Education: Genetet promet de "garder le cap" et suscite la défiance
Propulsée ministre de l'Education nationale, Anne Genetet promet de garder le "cap" sur l'école, mais son inexpérience sur les questions scolaires, son duo avec un élu LR et l'influence déjà prêtée à Gabriel Attal inspirent la défiance du monde éducatif.
La macroniste, jusqu'ici connue à l'Assemblée pour ses travaux sur la défense et la diplomatie, l'a martelé lors de la passation des pouvoirs : "Le navire ne changera pas de cap", sur fond d'instabilité inédite au poste de ministre de l'Education nationale, avec cinq titulaires depuis 2022.
Depuis le deuxième quinquennat d'Emmanuel Macron, l'Elysée et Matignon ont toujours gardé la main sur l'Education, en en faisant une priorité.
Lundi matin rue de Grenelle, plusieurs membres de l'équipe rapprochée de Gabriel Attal -- ministre de l'Education de juillet 2023 à janvier 2024 -- étaient présents à la passation, laissant augurer des velléités de la part de l'ex-Premier ministre, désormais chef de file des députés macronistes, de reprendre la main sur la politique éducative après le passage de Nicole Belloubet.
Selon une source macroniste, Gabriel Attal était soucieux de voir le poste échoir à une proche.
"On voit bien qu'Anne Genetet est une personne qui n'est pas connue pour des prises de position très identifiées sur l'éducation, et donc ça donne l'impression qu'il va y avoir une forte influence peut-être de Gabriel Attal, en tout cas de l'Élysée, de Matignon", a réagi auprès de l'AFP Catherine Nave-Bekhti, secrétaire générale de la CFDT Education.
Pour elle, le choix dans l'équipe de la nouvelle ministre de personnalités ayant participé à l'élaboration de la politique éducative de Gabriel Attal "n'augure rien de bon".
Parmi eux, figurent Carole Drucker-Godard, jusqu'ici rectrice de Limoges et ex-membre de la mission "Exigence des savoirs" (qui a jeté les bases des mesures du "choc des savoirs"), qui devrait être nommée directrice de cabinet, ou Rémi Leleu, ex-chef de cabinet adjoint du Premier ministre, qui devrait occuper le poste de chef de cabinet.
- "Sans espoir" -
Inconnue du grand public, et surtout des enseignants, Anne Genetet aura des dossiers à traiter sans attendre, à commencer par la crise d'attractivité du métier. Érigé en "urgence structurelle" par les syndicats, le problème perdure, avec plus de 3.000 postes non pourvus aux concours enseignants cette année.
L'expérimentation de l'uniforme, la place des écrans à l'école ou le caractère obligatoire ou non du brevet pour passer en seconde sont également sur le bureau de la ministre proche de Gabriel Attal.
La nomination à ses côtés, comme ministre délégué chargé de la Réussite scolaire et de l'Enseignement professionnel, du député LR Alexandre Portier, soulève aussi des craintes. Il avait pris la défense de l'enseignement privé notamment dans une tribune dans Le Figaro au printemps dernier.
"La présence d'Alexandre Portier est pour moi la grande inquiétude, parce que c'est quand même quelqu'un qui a pris des positions assez radicales et ultralibérales en faveur de l'enseignement privé", estime Philippe Meirieu, chercheur en pédagogie classé à gauche, honni par les tenants d'une école traditionnelle.
Pour ce spécialiste des sciences de l'éducation, "l'essentiel va se jouer sur la capacité de la ministre à obtenir des arbitrages budgétaires favorables pour augmenter un tout petit peu les profs".
Cette question du budget et de la revalorisation des enseignants apparaît centrale pour les acteurs du monde de l'éducation, qui s'inquiètent du manque de poids politique de la nouvelle ministre.
Pour Guislaine David, secrétaire générale de la FSU-Snuipp, premier syndicat du primaire, "le seul objectif de la nouvelle ministre doit être le budget".
Mais, s'interroge le SNALC, syndicat des collèges et lycées, "à l'heure où l'on nous fait miroiter un serrage de ceinture sans précédent sur le budget, notre nouvelle ministre a-t-elle la capacité à remporter des arbitrages?"
"Pour avoir du poids, il faut maîtriser un petit peu le sujet quand même" et "avoir déjà existé dans le paysage politique", pointe auprès de l'AFP Elisabeth Allain-Moreno, secrétaire générale du SE-Unsa, pour qui la nouvelle ministre "ne coche pas vraiment beaucoup de cases".
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