Dominants

L’actualité nous le montre chaque jour, aucune profession, aucun secteur de la société n’est exempt de scandales d’abus ou de harcèlement sexuel, voire de viols. Ce n’est malheureusement guère surprenant : à partir du moment où les relations entre individus sont régies par les lois du pouvoir, divisant un groupe entre dominants et dominés, il y a risque d’abus. Et le sexe est bien «une des formes primaires du pouvoir», comme le disait l’écrivain argentin Ernesto Sábato. S’il y a un milieu dont on pourrait attendre une certaine forme d’exemplarité, c’est bien l’humanitaire, qui a vocation à apporter de l’aide à une population en souffrance. Eh bien non, comme le montre notre enquête, lancée après les premières révélations sur les turpitudes de l’ex-directeur de l’ONG britannique Oxfam en Haïti, pays ô combien démuni, l’humanitaire peut aussi devenir un terrain de chasse pour les prédateurs sexuels. Justement parce que les populations sont démunies et n’ont aucun moyen de résister à un abus, encore moins de porter plainte, a fortiori dans des pays où l’Etat de droit n’est plus qu’un lointain souvenir. Que faire ? Le fatalisme n’est pas une option. Dans ce secteur, plus encore qu’ailleurs, doit régner une tolérance zéro, une impunité zéro. Car l’abus nourrit le ressentiment, voire la haine de l’autre, et le monde actuel n’en a vraiment pas besoin. Le point positif, c’est que la parole semble libérée. On ne ferme plus les yeux sur des conduites que l’on a trop longtemps tolérées par lâcheté, bêtise ou indifférence, voire un peu des trois. A tous ceux qu’effleure parfois ces temps-ci l’idée que les femmes en font trop, qu’elles risquent de passer du statut de victimes à celui de bourreaux, nous conseillons de lire ces témoignages. Il y a encore de la marge. Beaucoup de marge. Le sexisme est une plaie et tout reste à faire pour le combattre.

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Le 21 mai 68 raconté par Joy Sorman
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