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Des milliers de blouses blanches défilent dans Paris

Des milliers de professionnels de santé ont manifesté dimanche après-midi à Paris contre le projet de loi santé de la ministre Marisol Touraine et sa mesure phare, la généralisation du tiers payant qui dispense les patients d'avance de frais médicaux. /Photo prise le 15 mars 2015/REUTERS/Gonzalo Fuentes

PARIS (Reuters) - Des milliers de professionnels de la santé libéraux ont manifesté dimanche à Paris contre le projet de loi santé de Marisol Touraine et sa mesure phare, la généralisation du tiers payant qui dispense les patients d'avance de frais médicaux. La ministre, qui a reçu une délégation de leurs organisations en fin de journée, a confirmé la mise en oeuvre du tiers payant généralisé d'ici fin 2017 en rappelant qu'elle s'accompagnerait d'une garantie de paiements des médecins. Elle a annoncé en outre avoir déposé des amendements à son texte répondant à des préoccupations des manifestants. Venus de toute la France, médecins, dentistes, kinésithérapeutes, infirmiers mais aussi étudiants ont défilé entre la place Denfert-Rochereau, dans le sud de Paris, et le ministère de la Santé, dans le VIIe arrondissement. Les organisateurs ont revendiqué la présence de 40.000 blouses blanches, deux fois plus que leur objectif pour cette manifestation unitaire sans précédent depuis 1991. La police n'a compté pour sa part que 19.000 participants à cette marche en forme de point d'orgue d'un mouvement de protestation lancé fin 2014 et organisée à deux jours du début de l'examen du texte contesté en commission à l'Assemblée. Sur les banderoles, on pouvait lire "la loi Touraine nuit gravement à la santé", "Tiers payant généralisé - médecins enchaînés, patients trompés" ou encore "Un tiers payant, deux tiers méfiants". Les médecins sont vent debout contre une réforme qui, selon eux, n'apporte pas les réponses nécessaires pour préserver le système de santé français - réduire la place de l'hôpital, mieux former les praticiens, rationaliser les parcours de soins. Marisol Touraine a confirmé en début de semaine une mise en oeuvre de la généralisation du tiers payant d'ici à fin 2017 qui serait assortie d'un dispositif de garantie de paiements pour les médecins, avec versement de pénalités en cas de retards. "LA MINISTRE CHERCHE LA BAGARRE" Face aux craintes des praticiens, elle a exprimé dimanche soir "sa volonté que le système soit aussi simple que possible, que les médecins ne se rendent même pas compte qu'il y a un système technique qui existe". Ces assurances, déjà données en début de semaine, n'ont pas suffi à désarmer l'opposition des professionnels. Ils s'irritent aussi d'informations de presse, non confirmées par ses services, selon lesquelles la ministre de la Santé a demandé au Premier ministre Manuel Valls que son texte puisse bénéficier d'une procédure d’urgence au Parlement afin que son vote ne soit pas retardé par un calendrier chargé. "On voit clairement que la ministre cherche la bagarre", a dit Jean-Paul Hamon, président de la Fédération des médecins de France. "On demandait clairement des délais pour faire une véritable réforme dont le pays a besoin et la ministre a déclaré qu'elle voulait une procédure accélérée au contraire pour faire passer sa loi en force", a-t-il indiqué sur iTELE. Jean-Paul Ortiz, président de la CSFM (Confédération des syndicats médicaux français), a souligné que la colère des blouses blanches dépassait le seul tiers payant. "Il y a le problème de l'étatisation et de la bureaucratisation de la médecine, en particulier de la médecine de proximité, qui va remettre en cause à la fois le libre choix d'organisation pour les médecins mais aussi pour les patients le libre choix de leurs médecins", a-t-il déclaré sur BFMTV. Médecin généraliste dans l'Essonne, Laurence Pique a dénoncé un "ras-le-bol généralisé" de la profession. Pour elle, le tiers payant, que l'on met beaucoup en avant, "n'est pas la priorité". Ce qu'il faut, "c'est arriver à soigner correctement les gens et à faire de la vraie médecine et ne pas faire que de l'administratif et de la paperasserie", a-t-elle dit à Reuters. Face à ces attaques, Marisol Touraine a mis en avant sa "volonté de dialogue constante" et assuré que la transformation du système de santé qui doit permettre de mieux répondre aux besoins des Français "ne se fera pas sans les médecins". "Je confirme que j'ai déposé des amendements qui permettent de répondre aux préoccupations qu'ils m'ont exprimées ces derniers mois sur toute une série de sujets assez limités, bien identifiés, qui permettront de répondre aux demandes qu'ont formulées les professionnels de santé", a-t-elle dit. (Yann Le Guernigou et Thierry Chiarello, édité par Jean-Stéphane Brosse)