Dôme de chaleur : la France peut-elle se retrouver dans la situation du Canada ?

Des Américains se réfugient dans des centres climatisés, ici à Portland. (AFP)

Le Canada fait face à un dôme de chaleur qui pousse à des températures extrême. Un phénomène dont l'intensité est aggravée par le réchauffement climatique.

Près de 50 degrés au Canada, des records absolus battus jour après jour, un bilan humain qui dépasse les 150 morts... La situation à l'ouest du Canada et au nord-ouest des Etats-Unis inquiète. En cause : le phénomène du "dôme de chaleur" qui touche cette région.

Concrètement, "l'air chaud happé du Pacifique est venu vers le Canada et a été piégé dans un mouvement anticyclonique qui a gardé l'air sur la région. Un air chaud qui a en plus été réchauffé avec le mouvement de la moyenne atmosphère vers les basses couches. Comme l'anticyclone ne bouge pas, l'air se réchauffe sur place pendant plusieurs jours", nous explique Olivier Proust, prévisionniste à Météo France.

Les États-Unis et l'Europe particulièrement exposés à ce phénomène

C'est ce qui explique comment le dôme de chaleur qui sévit sur le Canada aboutit à des records de chaleur largement battus jour après jour. Un phénomène qui se produit le long du "jet stream", ce courant qui se déplace à haute altitude, en forme d'Omega, dans l'hémisphère nord. Un phénomène de dôme de chaleur qui peut intervenir le long du "jet stream", soit entre le Sahara et le pôle Nord. Les Etats-Unis et l'Europe sont donc tout particulièrement exposés à ce dôme de chaleur.

Un phénomène qui a déjà touché la France. "C'est un phénomène qui existe sans réchauffement climatique, mais avec une intensité moindre. C'est ce qui s'est passé par exemple lors de la canicule de 2003 en France, un phénomène qui se produit lors d'un blocage atmosphérique avec des conditions anticycloniques sur une vaste région," poursuit Olivier Proust, prévisionniste à Météo-France.

"Le réchauffement climatique aggrave son intensité"

"Si le phénomène n'est pas directement lié au réchauffement climatique, son intensité est aggravée par le réchauffement. On le voit au Canada, où les records absolus de chaleur sont battus de 4 degrés et sur de nombreuses stations, alors que les records sont habituellement battus sur une station, à quelques dixièmes de degrés près", complète Serge Zaka, chercheur en agroclimatologie pour l'entreprise d'innovation agronomique ITK.

La canicule de 2003 en Europe, les vagues de chaleurs en Russie où l'on a enregistré plus de 38 degrés au nord du cercle polaire sont ainsi des exemples récents de ce phénomène de dôme de chaleur, dont l'intensité va augmenter sous l'effet du réchauffement climatique.

45 à 50 degrés plusieurs fois entre 2050 et 2100 en Europe

Au XXe siècle, on n'a jamais atteint des vagues de chaleur aussi intense que celle du Canada, ou de la France en 2019. Les chercheurs estiment aujourd'hui qu'il existe une faible probabilité, mais qui existe, que l'on ait des vagues de chaleur de 45 à 50 degrés en Europe d'ici à 2050.

"À partir de 2050, ce phénomène devrait avoir lieu plusieurs fois d'ici la fin du siècle en Europe", alerte Serge Zaka, qui conclut donc que la France "n'échappera pas à ces vagues de chaleur, des mégas-canicules, dans les prochaines décennies".

Plusieurs dizaines de morts

Un phénomène de plus en plus intense aux conséquences dramatiques. Au Canada, on recense au moins 130 morts de la vague de chaleur qui touche l'Ouest du pays, un bilan qui reste encore très provisoire avec une vague de chaleur qui perdure.

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"Au-delà des victimes humaines de la chaleur, il y a les animaux domestiques, chiens, chats, qui sont plus près du sol et où la chaleur est 5 à 6 degrés plus élevée que celle à hauteur de nos têtes. Les animaux d'élevage subissent aussi ces températures, avec un risque de mortalité plus important, et les animaux sauvages dont on aura du mal à évaluer la mortalité", poursuit le chercheur en agroclimatologie, qui alerte sur les larges conséquences de ces vagues de chaleur extrêmes.

Des conséquences dramatiques

Des vagues de chaleur de plus en plus intenses qui risquent d'avoir des conséquences dramatiques au niveau mondial. "Au Canada, les récoltes de colza et de blé sont normalement en pleine floraison. La chaleur risque de tuer les récoltes et vont faire s'envoler les prix sur les marchés mondiaux. Ce sera le même problème pour toutes les récoltes des pays qui subiront ce phénomène".

Un phénomène de dôme de chaleur accentué par le réchauffement climatique et qui risque de l'aggraver. "À ces températures extrêmes, les forêts se dessèchent, s'embrasent facilement, ou deviennent plus fragiles et sensibles aux malades", détaille Serge Zaka. Or, les arbres absorbent massivement du CO2, et contribuent à limiter le réchauffement climatique.

Le village de Lytton, où le record de 49,6, degrés a été enregistré, est ainsi en proie à un gigantesque incendie qui a contraint les habitants à évacuer leurs maisons. D'autres incendies du même type dus à un dôme de chaleur ont notamment été enregistrés en Russie ces dernières années. Des incendies dont les panaches de fumées contribuent à augmenter la température.

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