La crise politique est toujours là et tous ces courriers écrits en même temps montrent que rien n’a avancé
POLITIQUE - À la manœuvre. À peine les Jeux Olympiques terminés, les discussions en coulisses se sont doublées d’appels en bonne et due forme. En moins de quarante-huit heures, trois camps politiques ont publiquement pris la plume pour s’adresser à leurs homologues. L’objectif est identique : trouver une majorité à l’Assemblée nationale pour « répondre » aux demandes des Français. Mais les trois missives illustrent aussi toute la difficulté à y parvenir.
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La lettre de Lucie Castets, candidate du NFP pour Matignon, est signée par l’ensemble des présidents des groupes de gauche du Sénat et de l’Assemblée nationale. Elle a été adressée le 12 août à tous les élus, à l’exception de ceux du Rassemblement national. Celle de Laurent Marcangeli, président du groupe Horizons & Indépendants n’a été envoyée qu’aux chefs de file du Palais Bourbon, à l’exception de Mathilde Panot, présidente du groupe LFI.
Ce mardi 13 août, c’est le secrétaire général de Renaissance Stéphane Séjourné et le Premier ministre démissionnaire Gabriel Attal qui se sont adressés à plusieurs responsables politiques, rapporte BFMTV : aux dirigeants socialistes, écologistes, communistes et de Place Publique, à leurs alliés MoDem et Horizons, aux responsables LR. Sans oublier, de façon plus surprenante, le président de région des Hauts-de-France Xavier Bertrand et l’ancien Premier ministre Bernard Cazeneuve au centre des rumeurs pour Matignon. Exclus des destinataires : le RN et LFI.
Info @BFMTV
La lettre de @steph_sejourne le secrétaire général de Renaissance aux chefs des partis et à Bernard Cazeneuve, Raphaël Glucksmann et Xavier Bertrand.
Lettre à tous, sauf au RN et LFI.
« Nous devons trouver une nouvelle voie à l’Assemblée nationale, par le dialogue… pic.twitter.com/16CRLU9Od8— Anthony Lebbos (@AnthonyLebbos) August 13, 2024
Quelques avis partagés
Ces trois courriers que Le HuffPost a pu consulter et comparer partagent le même constat crucial : l’absence d’une majorité au Palais Bourbon qui « oblige » les élus à travailler ensemble. « S’entendre n’est pas une obligation de moyens, c’est une obligation de résultat », écrit Laurent Marcangeli, quand Lucie Castets estime que s’il est nommé, un gouvernement NFP « devra en premier lieu tenir compte du fait que la majorité sur laquelle il s’appuie n’est que relative et qu’il lui sera dès lors nécessaire de convaincre au-delà » de ses rangs. « Nous devons trouver une nouvelle voie à l’Assemblée nationale, par le dialogue et le dépassement des clivages habituels », écrit pour sa part Stéphane Séjourné.
Ceci posé, les responsables de RRenaissance d’Horizons et de la gauche ont des sujets en commun. Ainsi, Lucie Castets fixe parmi ses priorités l’amélioration du pouvoir d’achat, le « redressement » de l’Éducation nationale et un meilleur accès aux soins et aux services publics. Chez Horizons, il est question de « vivre de son travail » et « pouvoir se loger », « avoir un accès aux soins et offrir une éducation de qualité à nos enfants ». Le « Pacte d’action pour les Français » de Renaissance met « le pouvoir d’achat, le logement et le travail » ainsi que « les services publics, au premier rang desquels l’éducation et la santé » parmi ses sept « chantiers prioritaires ».
Enfin, Laurent Marcangeli et Lucie Castets évoquent tous deux les « corps intermédiaires » qui « devront trouver toute leur place » selon le chef de file d’Horizons, quand la coalition de gauche veut qu’ils soient « partie prenante du renouveau des pratiques démocratiques ».
Et des divergences profondes
Alors avec tout ça, où va-t-on ? Spoiler : pas très loin. En dépit de ces quelques aspirations partagées, des profondes divergences rendent compliquée une entente, même partielle.
Déjà, sur le fond. Alors que le parti d’Édouard Philippe fait de l’absence de toute hausse d’impôts un « principe » pour construire les budgets 2025, le Nouveau Front Populaire estime qu’« une hausse des ressources fiscales concentrée sur les foyers les plus aisés, les multinationales » permettra de financer les services publics, le pouvoir d’achat et la transition écologique sans creuser la dette. Autre point bloquant, l’abrogation de la réforme des retraites citée comme l’une des priorités absolues du NFP. Réforme défendue par les macronistes et que les députés Horizons jugeaient même trop modérée.
À ces profonds désaccords programmatiques, s’y ajoute au moins un autre, immense : le refus catégorique d’Horizons et de Renaissance de discuter avec La France insoumise. Déjà pendant l’eentre-deux tours Édouard Philippe plaidait pour un « ni-RN ni-LFI ». La ligne n’a pas évolué depuis, puisque ni Mathilde Panot ni Manuel Bompard coordinateur national du mouvement ne figurent pas parmi les destinataires des courriers du camp présidentiel et de ses alliés.
Loin d’être anecdotique, cette absence peut à elle seule tuer dans l’œuf tout espoir d’entente. Car elle suppose que les cadres socialistes, écologistes et communistes acceptent des discussions sans leurs alliés insoumis, une option rejetée à ce stade malgré les divergences qui peuvent opposer les partis de gauche en interne. Retour à la case départ, ne passez par la case « majorité », ne touchez pas le gros lot à Matignon.
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