Le débat Tim Walz-J.D. Vance pour la présidentielle américaine met le Midwest au centre du jeu
ÉTATS-UNIS - Leurs idées sont au moins aussi éloignées que les 1 600 km qui séparent le lieu où ils ont grandi. Le républicain J.D. Vance et le démocrate Tim Walz, respectivement colistiers de Donald Trump et de Kamala Harris pour la présidentielle américaine, vont se rencontrer pour un unique débat télévisé ce mardi 1er octobre. Avec, au centre du jeu, une région américaine souvent oubliée : le Midwest.
Le Midwest recouvre un quart du pays, au nord-ouest des États-Unis, soit pas moins de 12 États. Tim Walz est originaire de l’extrême ouest de cette zone, plus précisément des petites villes de Butte et de Valentine dans le Nebraska. Un État rural où il passait son temps dans les champs, avec ses amis, et sur les terrains de football américain. Son récit est celui d’une enfance heureuse dans la nature malgré le cancer de son père qui meurt alors qu’il a 19 ans.
L’histoire de J.D. Vance est d’un tout autre acabit. Il l’a racontée en 2018 dans le livre Hillbilly Elegy, bouquin à succès qui a conduit à sa renommée nationale et à son engagement en politique. Jusqu’à devenir le jeune clone de Donald Trump, embrassant l’idéologie MAGA (« Make America Great Again ») et incarnant le futur du parti républicain. Dans cette autobiographie, J.D. Vance raconte son enfance dans la ville désindustrialisée de Middletown, dans l’Ohio, sa mère toxicomane et la pauvreté avec ses grands-parents qui l’ont élevé à la dure. Puis son ascension sociale de l’armée à la célèbre école de droit de Yale.
Leurs origines et histoires personnelles ne sont pas étrangères à leur présence sur les tickets présidentiels. Ils ont été choisis par Donald Trump et Kamala Harris notamment parce qu’ils viennent de cette partie de l’Amérique sous-représentée en politique. Et c’est justement ici que se trouvent certains des Etats-clés qui seront déterminants pour la présidentielle du 5 novembre.
La bataille des idées pour le Midwest
Les républicains espèrent ainsi convaincre les ouvriers de la Rustbelt, la « ceinture de rouille », qui se situe en partie dans le Midwest et qui a subi de plein fouet la désindustrialisation. Donald Trump n’a d’ailleurs pas manqué de souligner, lorsqu’il a choisi le jeune sénateur de l’Ohio pour colistier, que ce dernier « sera concentré sur les gens pour qui il s’est brillamment battu, les ouvriers et agriculteurs américains de Pennsylvanie, du Michigan, du Wisconsin, de l’Ohio, du Minnesota, et même au-delà ».
Quant aux démocrates, l’image de « papa cool » de Tim Walz, son accent du Midwest, son passé de chasseur dans la Garde nationale et sa carrière d’entraîneur de football américain a largement pesé dans la balance. Sans oublier que si le sexagénaire n’habite plus dans le Nebraska, il est depuis cinq ans le gouverneur d’un autre État du Midwest : le Minnesota, situé à la frontière avec le Canada.
Reste à savoir si les deux profils parviendront à changer la donne. Malgré sa bonhommie, Tim Walz est élu d’un État acquis aux démocrates. Quant aux électeurs du Nebraska, solidement républicains et qui voient les démocrates comme un épouvantail, ils ne risquent pas de voter pour un enfant du pays qui a quitté le nid depuis de nombreuses années. Dans l’Ohio de J.D. Vance, même constat : les républicains sont quasiment assurés de l’emporter, comme en 2020 et en 2016.
Le Michigan et le Wisconsin, États-clés scrutés
C’est plutôt du côté des États-clés – dits « swing states » – du Midwest qu’il faut se tourner : le Michigan et le Wisconsin. Ils représentent à eux deux 25 grands électeurs sur les 270 nécessaires pour qu’un candidat remporte le scrutin. Un petit retour historique et un coup d’œil dans les sondages montre à quel point ces deux États balancent d’un parti à l’autre en fonction des années électorales et à quel point ils seront déterminants en novembre.
Ainsi, le Michigan avait été remporté par Joe Biden en 2020, alors que Donald Trump l’avait remporté d’un cheveu face à Hillary Clinton en 2016. En 2012, Barack Obama avait largement conquis l’État face à Mitt Romney. Les sondages pour 2024 semblent pour la plupart donner un léger avantage à Kamala Harris, mais il se situe dans la marge d’erreur (deux ou trois points d’avance selon les instituts).
Du côté du Wisconsin, l’écart est encore plus serré. Joe Biden a remporté l’État d’un souffle en 2020. Quatre ans plus tôt, c’est Donald Trump qui l’avait empoché d’un rien tandis qu’en 2012, Barack Obama avait largement gagné. Cette année, les sondages donnent l’avantage à Kamala Harris avec une avance d’un point seulement par rapport à Donald Trump.
Dans un scrutin qui risque de se jouer à une poignée de grands électeurs, remporter le Michigan et le Wisconsin relève de la survie même si tous les États-clés sont à surveiller, en particulier la Pennsylvanie. Voici donc la mission difficile qui incombe à Tim Walz et J.D. Vance.
Le débat a lieu à New York, loin du Midwest
Leur duel atteindra son paroxysme au débat de ce mardi, qui aura lieu de manière assez ironique à New York, bien loin de la réalité du Midwest. Sur scène se verront s’affronter deux Américains aux visions complètement différentes de leur vaste région qu’ils sont certains de connaître par cœur, mais qui ont des solutions aux antipodes pour répondre aux maux de la population.
Tous deux vont défendre le programme de leur champion respectif, mais vont aussi s’attaquer mutuellement. J.D Vance qui devra redresser la barre après le débat raté de Trump contre Harris, ne va pas manquer de qualifier son adversaire de dangereux gauchiste, tout en se dépatouillant de la rumeur lunaire sur les Haïtiens mangeurs d’animaux de compagnie qu’il a contribué à diffuser. Tim Walz va s’efforcer de montrer le contraste entre le programme trumpiste et celui de Kamala Harris, et devrait rappeler toutes les bourdes de son adversaire, qu’il a déjà qualifié de « bizarre ».
Traditionnellement, un débat entre deux vice-présidents potentiels ne fait pas des miracles dans les sondages. Mais avec un unique débat entre Donald Trump et Kamala Harris, les électeurs pourraient être tentés de voir ce que Tim Walz et J.D. Vance ont à leur offrir. Et dans une élection très serrée, rappelle le stratège démocrate Steven Maviglio à The Hill, « il suffit que l’aiguille bouge de 0,1 point dans l’une ou l’autre direction pour faire la différence dans quatre ou cinq États ». Nul doute que Kamala Harris et Donald Trump auront les yeux rivés sur cette aiguille.
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