Après avoir voté, Loukachenko a qualifié le Bélarus de "démocratie brutale”

Alexandre Loukachenko est entré dans le bureau de vote de Minsk accompagné de son chien. Il a voté et s’est adressé aux journalistes, qualifiant le Bélarus de “démocratie brutale”.

Plus de 5 300 bureaux de vote ont ouvert au Bélarus ce dimanche matin dans le cadre d'une élection présidentielle qui devrait permettre au président sortant Alexandre Loukachenko de remporter un septième mandat.

La campagne électorale a été quasiment inexistante. Le président sortant lui-même a semblé se désintéresser du processus.

"Je ne suis pas la campagne électorale", a-t-il déclaré en début de semaine dans une usine automobile publique. "Je n'ai pas le temps".

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Âgé de 70 ans, M. Loukachenko, souvent surnommé "le dernier dictateur d'Europe", dirige le Bélarus d'une main de fer depuis 1994.

A Minsk, le 25 janvier 2025.
A Minsk, le 25 janvier 2025. - Pavel Bednyakov/Copyright 2025 The AP. All rights reserved

Nombre de ses opposants politiques ont été emprisonnés ou ont fui à l'étranger.

"L'humeur est déprimée au Bélarus. La plupart des personnes qui avaient l'habitude de protester activement et d'exprimer leurs opinions politiques sont maintenant intimidées", a déclaré Darja Rudkova, une Bélarusse vivant en exil.

Lors des dernières élections de 2020, Loukachenko a été déclaré vainqueur avec 80 % des voix. Cette "mascarade électorale", dénoncée par les Occidentaux, face aux accusation de fraude électorale, avait déclenché des mois de manifestations et une répression sévère qui s'était traduite par 65 000 arrestations.

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Des personnalités de l'opposition ont été emprisonnées ou contraintes de fuir. Ce dimanche, Svetlana Tikhanovskaya, la cheffe de l'opposition en exil à Varsovie, a qualifié l'élection présidentielle de "farce".

Officiellement ce dimanche, les sept millions d'électeurs inscrits dans le pays peuvent choisir entre cinq candidats, dont un seul est considéré comme critique à l'égard du régime de Loukachenko et des liens étroits du Bélarus avec la Russie.

Le président du Bélarus Alexander Lukachenko à Minsk, vendredi 24 janvier 2025.
Le président du Bélarus Alexander Lukachenko à Minsk, vendredi 24 janvier 2025. - AP/Belarus' Presidential Press Service

La candidate indépendante Anna Kanapatskaya a déclaré : "Les Bélaruses et le Bélarus méritent de vivre dans un pays libre, indépendant et démocratique. Ils méritent d'avoir un avenir où les droits de l'homme sont respectés. Je ne me bats pas avec les policiers car c'est un crime. Mais cela ne signifie pas que je soutiens les politiques des dirigeants actuels du pays."

Bien que le mandat actuel de M. Lukachenko n'expire pas avant l'été prochain, le président a choisi d'avancer les élections en plein mois de janvier qui est un mois de froid glacial au Bélarus.

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Selon l'analyste politique Valery Karbalevich, il s'agit d'une tentative calculée pour dissuader les manifestants de descendre dans la rue pour protester contre les résultats des élections.

"Il n'y aura pas de manifestations de masse dans un mois de janvier glacial", a-t-il déclaré.

Répression de la contestation

M. Loukachenko est un proche allié du président russe Vladimir Poutine et il compte sur les subventions et le soutien politique de Moscou pour maintenir sa mainmise sur le pouvoir au Bélarus.

Tout en négociant avec le Kremlin au fil des ans pour obtenir davantage de subventions, M. Loukachenko a périodiquement tenté d'apaiser l'Occident en assouplissant la répression dans son pays. Mais cette tactique a pris fin lorsqu'il a déclenché une violente répression de la dissidence après les élections de 2020.

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Des dizaines de milliers de personnes ont alors été arrêtées et des milliers d'autres ont été battus par les forces de police dans le cadre d'une vaste campagne de répression menée par l'État. Parallèlement, des centaines de médias indépendants et d'ONG ont été fermés et interdits.

Répression policière à Minsk, le 8 septembre 2020.
Répression policière à Minsk, le 8 septembre 2020. - AP/Copyright 2020 The AP. All rights reserved.

En réaction, l'Occident a adopté des sanctions qui se sont intensifiées après qu'il a été établi que la Russie utilisait son voisin pour contourner les sanctions européennes imposées à Moscou en raison de l'invasion massive de l'Ukraine en 2022.

À l'heure actuelle, 287 personnes, dont M. Loukachenko lui-même, ont été sanctionnées par l'UE ainsi que 39 entités.

Vendredi, la Commission européenne a qualifié les élections de "mascarade totale".

"Il ne s'agit pas d'élections lorsque l'on sait déjà qui va gagner", a déclaré Anitta Hipper, porte-parole de la Commission pour les affaires étrangères.

"L'UE continue de soutenir le peuple bélarusse. Nous continuons également à faire pression sur le régime", a-t-elle ajouté.

Le mois dernier, la Commission a déclaré qu'elle fournissait 30 millions d'euros pour soutenir la société civile au Bélarus, après avoir déjà fourni 140 millions d'euros depuis 2020.

En ce qui concerne l'opposition, les militants des droits de l'Homme affirment que le pays détient environ 1 300 prisonniers politiques derrière les barreaux. Le lauréat du prix Nobel de la paix Ales Bialiatski, fondateur de Viasna, le principal groupe de défense des droits de l'homme du pays, fait partie de ces prisonniers.

"Par une campagne brutale contre toute dissidence, les autorités ont créé un climat de peur étouffant, réduisant au silence toute personne qui conteste le gouvernement", a déclaré Marie Struthers, directrice du programme Europe de l'Est et Asie centrale d'Amnesty International.

Un homme fort à la soviétique

Le Bélarus a fait partie de l'Union soviétique jusqu'à son effondrement en 1991. Cette nation slave de 9 millions d'habitants est coincée entre la Russie, l'Ukraine, la Lettonie, la Lituanie et la Pologne, ces trois dernières étant toutes membres de l'OTAN. Pendant la Seconde Guerre mondiale, elle a été occupée par l'Allemagne nazie.

M. Loukachenko, ancien directeur des fermes d'État, a été élu pour la première fois en 1994, profitant d'une vague de colère de l'opinion publique face à une chute catastrophique du niveau de vie après des réformes chaotiques en faveur de l'économie de marché. Il a promis de lutter contre la corruption.

Vladimir Poutine et Alexandre Lukachenko à Minsk, le 6 décembre 2024.
Vladimir Poutine et Alexandre Lukachenko à Minsk, le 6 décembre 2024. - Gavriil Grigorov/Sputnik

Admirateur déclaré de l'Union soviétique, le gouvernement de Loukachenko supervise des contrôles de type soviétique sur l'économie et décourage activement l'utilisation de la langue locale au profit du russe. Le dirigeant a également poussé le pays à abandonner son drapeau national rouge et blanc au profit d'un drapeau similaire à celui qu'il utilisait en tant que république soviétique.

La principale agence de sécurité du Bélarus propage la peur et a conservé son nom de l'époque soviétique, le KGB (Komitet Gosudarstvennoy Bezopasnosti). Le pays est également le seul pays d'Europe à maintenir la peine de mort, les exécutions se faisant d'une balle dans la nuque.

En février 2022, M. Loukachenko a permis à la Russie d'utiliser le territoire pour envahir l'Ukraine, acceptant par la suite d'accueillir certaines des armes nucléaires tactiques de la Russie.