La députée LFI Sophia Chikirou est mise en examen pour escroquerie aggravée
Une députée LFI dans la tourmente. L'élue de La France insoumise Sophia Chikirou a été mise en examen ce lundi matin pour escroquerie aggravée, abus de biens sociaux et recel d’abus de confiance, a appris BFMTV de source judiciaire, confirmant une information du Monde.
Dans cette enquête, la justice soupçonne Mediascop, sa société de conseil en communication, d'avoir surfacturé certaines prestations lors de la campagne présidentielle de Jean-Luc Mélenchon en 2017, ce que nie l'élue de 45 ans, très proche du fondateur de LFI.
Perquisitions spectaculaires
En 2018, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) puis la cellule de renseignement financier Tracfin avaient adressé des signalements au parquet de Paris qui a ouvert une enquête préliminaire en avril 2018.
La CNCCFP, qui a validé fin 2017 les comptes des onze candidats malgré certaines dépenses retranchées (434.939 euros sur 10,7 millions déclarés concernant Jean-Luc Mélenchon), avait justifié son signalement par des "interrogations", notamment sur les dépenses facturées par l'association l'Ere du peuple et par Mediascop. Mi-octobre de la même année, le parquet avait diligenté des perquisitions spectaculaires, notamment car une partie a été diffusée en direct sur la page Facebook de Jean-Luc Mélenchon, au siège du parti, chez le leader Insoumis et de nombreux collaborateurs, déclenchant l'ire du parti de gauche radicale. "Il n'y a pas eu de surfacturation, Mediascop n'a pas surfacturé, il n'y a pas d'enrichissement personnel, il n'y a pas eu de détournement de fonds publics", avait balayé Sophia Chikirou en octobre 2018, quelques jours après son audition libre sur deux jours à Nanterre par la police anticorruption (Oclciff).
135.000 euros de salaires et de dividendes
Début novembre 2018, le dossier avait été confié à des juges d'instruction. D'après un rapport d'enquête cité par Mediapart, Mediascop avait vu "sa rentabilité bondir" à l'issue de ces campagnes 2017 avec un niveau "considéré par les experts comme étant 'supérieur' à celui des entreprises du secteur de même taille".
Toujours d'après Mediapart, Sophia Chikirou aurait pu grâce à ces élections de 2017 se "verser à titre personnel plus de 135.000 euros de salaires et dividendes avant impôts dont elle a décidé seule du montant en tant que présidente et unique actionnaire de Mediascop", alors même qu'elle était au même moment responsable de la communication du candidat. "Le prix libre, c'est le principe du capitalisme", a défendu une source proche de Sophia Chikirou à l'AFP, contestant toute "surfacturation" ou "prix délirant".
Une position désormais très fragile
Dans un premier temps, les juges d'instruction ont mis en examen au printemps 2021 l'association l'Ere du peuple et la mandataire financière du candidat, Marie-Pierre Oprandi, pour "prêt illicite de main d'oeuvre", et la seconde en plus pour "usage de faux", loin des soupçons d'escroquerie et de surfacturations initialement évoqués. Le parti de gauche radicale y avait vu une forme de victoire. Mais de nouvelles auditions révélées ultérieurement par Mediapart ont montré, selon le site d'investigation, que des missions facturées par l'Ere du peuple étaient en réalité réalisées par d'autres prestataires, et que l'Ere du peuple aurait alors émis de fausses factures pour justifier les frais.
En septembre 2021, le député LFI de Seine-Saint-Denis Bastien Lachaud, salarié en 2017 en tant que trésorier de l'association, avait été mis en examen notamment pour "prêt illicite de main-d'oeuvre, faux, escroquerie et tentative d'escroquerie".
Puis en février 2022, l'Ere du Peuple voyait ses poursuites aggravées, avec l'ajout des infractions d'"escroquerie et tentative d'escroquerie aggravée" et "faux et usage de faux". La mise en examen de Sophia Chikirou risque de fragiliser la position déjà jugée clivante au sein du Nouveau Front populaire de cette ancienne militante socialiste, ralliée de manière éphémère à Nicolas Sarkozy en 2007 avant de rejoindre Jean-Luc Mélenchon par la suite.
Le mouvement a dénoncé de son côté "une opération politico-judiciaire sans fin, commencée en 2018 ciblant l’entourage de Jean-Luc Mélenchon. En 6 ans, le dossier ne comporte pas une pièce supplémentaire depuis le premier jour" dans un communiqué de presse.