"Un dispositif utile et globalement maîtrisé": Borne s'oppose à la réforme de l'AME et nie un engagement
Faut-il mettre fin à l'Aide médicale d'État? La question éminemment politique a été ramenée sur le devant de la scène par le nouveau ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, déjà en campagne contre l'immigration quelques heures après sa prise de poste.
"Je ne veux pas que la France soit le pays le plus attractif d'Europe pour un certain nombre de prestations sociales d'accès aux soins", assurait-il à TF1 le soir de sa prise de poste.
Pour l'ancienne Première ministre Élisabeth Borne, ce dispositif destiné à garantir l'accès aux soins aux étrangers en situation irrégulière, doit être conservé. "C'est un dispositif utile et globalement maîtrisé", écrit ce mercredi 25 septembre la députée du Calvados.
Mais pourquoi l'ancienne cheffe du gouvernement est-elle sortie du bois? Car son nom et ses "engagements" ont été invoqués par le patron du Sénat, Gérard Larcher, dans une interview au média France Inter.
"Élisabeth Borne m’a écrit en janvier pour me dire qu’elle envisageait de réformer l’Aide médicale d’État en Aide médicale d’urgence. Elle me disait à l’époque qu’elle le ferait soit par voie législative, soit par voie réglementaire", a assuré le parlementaire du camp Les Républicains.
Dossier explosif
Pour rappel, la réforme de l'AME était un point excessivement litigieux au sein de l'explosive "Loi immigration" adoptée dans la douleur en décembre 2023. Une réforme ayant eu un fort coût politique pour le camp présidentiel, menant au départ d'une partie de l'aile gauche de la macronie, dont l'ancien ministre de la Santé Aurélien Rousseau.
Mais, en gage de paix, le gouvernement avait exclu la question de l'AME du texte de loi. Pour ne pas se brouiller avec la droite pour autant, et en obtenir les voix, Élisabeth Borne avait ainsi ouvert la voie à une reforme du dispositif.
"J'ai demandé aux ministres concernés de préparer les évolutions réglementaires ou législatives qui permettront d'engager une réforme de l'AME (...) Les évolutions nécessaires devront être engagées en début d'années 2024", a-t-elle écrit le 18 décembre 2023 à Gérard Larcher. Un courrier qui n'engage effectivement ni à une suppression de l'AME ni à sa transformation en AMU.
Serpent de mer
Sauf que. Depuis ce courrier, le paysage politique a été pour le moins chahuté. D'abord, Élisabeth Borne a perdu son titre de Première ministre lors du remaniement de janvier, au profit de Gabriel Attal.
Puis, la campagne des élections européennes, la dissolution de l'Assemblée nationale, les nouvelles législatives et, enfin, la longue attente avant la composition d'un nouveau gouvernement ont considérablement freiné le jeu des réformes.
La nouvelle réforme migratoire pourrait ne pas être directement débattue dans la nouvelle assemblée. Mais adoptée par décret. La présidente de la chambre basse Yaël Braun-Pivet a d'ores et déjà demandé à Bruno Retailleau de ne pas "contourner" le pouvoir législatif pour accélérer la manœuvre.
"Je serai très attentive à cela. Le Parlement ne sera pas contourné. J’entends que le gouvernement respecte le Parlement dans toutes ses prérogatives et donc qu’il l’associe pour construire des politiques qu’il souhaite mener", insistait l'élue des Yvelines sur BFMTV-RMC mardi.
Reste que, du point de vue de la santé publique, les spécialistes appellent tous à ne pas démembrer le dispositif. "Remettre en cause l'aide médicale d'État serait complètement stupide pour la santé publique, mais également pour les finances de l'assurance maladie", a d'ailleurs reconnu le médecin et ancien ministre de la Santé François Braun.
Un rapport sur l'AME destiné aux différents ministères avait d'ailleurs souligné l'intérêt économique et sanitaire du dispositif, soulignant l'absence d'effet d'aubaine associé.