Crises à régler, impôts, budget... Ce qui attend désormais le nouveau gouvernement Barnier

Pour le nouveau gouvernement, c'est le jour de la rentrée et le plus dur reste à faire. Les 39 ministres et secrétaires d'État fraîchement désignés par le Premier ministre Michel Barnier ont fait leurs premiers pas dans leurs fonctions ce lundi avec un "petit-déjeuner gouvernemental" dès 8 heures à Matignon.

Au programme de cette journée: neuf passations de pouvoir, un Conseil des ministres autour d'Emmanuel Macron à 15h et plusieurs dossiers urgents. "Moi, ce qui m'intéresse, c'est de créer une ambiance avec l’équipe gouvernementale qui permette à toutes les initiatives, toutes les énergies de s’exprimer", assurait le nouveau Premier ministre lors de sa première interview télévisée, dimanche soir sur France 2.

"On va parler dans un climat de plus grande cohésion, de plus grande fraternité", a-t-il ajouté.

Lors de son interview, Michel Barnier a rappelé les différents enjeux de ses débuts, notamment la question du budget et des sujets explosifs comme le budget, les impôts, les retraites ou la crise en Outre-mer.

• Martinique, Nouvelle-Calédonie: des crises en Outre-mer

L'un des dossiers les plus urgents à traiter pour le nouveau gouvernement est incontestablement celui des Outre-mer. François-Noël Buffet, qui remplace Marie Guévenoux, en poste pendant neuf mois, hérite d'une situation plus que tendue en Nouvelle-Calédonie, où la mobilisation indépendantiste contre la réforme du corps électoral a fait 13 morts depuis mai.

La Martinique est, elle, en proie à de larges manifestations contre la vie chère. Et ce, malgré les arrêtés préfectoraux tentant de restreindre ces rassemblements.

Le nouveau ministre des Outre-mer devra également gérer la situation à Mayotte, en pleine crise migratoire et économique, alors que la Guadeloupe est, elle, frappée par des grèves massives d'agents EDF, suscitant des coupures d'électricité.

Mais François-Noël Buffet est familier de ces dossiers et notamment à la Nouvelle-Calédonie, où il avait piloté, en mars dernier, une délégation transpartisane sur les risques d'une dégradation de l'ordre public liée à la réforme constitutionnelle tant décriée dans l'archipel.

• L'urgence du budget

Autre urgence: le budget. Michel Barnier doit en effet présenter son budget 2025 lors de sa déclaration de politique générale, programmée le 1er octobre. Il a, en théorie, jusqu'à cette date pour déposer son projet de loi de finances (PLF), prévoyant l'ensemble des gains et des dépenses de l'État pour l'année suivante et qui doit donc être déposé à l'Assemblée nationale au plus tard le premier mardi d'octobre pour pouvoir être examiné, amendé et voté dans les temps.

Un sujet d'autant plus brûlant que la France est dans une situation budgétaire délicate, après que le pays ait été épinglé par Bruxelles en avril pour un déficit excessif. Un avertissement auquel s'ajoute celui du Trésor public, qui a récemment alerté sur un risque de dérapage de ce déficit à 5,6% du PIB en 2024 si la politique économique du pays ne changeait pas.

• Vers une augmentation des impôts?

Cette urgence budgétaire va-t-elle entraîner une hausse des impôts? Dès sa nomination à Matignon, Michel Barnier suscitait de vives réactions en évoquant sa volonté d'augmenter les impôts. Une volonté décriée sur laquelle il est revenu dimanche dans son interview sur France 2.

"Je ne vais pas alourdir encore les impôts sur l'ensemble des Français, ni sur les plus modestes, ni sur les gens qui travaillent, ni sur classes moyennes", a promis Michel Barnier, déclarant toutefois demander "aux plus riches de prendre part à l'effort de solidarité".

La hausse d'impôts devrait donc concerner les Français les plus riches, mais aussi les grosses entreprises. "Je ne veux pas aggraver la double dette écologique et financière, donc il faut faire un effort collectif pour maîtriser les dépenses, ça peut se faire notamment avec des prélèvements ciblés sur les personnes fortunées, ou certaines grosses entreprises", a fait valoir Michel Barnier dans son allocution du 22 septembre.

"Les très grandes sociétés peuvent aussi contribuer à l'effort national de redressement", a tranché le Premier ministre.

• La réforme des retraites "améliorée"?

C'est un autre des chantiers brûlants qui attend le nouveau gouvernement: celui de la réforme des retraites, entrée en vigueur dans la douleur l'an passé et qui avait entraîné des semaines de manifestations. La mobilisation de centaines de milliers de Français n'ayant pas empêché le passage progressif de l'âge légal de départ à 64 ans.

Michel Barnier a dit hier, sur France 2, qu'il comptait "prendre le temps d'améliorer" la réforme des retraites. "On a une loi qui prévoit un cadre financier et je pense que ce cadre financier doit être préservé", a-t-il ajouté, expliquant "faire confiance aux partenaires sociaux" pour ces améliorations.

Invitée sur BFMTV dimanche, Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT, affirme que "rien ne va dans cette réforme et donc on ne peut pas l'aménager". "L'objectif de la CGT est que cette réforme ne s'applique pas", a-t-elle tranché.

• Des dossiers explosifs laissés en suspens

Parmi les autres travaux qui attendent urgemment l'attention du nouveau gouvernement, ceux ayant été suspendus in extremis au soir du 1er tour des législatives: la réforme de l'Assurance-chômage, qui prévoit de durcir les conditions d'accès et les règles d'indemnisation, ou encore la loi sur la fin de vie, promesse de campagne d'Emmanuel Macron et dont l'avenir est incertain, la dissolution ayant annulé le travail débuté en avril dernier.

Même sort pour la commission d'enquête chargée dans ses travaux de création d’une commission d’enquête relative aux violences commises dans les secteurs du cinéma, de l'audiovisuel, du spectacle vivant, de la mode et de la publicité, impulsée par l'actrice Judith Godrèche.

Autre dossier brûlant pour le gouvernement Barnier, celui, poussé par Rachida Dati qui a conservé le ministère de la Culture, de la si décriée fusion de Radio France et France Télévisions. Un projet de réforme de l'audiovisuel public, dans les cartons depuis 2020, qui a été interrompu par la dissolution voulue par Emmanuel Macron et les élections législatives. Reste à savoir s'il sera remis sur la table.

• La menace de motions de censure

Pour ses débuts, le gouvernement Barnier va devoir gérer ces dossiers tout en faisant face aux menaces de motions de censure venues de toute part. Une arme parlementaire qui promet d'être plus présente que jamais, compte tenu du contexte politique à l'Assemblée nationale.

C'est cette épée de Damoclès qui a par ailleurs poussé Emmanuel Macron à choisir Michel Barnier comme étant le candidat ayant le moins de chance d'être rejeté par les députés élus en juillet dernier lors des élections législatives provoquées par la dissolution.

Dès la nomination du Premier ministre, à gauche comme à droite, c'est la levée générale de boucliers. "Le Nouveau Front populaire [NFP] censurera un nouveau gouvernement, quel qu’il soit, s’il considère que la politique qu’il mène est injuste et ne répond pas aux besoins des Français", prévenait dès l'annonce de l'arrivée de Michel Barnier à Matignon Lucie Castets, candidate éconduite à ce poste.

"Je voterai une motion de censure s'il y a des impôts qui frappent à la fois les Français et les entreprises", a martelé Éric Ciotti, désormais ancien président des Républicains, au micro de RTL ce lundi.

Même son de cloche du côté du RN avec Sébastien Chenu qui promet une motion "s'il y a des impôts qui frappent les Français." Dépourvue de majorité, l'Assemblée nationale pourrait connaître bon nombre de motions de censure dans les prochaines semaines.

Article original publié sur BFMTV.com