Donald Trump chez les influenceurs masculinistes pour attirer les jeunes en vue de la présidentielle américaine
Canulars vulgaires, manspreading et casquettes à l’envers... Donald Trump a plongé dans un univers très particulier pour convaincre des hommes de moins de 30 ans de voter pour lui.
ÉTATS-UNIS - Donald Trump en train de danser à côté d’un Cybertruck « Make America Great Again ». Ce n’est pas un rêve lucide, ni même un cauchemar, juste un stream d’Adin Ross. Âgé de 23 ans, le créateur de contenu était connu pour ses vidéos de gaming avant de se rapprocher de masculinistes comme Andrew Tate. Désormais banni de Twitch pour comportement haineux, il poste ses vidéos en direct sur Kick, une plateforme concurrente où la modération est moins stricte.
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Début août, Adin Ross a reçu Donald Trump en live lui offrir une Rolex et un Cybertruck, revenir sur sa tentative d’assassinat, et s e moquer de Joe Biden et de Kamala Harris pendant plus d’une heure. « Les gars, vous avez une grosse décision à prendre en novembre », a conclu l’influenceur. « Vous devez sortir et aller voter pour la bonne personne, c’est-à-dire lui », a-t-il ajouté en désignant l’ancien président avec un grand sourire.
Bien loin d’une interview traditionnelle, ce genre de conversation est une opportunité en or pour Donald Trump, opportunité qu’il n’a cessé de saisir à l’approche de la présidentielle américaine, où il affronte Kamala Harris début novembre prochain. Comme vous pouvez le voir dans notre vidéo ci-dessus, le candidat des Républicains est ces derniers temps allé faire sa promo chez de nombreux influenceurs controversés, du fitness gourou Logan Paul au comédien conservateur Theo Von.
Cette stratégie de communication n’a rien d’anodin, et montre que Donald Trump veut aller chercher un électorat en particulier : les hommes de moins de 30 ans. Ces derniers sont difficiles à mobiliser parce qu’ils votent moins que leurs aînés. « Les hommes de 18 à 29 ans ne regardent peut-être pas CNN ou Fox News », explique au HuffPost Michael Higgins, professeur de journalisme et de communication à l’université de Strathclyde. « Mais ils vont voir Logan Paul, Adin Ross, Elon Musk ».
Monétiser la masculinité toxique
En se rapprochant de ces influenceurs conservateurs, Donald Trump veut s’adresser à un type d’homme en particulier. Prenons l’exemple des Nelk Boys : ces Canadiens américains sont connus pour leurs pranks, et leur podcast, Full Send Podcast. Ils y parlent entre « vrais » mecs bien virils de sport, de drague, et de plus en plus, de politique.
Entre deux canulars sexistes, racistes et transphobes, ils normalisent la misogynie extrême auprès de leur audience jeune et masculine, souligne l’ONG Media Matters. Ils sont sans surprise proches d’Andrew Tate, font la fête avec des proches du suprémaciste blanc Nick Fuentes, et ont invité Trump et son colistier J.D. Vance plusieurs fois sur leur podcast.
La proximité entre le candidat des Républicains et cette sphère d’influenceurs masculinistes n’étonne pas Deana Rohlinger, professeur de sociologie à Florida State University. Malgré son âge, Donald Trump continue de représenter pour ces jeunes créateurs de contenu un « “vrai homme”, un homme qui réussit au bureau et dans la chambre », détaille-t-elle.
Celui que Michael Higgins décrit comme « l’archétype de l’homme toxique » est aussi le roi du clickbait, et donc le moyen parfait de faire des vues facilement. « Ils s’utilisent mutuellement », résume Michael Higgins. « Les influenceurs veulent des auditeurs pour leur prochain épisode, et Trump veut consolider sa base d’électeurs ».
Coach Walz et le « brat summer » pour les Démocrates
Mais cette stratégie peut-elle vraiment apporter à Donald Trump les électeurs qu’il convoite tant ? Il faudra attendre le vote des Américains en novembre pour en avoir le cœur net, mais ce qui est sûr, c’est que les émissions où il est invité cartonnent à chaque fois, avec plusieurs millions de vues et de très nombreux commentaires positifs.
« J’emmerde les médias traditionnels, c’est ce format qu’on devrait tous regarder quand on essaie d’évaluer précisément les candidats à la présidentielle », s’exclame ainsi un internaute sous une interview de Donald Trump par le youtubeur Lex Fridman, connu pour ses entretiens avec les « hommes alpha » de la tech, comme Elon Musk et Jeff Bezos.
Les chiffres montrent par ailleurs qu’aux États-Unis, la divergence entre les électeurs et les électrices s’est creusée. Selon un sondage du New York Times dans six États indécis, Donald Trump mène de 13 points chez les hommes de moins de 30 ans, tandis que son adversaire Kamala Harris mène de 38 points chez les femmes de moins de 30 ans. « Donald Trump dit ouvertement que les jeunes hommes devraient avoir plus de pouvoir. Pour un jeune homme vulnérable, c’est un message attirant », précise Michael Higgins.
De son côté, Kamala Harris mène depuis le retrait de Joe Biden une redoutable campagne sur les réseaux sociaux, multipliant les références à la pop culture et les appels à la Gen Z. À ses côtés, son colistier Tim Walz rassure les Démocrates avec son côté « papa fun du Midwest ».
« Harris utilise une approche moins genrée, et je pense que ça sera plus efficace », avance Michael Higgins. « S’adresser seulement aux hommes avec ces traits toxiques, ça ne plaît qu’à un électorat limité ». Le tableau est donc dressé, juste à temps pour le débat de ce 10 septembre : d’un côté, « brat summer » et coach Walz, et de l’autre, les hommes alpha et les « frat bros ».
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