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Des économistes allemands dénoncent le projet "risqué" de Macron

Des économistes allemands de premier plan dénoncent mardi dans une tribune publiée par le journal Frankfurter Allgemeine Zeitung les projets de réforme de la zone euro avancés par Emmanuel Macron, qu'ils jugent dangereux et susceptibles de favoriser un partage des dettes entre pays. /Photo prise le 17 avril 2018/REUTERS/Vincent Kessler

BERLIN (Reuters) - Des économistes allemands de premier plan dénoncent mardi dans une tribune publiée par le journal Frankfurter Allgemeine Zeitung les projets de réforme de la zone euro avancés par Emmanuel Macron, qu'ils jugent dangereux et susceptibles de favoriser un partage des dettes entre pays.

Le président français prône la création d'un budget spécifique pour la zone euro, avec la désignation d'un ministre des Finances, et la transformation du Mécanisme européen de stabilité (MES) en un fonds monétaire européen.

"Nous, 154 professeurs d'économies, mettons en garde contre l'édification d'une union monétaire et bancaire européenne se dirigeant encore plus vers une union de la dette", écrivent ces économistes.

Parmi les signataires figurent entre autres Jürgen Stark, qui a démissionné en 2011 du directoire de la Banque centrale européenne en raison de son opposition aux mesures non conventionnelles de la BCE face à la crise des dettes souveraines en zone euro, et Hans-Werner Sinn, ancien patron de l'influent institut Ifo.

Les idées d'Emmanuel Macron et de Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne, qui prône la création d'un poste de ministre de l'Economie et des Finances pour l'Union européenne, "impliquent de grands risques pour les citoyens européens", ajoutent ces économistes.

A leurs yeux, une transformation du MES en un mécanisme de soutien aux banques affaiblirait la détermination de ces établissements et de leurs autorités de supervision à lutter contre les créances douteuses. Le MES risquerait en outre de subir l'influence de pays extérieurs à la zone euro s'il devenait un organe régi par le droit européen.

La création de deux fonds européens, l'un pour l'investissement et l'autre pour soutenir les réformes structurelles, entraînerait de "nouveaux transferts et prêts vers des pays de la zone euro qui ont été incapables par le passé de mettre en oeuvre les réformes nécessaires", poursuivent-ils.

Puisqu'il serait en dialogue avec la BCE, la création d'un ministre européen des Finances politiserait davantage la politique monétaire de l'institut de Francfort, saperait la croissance économique et menacerait la prospérité de l'Europe dans son ensemble, affirment ces économistes.

Il faut accomplir des progrès sur le plan des réformes structurelles plutôt que de créer de nouvelles lignes de crédit et des incitations à la "mauvaise conduite économique", insistent-ils. La zone euro doit se doter d'"une procédure d'insolvabilité ordonnée" et d'une "procédure de sortie ordonnée" pour ses pays membres, prônent les signataires.

La chancelière allemande, Angela Merkel, se dit favorable à un renforcement de la zone euro et elle a apporté son soutien à la proposition de son ministre des Finances, le social-démocrate Olaf Scholz, de transformer le MES en un mécanisme de démantèlement des banques en faillite. Elle juge cependant que chaque Etat membre au sein de l'union monétaire doit assumer la responsabilité de ses choix politiques.

(Michelle Martin; Bertrand Boucey pour le service français, édité par Wilfrid Exbrayat)