec une fille de trois ans à charge, elle a décidé de se lancer dans des études supérieures. Son second mari ayant une santé fragile, c’était ensuite à elle de financer les besoins de sa famille. Une expérience personnelle qui l’a notamment poussée à défendre ardemment le droit des filles à recevoir une éducation.

En 1879, elle a été la première femme avocate devant la Court Suprême des États-Unis. Ce n’est pas là son seul exploit puisqu’en 1884, elle est donc devenue la première femme à mener une campagne présidentielle jusqu’au bout. Et même si elle a remporté moins de 5 000 voix, elle a renouvelé l’expérience en 1888.

Belva Lockwood est la première femme a avoir mené jusqu'à son terme une campagne pour l'élection présidentielle.
Belva Lockwood est la première femme a avoir mené jusqu'à son terme une campagne pour l'élection présidentielle.

1920, la date charnière

Pourtant, à cette époque, les femmes n’avaient toujours pas le droit de vote. Même si certains États américains avaient été, un temps, en avance sur la question. Dès 1780, les femmes disposaient par exemple de ce droit dans l’État du New Jersey, à condition d’être propriétaires - condition également requise pour les hommes. Il a été supprimé en 1807, lorsque la législation a limité le droit de vote aux seuls hommes blancs, précise le site de l’ambassade américaine.

En 1869, les femmes ont commencé à s’organiser, en créant la National Women Suffrage Association et l’American Women Suffrage Association. Les deux groupes réclamaient bien le droit vote pour les femmes, mais le premier voulait agir via un amendement de la Constitution américaine, tandis que le second souhaitait passer par la réforme de la Constitution des États.

Les deux groupes ont finalement fusionné en 1890, sous le nom de National American Women Suffrage Association. Si certains États ont peu à peu inclus ce droit dans leur Constitution, à commencer par le Wyoming, ce n’est qu’en 1919 que l’amendement de la Constitution américaine sur le sujet a été voté. Il est entré en vigueur en août 1920. Mais attention, pour les hommes comme pour les femmes, le droit de vote ne concernait alors pas les personnes issues de minorités, qui ont dû attendre le Voting Rights Act de 1965.

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